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dans fes Hypomnefes de lingua gallica (p. 72.) Agallis interponi litteram T fciendum eft, fed in pronunciatione potiùs quam in feriptura. Ils écrivoient alors fouffre - il, parla - elle, viendraon, quoiqu'ils prononçaffent comme nous : c'eft auffi la pratique & la règle de Robert Eftienne dans fa Grammaire françoife.

S. eft ordinairement la terminaifon de la feconde perfonne fingulière, & du pluriel dans les noms & les adjectifs de là l'ufage où nous fommes d'en faire une lettre euphonique dans deux circonftances caractérisées par ces deux aspects.

La première eft après la feconde perfonne fingulière du préfent poftérieur de l'Impératif des verbes de la 1. conjugaifon, ou de ceux en ir dont le préfent indéfini de l'Indicatif eft en e; on y insère une s euphonique, fi ces Impératifs font fuivis de l'un des adverbes en ou y; mais cette lettre s'écrit alors comme terminaifon de l'Impératif: Vas-y, donnes-y tes foins, offres -y tes confeils, acceptes-en l'hommage, ouvres- en l'avis, vas en prendre la defenfe. La lettre euphonique n'a point lieu, fi en est prépofition : Va en Italie, accepte en change ce bijou, fouffre en patience les caprices de cet homme.

La feconde circonftance eft à l'égard de cette phrafe quatre yeux, où l'ufage le plus commun eft d'inférer l's plurièle, mais fans l'écrire ainfi, l'on dit comme fi l'on écrivoit, Quatres yeux valent mieux que deux, la chofe fe paffa entre quatres yeux. Je crois qu'il feroit mieux de l'écrire; il ne refteroit aucun doute fur la prononciation. J'ai vu s'élever à ce fujet une conteftation entre quelques gens de Lettres, qui furent d'avis différents; la queftion portée à l'Académie la partagea de même. Pour moi, qui n'ai point fu les raifons refpectives des confultants, je penfe qu'il y auroit inconvénient à ne pas introduires dans la prononciation; parce qu'alors il faudroit prononcer quate yeux, en altérant le premier mot, ou quatre ïeux en décompofant le fecond comme celui d'ieufe au lieu qu'on ne gâte ni l'un ni F'autre en introduifant I's euphonique, qui d'ailleurs a de l'analogie au nombre pluriel défigné par quatre. (M. BEAUZEE.)

* S'ÉVADER, S'ÉCHAPER, S'ENFUIR. Synonymes.

Ces mots diffèrent, en ce que s'Évader fe fait en fecret, s'Échaper fuppofe qu'on a déja été pris ou qu'on eft près de l'être, s'Enfuir ne fuppofe aucune de ces conditions.

On s'évade d'une prifon; on s'échape des mains de quelqu'un; on s'enfuit après une bataille perdue. (M. D'ALEMBERT.)

(Il faut de l'adreffe & du bonheur, pour s'évader; de la préfence d'efpri: & de la force, pour s'échaper; de l'agilité & de la vigueur, pour s'enfuir.) (M. BEAUZKE.)

(N.) ÉVEILLER, RÉVEILLER. Synonymes. Le premier de ces mots cft d'un plus fréquent ufage dans le fens litteral; le fecond cft plus fouvent employé dans le fens figuré. L'un se fait quelquefois fans le vouloir; mais l'autre marque ordinairement du deffein.

Le moindre bruit éveille ceux qui ont le fommeil tendre. Il faut peu de chofe pour réveiller une paffion qui n'a pas été parfaitement deracinée du cœur. (L'abbé GIRARD.)

Ces deux verbes, dans le propre & quand il s'agit du fommeil, fe confondent affez fouvent, & nos meilleurs écrivains ne les diftinguent pas

trop.

Après y avoir fait réflexion, il m'a femblé qu'on pouvoit mettre quelque différence entre Éveiller & Réveiller: que le premier fe dit proprement par rapport à une heure réglée; le fecond, par rapport à un temps extraordinaire. Je m'explique.

Un homme qui a coutume de fe lever à cinq heures du matin, & qui ne veut pas dormir davantage, dira à fes gens » Ne manquez pas de m'éveiller à cinq heures ». Au contraire, une perfonne qui a en té:e une affaire importante, & qui attend quelques nouvelles avec impatience, dira en fe couchant : « S'il vient des lettres cette >> nuit, qu'on ne manque pas de me Réveiller ».

Réveiller emporte quelque chofe d'irrégulier & de fubit, ou une affaire qui furvient tout à coup, ou un bruit qu'on n'a pas accoutumé d'entendre. (BOUHOURS.)

Éveiller fuppofe une heure réglée, ou une ceffation fpontanée du fommeil. (M. BEAUZÉE.)

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Selon ces deux règles, Eveiller & Réveiller font bien dans les exemples fuivants : « Il eft agréable de s'Éveiller de foi-même, lorfque le » corps a pris tout le repos qu'il lui faut. L'ami>> ral s'étoit couché tard & fon premier fommeil » duroit encore, lorfque fon valet de chambre le » réveilla & lui dit qu'il y avoit à la porte des » perfonnes mafquées qui demandoient à lui par

>> ler »>.

,

Ces exemples, dis-je, me femblent corrects; mais je doute que ceux-ci le foient: « Il eft fà» cheux d'être éveillé par le bruit; Jofeph étant » réveillé fit ce que l'ange du Seigneur lui avoit » ordonné ». Car un bruit fait qu'on le réveille; & un fonge, qui n'a rien de trifte ni d'affreux, n'empêche pas qu'on ne s'éveille. (BouпOURS.)

(N.) ÉVÈNEMENT, ACCIDENT, AVENTURE. Synonymes.

Évènement fe dit en général de tout ce qui arrive dans le monde, foit au public foit au particulier; & il eft le mot convenable pour les faits qui concernent l'État ou le Gouvernement. Accident fe dit de ce qui arrive de fâcheux, foit à un feul foit à plufieurs particuliers; & il s'applique également aux faits qui ne font pas perfonnels comme à ceux qui le font. Aventure fe

H

H

dit uniquement de ce qui arrive aux perfonnes, foit que les chofes viennent inopinément foit qu'elles foient la fuite d'une intrigue ; & ce mot marque quelque chofe qui tient plus du bonheur que du malheur. Il me femble auffi que le hafard a moins de part dans l'idée d'Évènement, que dans celle d'Accident & d'Aventure.

Les révolutions d'État font des Événements: les chutes d'édifices font des Accidents: les bonnes fortunes des jeunes gens font des Aventures.

La vie eft pleine d'Événements que la prudence ne peut prévoir. La plupart des Accidents n'arrivent que par défaut d'attention. Il eft peu de gens qui ayent vécu dans le monde fans avoir eu quelque Aventure bizarre. (L'abbé GIRARD.)

l'on

(N.) EXAGÉRATION, f. f. Figure de pensée par raifonnement, qui confifte à mettre, à la place de la véritable idée de la chofe, une autre idée du même genre, mais d'un degré fupérieur par rapport à la qualité bonne ou mauvaise que veut défigner: comme fi l'on appeloit cruel celui qui n'eft que févére, avare celui qui n'eft qu'économe, &c; ou fi l'on donnoit à une faute légère le nom de crime énorme, à une fragilité pardonnable celui de méchanceté atroce, &c.

>> La Poéfie, dit M. de Voltaire, eft furtout » le champ de l'Exagération. Tous les poètes » ont voulu attirer l'attention des hommes par des » images frapantes. Si un dieu marche dans l'iliade, »il eft au bout du monde à la troisième enjam» bée. Ce n'étoit pas la peine de parler des mon>> tagnes pour les laiffer à leur place; il falloit les » faire fauter comme des chèvres, ou les fondre » comme de la cire.

» L'Ode, dans tous les temps, a été confacrée » à l'Exagération. Aufsi, plus une nation devient » philofophe, plus les odes à enthousiasme & qui » n'apprennent rien aux hommes, perdent de leur >> prix.

»De tous les genres de Poéfie, celui qui charme le plus les efprits inftruits & cultivés, c'eft la » Tragédie. Quand la nation n'a pas encore le » goût formé, quand elle eft dans ce paffage de » la barbarie à la culture de l'efprit; alors pref» que tout dans la Tragédie eft gigantefque & hors

» de nature.

» Rotrou, qui, avec du génie, travailla pré»cifément dans le temps de ce paffage, & qui » donna dans l'année 1636 fon Hercule mourant, » commence par faire parler ainfi fon Héros :

» Père de la clarté, grand Aftre, Ame du monde,
» Quels termes n'a franchi ma course vagabonde?
»Sur quels bords a-t-on vu tes rayons étalés,

Où ces bras triomphants ne fe foient fignalés?
J'ai porté la terreur plus loin que ta carrière,

» Plus loin qu'où tes rayons ont porté la lumière ;

» J'ai forcé des pays que le jour ne voit pas,

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Et j'ai vu la nature au dela de mes pas ;

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» Promener mes vaiffeaux fur leur campagne humide. » L'air tremble comme l'onde au feul bruit de mon nom, » Et n'ofe plus fervir la haîne de Junon.

» Mais qu'en vain j'ai purgé le séjour où nous fommes ! » Je donne aux immortels la peur que j'ôte aux hommes.

» On voit par ces vers combien l'exagéré, l'ampoulé, le forcé, étoient encore à la mode; » & c'est ce qui doit faire pardonner à P. Cor»> neille.

» Il n'y avoit que trois ans que Mairet avoit >> commencé à fe rapprocher de la vraisemblance » & du naturel dans la Sophonisbe. Il fut le pre»mier en France, qui non feulement fit une » pièce régulière dans laquelle les trois unités >> font exactement obfervées, mais qui connut le » langage des paffions & qui mit de la vérité dans » le dialogue: il n'y a rien d'exagéré, rien d'am>> poulé dans cette pièce. L'auteur tomba dans un >>vice tout contraire; c'eft la naïveté & la fami» liarité, qui ne font convenables qu'à la Comédie : » cette naïveté plut alors beaucoup.

» La première entrevûe de Sophonisbe & de » Maffiniife charma toute la Cour. La coquetterie » de cette reine captive, qui veut plaire fon

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vainqueur, eut un prodigieux fuccès. On trouva » même très-bon que de deux fuivantes qui accom»pagnent Sophonisbe dans cette fcène, l'une dît » à l'autre, en voyant Maffiniffe attendri, Ma » Compagne, ilfe prend: ce trait comique étoit » dans la nature, & les difcours ampoulés n'y font >> pas; auffi, cette pièce refta plus de quarante années >> au Théâtre.

» L'Exagération efpagnole reprit bientôt fa >> place dans l'imitation du Cid que donna P. Cor»> neille d'après Guillain de Caftro & Baptifta » Diamante, deux auteurs qui avoient traité ce fujet avec fuccès à Madrid. Corneille ne craignit >> point de traduire ces vers de Diamante :

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>> Non feulement ces rodomontades étoient intolérables, mais elles étoient exprimées dans un » ftyle qui fefoit un énorme contrafte avec les fen» timents fi naturels & fi vrais de Chimène & de >> Rodrigue.

>>Toutes ces images bourfoufflées ne commencèrent » à déplaire aux efprits bien faits, que lorsqu'enfin » la politeffe de la Cour de Louis XIV apprit aux françois que la modeftie doit être la compagne de » la valeur; qu'il faut laiffer aux autres le foin de »nous louer; que ni les guerriers, ni les mi»> niftres, ni les rois ne parlent avec emphase; » & que le ftyle bourfoufflé eft le contraire du >> fublime.

>> On n'aime point aujourdhui qu'Augufte parle » de l'empire abfolu qu'il a fur tout le monde, » & de fon pouvoir fouverain fur la terre & » fur l'onde. On n'entend plus qu'en fouriant Émilie

» dire à Cinna:

» Pour être plus qu'un roi, tu te crois quelque chofe.

» Jamais il n'y eut en effet d'Exagération plus >> outrée. Il n'y avoit pas long temps que des » chevaliers romains des plus anciennes fainilles, » un Septime, un Achillas, avoient été aux gages » de Ptolomée, roi d'Égypte. Le Sénat de Rome >> pouvoit fe croire au deffus des rois; mais chaque » bourgeois de Rome ne pouvoit avoir cette pré»tention ridicule. On haïffoit le nom de roi à >> Rome, comme celui de maître ( Dominus), » mais on ne le méprifoit pas on le méprifoit » fi peu, que Céfar l'ambitionna, & ne fut tué que » pour l'avoir recherché. Octave lui-même, dans » cette tragédie, dit à Cinna :

» Aujourdhui même encor je te donne Émilie,
» Ce digne objet des vœux de toute l'Italie,
>> Et qu'ont mife fi haut mon amour & mes foins,
Qu'en te couronnant roi je t'aurois donné moins.

» Le difcours d'Émilie eft donc, non feulement » exagéré, mais entièrement faux.

» Le jeune Ptolomée exagère bien davantage » lorfqu'en parlant d'une bataille, qu'il n'a point » vue & qui s'eft donnée à foixante lieues d'A» lexandrie, il décrit des fleuves teints de fang, » rendus plus rapides par le débordement des » parricides; des montagnes de morts privés 'd'honneurs fuprêmes & dont les troncs

» pourris exhalent de quoi faire la guerre au »refte des vivants; & la déroute orgueilleufe » de Pompée, qui croit que l'Egypte, en dépit » de la guerre, ayant fauvé le Ciel, pourra » fauver la Terre, & pourra préter l'épaule au

» monde chancelant.

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» Mes foldats prefque nus, dans l'ombre intimidés,
» Les rangs de toutes parts mal pris & mal gardés,
»Le défordre partout redoublant les alarmes,

» Nous mêmes contre nous tournant nos propres armes,

» Les cris que les rochers renvoyoient plus affreux,

» Enfin toute l'horreur d'un combat ténébreux :

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Que pourroit la valeur dans ce trouble funefte?

» Les uns font morts, la fuite a fauvé tout le refte;

Et je ne dois la vie, en ce commun effroi,

» Qu'au bruit de mon trépas que je laisse après moi.

» C'est là parler en homme. Le roi Ptolomée n'a » parlé qu'en poète ampoulé & ridicule ». ( Quest. fur l'Encycl. art. EXAGERATION.)

« De même que l'imagination d'un grand ma» thématicien, dit encore le même auteur (Ib. >> art. IMAGINATION), doit être d'une exactitude » extrême, celle d'un grand poète doit être très» châtiée. Il ne doit jamais préfenter d'images incompatibles, incohérentes, trop exagérées, trop » peu convenables au fujet.

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» Pulchérie, dans la tragédie d'Héraclius (1. 3), dit >> de Phocas:

» La vapeur de mon fang ira groffir la foudre

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Que Dieu tient déja prète à le réduire en poudre.

» Cette Exagération forcée ne paroît pas conve»nable à une jeune princeffe, qui, fuppofé qu'elle » ait oui dire que le tonnère fe forme des exha» laifons de la terre, ne doit pas préfumer que » la vapeur d'un peu de fang, répandu dans une » maison, ira former la foudre. C'est le poète qui » parle, & non pas la jeune princesse ».

Me fera-t-il permis de dire que ce jugement me paroît bien rigoureux & peut être exagéré? Pulcherie ne parle ici de la foudre que métaphoriquement, comme du fymbole naturel de la vengeance divine en la fuppofant inftruite de la manière dont fe forme le tonnère, elle fait trèsbien que le fang de toute une famille ne contribueroit que bien peu ou peut-être point du tout à la formation phyfique de la foudre; mais elle fait auffi, & elle donne à entendre, que le fang, même le plus vil, répandu injuftement, provoque efficacement la vengeance du Ciel, & groffit en effet la foudre que d'autres crimes ont déja allumée : fous ce point de vue, l'expreffion de Pulchérie eft très-belle, & elle est même fans Exagé

ration.

En général l'Exagération, comme les autres figures, ne devient vicieufe que par l'abus : celle du Pf. cxiij. 4. indiquée au commencement par M. de Voltaire, eft de la plus grande beauté; & elle eft en effet dans la bouche du prophète même. Mais peut-être eft-ce avec plus de raifon que La Motte condanne ce vers de Racine :

Le flot qui l'apporta, recule épouvanté.

« On eft choqué, dit-il dans fon Dife. fur la Poéf. en gén. & fur l'Od. en partic.», de voir » un homme accablé de douleur, fi recherché dans » les termes & fi attentif à fa description: mais » ce même vers feroit beau dans une Ode; parce » que c'eft le poète qui y parle; qu'il y fait » profeffion de peindre; qu'on ne lui fuppofe. point de paffion violente, qui partage fon atten» tion; & qu'on fent bien enfin, quand il fe fert » d'une expreffion outrée, qu'il le fait à deffein, » pour fuppléer, par l'Exagération de l'image, » à l'absence de la chofe même ».

Il y a une figure oppofée à celle-ci, que l'on nomme Exténuation : l'une & l'autre ont de l'affinité avec l'Hyperbole; mais elles ont néanmoins des caractères qui les en diftinguent. (Voyez ces mots).

Quelques rhéteurs donnent à l'Exagération le nom d'Auxefe. Nous préférons le premier de ces noms, comme plus françois. (M. BEAUZEE.)

au

(N.) EXCELLER, ÊTRE EXCELLENT. Syn. Exceller fuppofe une comparaifon, met deffus de tout ce qui eft de la même espèce, exclut les pareils, & s'applique à toutes fortes d'objets. Etre excellent place fimplement dans le plus haut degré fans faire de comparaifon, fouffre des égaux, & ne convient bien qu'aux chofes de goût. Ainfi, l'on dit, que le Titien a excellé dans le coloris; Michel Ange, dans le deffin; & que Sylvia eft excellente actrice.

Quelque méchanique que foit un art, les gens qui y excellent fe font un nom. Plus un mets eft excellent, plus il eft quelquefois dangereux d'en trop manger. (L'abbé GIRARD.)

(N.) EXCEPTÉ, HORS, HORMIS. Synon. Ces trois mots caractérisent également un rapport de féparation. Excepté dénote une féparation provenante de non-conformité à ce qui eft général ou ordinaire. Hors & Hormis féparent par exclufion le dernier eft d'un ufage moins fréquent, me paroît plus particulièrement attaché à l'exclufion qui regarde la perfonne.

Aucun homme n'eft exempt de pailion, excepté le parfait chrétien. La loi de Mahomet permet tout, hors le vin. Hormis vous, belle Iris, tout m'est indifférent. (L'abbé GIRARD. ).

(N.) EXCITER, ANIMER, ENCOURAGER. Synonymes.

Exciter, c'eft infpirer le défir ou réveiller la paffion. Animer, c'est pouffer à l'action déja commencée, & tâcher d'en empécher le ralentif fement. Encourager, c'eft diffiper la crainte ou la timidité par l'efpérance d'un fuccès facile, & faire prévaloir le motif de la gloire ou de l'intérêt, fur les apparences du danger & fur les frayeurs de la poltronnerie.

Il eft des ames dures, que les plus grandes

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Mes yeux, ne trompez pas ma timide espérance!
Seroit-il bien poffible!

On appelle point exclamatif, un figne de ponctuation qui fe figure ainfi (!) : fa véritable place eft après toutes les phrafes qui font ou paroiffent être fuggérées par la furprise, la terreur la pitié, la tendreffe, ou quelque autre fentiment affectueux que ce puiffe être. V. PONCTUATION. (M. BEAUZEE.)

(N.) EXCLAMATION, f. f. Figure de pensée par mouvement, dans laquelle il femble qu'on abandonne tout à coup le difcours dicté par la raison, pour fe livrer aux élans impétueux d'un fentiment vif & fubit qui faifit l'ame, comme la douleur ou la joie, l'espérance ou la crainte, l'admiration ou l'horreur, le défir ou l'averfion, l'amour ou la haîne, l'indignation, la surprise, &c.

Cornélie, entendant vanter les regrets & la douleur de Céfar à la vue des cendres de Pompée, s'écrie avec dédain (Pompée. v. 1.):

O foupirs! ô refpect! ô qu'il eft doux de plaindre Le fort d'un ennemi lorsqu'il n'eft plus à craindre! Voici, dans l'Ode facrée de Rouffeau, tirée du Pf. 90, une Exclamation dictée par l'admiration & par l'effroi :

Quels effroyables abîmes
S'entr'ouvrent autour de moi!
Quel déluge de victimes

S'offre à mes yeux pleins d'effroi!

Quelle épouvantable image
De morts, de fang, de carnage,
Frape mes regards tremblants!
Et quels glaives invisibles
Percent de coups fi terribles

Ces corps pâles & fanglants!

Jésus-Chrift, parlant aux difciples d'Emmaüs, s'écrie par un mouvement de cette pitié précieuse qui alloit leur ouvrir les yeux: « O infenfés! ô »cœurs tardifs à croire tout ce qu'ont annoncé les » prophètes » O ftulti, & tardi corde ad credendum in omnibus quæ loquuti funt prophetæ ! (Luc. xxjv. 25.)

Dans l'Oraifon funèbre du prince de Conti Péroraifon), Maffillon dit: Ecoutez, Grands, & inftruifez-vous: tout ce que le monde a le plus admiré, les victoires, les talents, le nom, la fageffe, les lumières, qu'on le trouve vain & frivole au lit de la mort! que la vie la plus glorieufe devant les hommes, la plus remplie de grands événements, paroît alors vide fans Dieu, & digne d'un éternel oubli! qu'on méprife les lumières & les connoiffances qui n'ont pas donné la fcience des faints! Dieu paroît tout alors, & l'homme fans Dieu ne paroît plus

rien.

Un des caractères de l'Exclamation eft de rejeter affez ordinairement la plénitude grammaticale, & de s'énoncer par des phrafes elliptiques. » Au refte, elle doit être rare, dit M. l'abbé de » Befplas dans fon Effai fur l'Éloquence de la » Chaire (2o. éd. p. 178), étant le cri, & par » conféquent le dernier effort d'une paffion fort » animée. Quand elle eft fréquente, elle ne fert » qu'à refroidir & hacher le difcours c'eft la » reflource des orateurs médiocres, qui, ne pouvant » compofer d'un feul jet, rempliffent par ce moyen » tous les vides ». (M. BEAUZEE.)

EXCUSE, PARDON, Synonymes.

On fait excufe d'une faute apparente. On demande pardon d'une faute réelle. L'un eft pour fe juftifier, & part d'un fond de politeffe; l'autre eft pour arréter la vengeance ou pour empêcher la punition, & défigne un mouvement de repentir.

Le bon efprit fait excufer facilement. Le bon cœur fait pardonner promptement. ( L'abbé G1RARD,)

EXEMPLE, f. m. (Art de la Parole). Dans un fens étendu, toute manière de repréfenter une notion générale au moyen d'une idée particulière eft un Exemple, ce qui renferme l'Apologue, la Parabole, l'Allégorie, &c. Mais dans une fignification plus reftreinte, l'Exemple eft un cas particulier allégué dans la vue de faire mieux connoître ce que le genre ou l'efpèce à quoi ce cas appartient a de général.

Dans le difcours ordinaire & dans les ouvrages

didactiques, l'Exemple eft d'un ufage très-fréquent pour éclaircir les propofitions générales, les règles, les définitions; on s'en fert, comme en Arithmétique, pour appliquer à un cas déterminé l'énoncé d'une règle générale. L'orateur & le poète ont rarement befoin de recourir à l'Exemple, dans ce but là. Ils ne propofent guères de notions générales & abftraites, qui ne puiffent être diftinctement conçues fans le fecours des Exemples; mais ceux-ci leur fervent fouvent à exprimer d'une manière plus fenfible & avec une énergie plus efthétique, des chofes qui d'ailleurs feroient affez intelligibles par elles-mêmes.

C'étoit une obfervation affez facile à comprendre, que celle qu'Horace rapporte dans fa première épitre; favoir que chacun eftime le fort des autres plus heureux que le fien. Cependant le poète accumule les Exemples, pour rendre fa remarque plus fenfible.

O! fortunati mercatores, gravis annis
Miles ait, multo jam fradus membra labore.
Contrà mercator, navim jaðantibus auftris,
Militia eft potior.....

Agricolam laudat juris legumque peritus;
Ille... folos felices viventes clamat in urbe.

L'Exemple efthétique peut opérer divers effets: il peut fervir à prouver d'une manière fenfible la thefe générale, en nous rappelant des cas que nous avons réellement vus, & dont nous fentons toute la vérité. Tel eft l'Exemple que nous venons de rapporter; il n'y a point de lecteur d'Horace, pour peu qu'il ait vécu, qui n'ait entendu de pareils difcours. Cette méthode d'inculquer, à l'aide d'Exemples familiers, des vérités générales, eft d'un ufage très-étendu en Poéfie & en Eloquence. C'eft au fond une manière de prouver par induction, la plus propre de toutes à perfuader. On accumule pour l'ordinaire divers de ces Exemples, pour fortifier la preuve, & on les place ou avant ou à la fuite de la thèfe qu'on veut prouver. C'eft un des talents les plus néceffaires au moralifte, que celui de bien choifir ces Exemples, & de favoir, felon les circonftances, les rapporter avec brièveté, ou avec naïveté, ou avec une énergie pittorefque.

Mais quelquefois l'intention du poète ou de l'orateur, en accumulant les Exemples, n'eft point de prouver des chofes trop connues pour avoir befoin de preuves; le but n'eft que d'arréter plus long temps le lecteur fur une vérité, dont il ne fauroit douter, mais qu'il eft bon de lui remettre fouvent & fortement fous les yeux les vérités les plus communes, les mieux connues, ont quelquefois befoin d'être inculquées d'une manière qui les rende toujours préfentes à l'efprit. Qui ne fait que la mort termine fans retour notre carrière?

Horace

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