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ge, quand vous irez vous promener. Cela vous empêchera à la vérité de respirer l'air libre, mais en revanche vous aurez le teint merveilleufement confervé, & perfone n'y trouvera plus à redire, quand vous pafferez fur la terraffe des Feuillans.

EMILIE.

Non, non, non, ma chere maman, je vous remercie de votre voile ; je ne fuis pas encore relique.

LA MERE,

Voyez, n'allez pas fi vite avec vos refus; mon voile vaut la peine qu'on y penfe. Si vous le dédaignez à présent, moi, à mon tour, je ne ferai pas peutêtre difpofée à vous l'offrir quand vous en voudrez, al

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ob Non, non, mamaný je n'en vourdrai jamais. Je ne fuis plus fâchée que d'une chofe

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LA MER E.

De quoi donc?

EMILIE.

De m'être fâchée. Cela me paraît pitoyable à préfent. Je crois, maman, que le plus court eft de ne jamais s'occuper de sa figure. Si elle est bien, tant mieux; fi elle est mal, qu'y faire ? LA MERE.

C'est le plus court & le plus fage. Il faut traiter la beauté comme ces caracteres capricieux qui, s'ils remarquent que vous atachez une grande impor tance à leur conquête, s'éloignent de vous avec dédain, & font au contraire toutes les avances les premiers, fi vous avez l'air de les négliger ou de ne vous en pas foucier.

EMILIE.

b

Maman, voilà qui eft fait, je n'y penferai plus du tout.

LA MERE.

Vous courrez après la fanté.......

EMILIE

Et auffi après la fageffe.

LA MER E.

Fort bien. Et la beauté fe mettra peut-être à courir après vous.

EMILIE.

Mais, s'il lui prend cette fantaisie, je me laifferai atraper, n'eft-ce pas?

Pourvu

LA MER E.

que la fageffe & la fanté fe

laiffent auffi atraper à leur tour.

EMILI E.

Eh bien, maman

maman, pour ne plus penfer à cette capricieuse, prêtez-moi le livre que vous aviez en poche le jour de notre derniere course champêtre. Vous m'avez dit que tous les principes de morale s'y trouvaient réunis,

LA MER E.

Vous le lirez avec le temps.

EMILIE.

Ah, maman, donnez-le-moi à

préfent.

préfent. Cela me fera oublier tout ce gazouillis des Tuileries.

LA MERE.

Chaque chofe a fon temps. Il y a dans ce livre des chofes fort au deffus de votre portée.

EMILIE.

Mais, maman, feulement un petit endroit à apprendre par cœur! Tenez, ceci est une curiofité innocente, que vous ne pouvez pas blâmer.

LA MERE.

Je la trouve même louable. Mais Morfieur de Verteuil m'a emporté hier le livre que vous defirez. Quand il me l'aura rendu, je vous en ferai lire un fragment, & vous m'en ferez enfuite l'extrait.

EMILI E.

Un fragment, c'est comme qui dirait un chapitre, une portion, n'estce pas? Et qu'est-ce que c'eft qu'un extrait?

Tome II.

B

LA MERE.

Extraire c'est tirer d'un ouvrage fa substance, c'est-à-dire, les idées principales, ou bien ce qui vous intéreffe particuliérement, en laiffant de côté tout le refte. Ainfi vous tranfcrirez du livre dont vous parlez, ou du fragment que vous lirez, tout ce qui fera le plus à votre portée, ou ce qui vous plaira préférablement ; & vous pafferez tout ce que vous n'entendez pas bien encore, ou ce qui ne vous atachera pas.

EMILIE.

Oui, qui, je fais, je fais. Il y a aujourd'hui quinze jours que vous m'avez dit cela, & que c'était une opération à double fin, parce que par un extrait on pouvait juger, & de l'efprit de celui qui a fait le livre, & de l'efprit de celui qui a fait l'extrait; & que vous m'en feriez faire cet hi& que nous en ferions ensemble,

ver 2

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