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La Mofcovie eft fur tout fertile en chanvre & en lin, & l'on y trouve tant de miel & de cire, même dans les bois qu'outre la quantité qu'ils en emploient à faire leur hydromel & à des cierges & bougies, cette recolte de cire fait la meilleure partie du commerce que les Mofcovites ont avec les Etrangers, & ils en vendent plus de vingt mille quintaux tous les ans. Outre ces productions du Païs, ils ont encore des cendres de diverfes efpeces, du cuir de Ruffie, des peaux de veau marin, de l'huile de baleine, de la refine, de la poix, du goudron, du fuif, du talc, des cordes, des mâts, du bois de charpente, &c.

Toute la Mofcovie n'eft prefque qu'une forêt continuelle, à la referve des lieux où on a mis le feu dans les bois pour les convertir en terre labourable. Tout le Païs eft fort peuplé de venaison & de gibier, de toute efpece qui y eft à fort bon marché, auffi bien que les oyes & les canards fauvages. Les élands & les fangliers y font en très-grand nombre. Les livres y font gris, mais en quelque Province feptentrionale ils deviennent blancs en hiver, comme en Livonie.

Les mêmes forêts nourriffent un grand

nombre d'ours, de loups,de loups cervier, de tigres, de renards, de martres & de zibelines, dont les peaux font le principal commerce du Païs, & il y a des années, dit Olearius, où les Moscovites en vendent aux Etrangers pour plus d'un million d'or, fans celles que l'on confome dans le Païs, ou que l'on donne au Grand Duc. Les plus precieufes fourrures, font les peaux de renard noir, de zibeline, de caftor, d'ours blanc, d'hermine & d'écureuil, qu'on appelle en France petit gris. Les Lacs, les Etangs & Rivieres nourriffent toute forte de poiffons, excepté des carpes. La pluspart des Auteurs parlent d'une certaine plante qu'on trouve vers le Royaume de Caffan, qui croît comme un gros concombre velu, & qui femble manger & faire fecher toutes les herbes qui font aux environs on rapporte même que les loups la dévorent avec avidité, parce qu'elle reffemble à un agneau; & pour ce fujet ils l'appellent Zoophite; c'eftà-dire, plante-animal ou petit agneau. Il y a en Mofcovie des Fleuves de cinq ou fix cens lieuës de cours, comme le Wolga & divers autres, ainfi qu'on le peut remarquer dans les Cartes. Les Lacs les plus renommez de la Moscovie

font Ladoga & Onega, qui confinent la Finlande. La Ville de Mofcou dans la Province de ce nom, eft la Capitale & le fiege de fa Majefté Czarienne, & la refidence ordinaire de ce Prince. Comme on indique par les Cartes les Etats de l'Empire de Mofcovie dans l'Europe, ainfi que ceux que cePrince poffede dans l'Afie, il fera aifé d'en faire la diftinction, & de remarquer la vafte étendue de cet Empire.

La plufpart des Auteurs ont traité les Mofcovites comme des gens incivils farouches groffiers & ignorans. Le peu de relation qu'ils ont eu avec les autres Peuples, n'a pas peu contribué à cette ignorance; & d'ailleurs n'ayant eu pendant long-tems, ni Colleges, ni Univerfitez, cela a donné lieu à leur impoliteffe. Mais fi les Grands Ducs, qui fuccederont à celui-ci, imitent fa conduite, en peu de temps on pourra voir ces Peuples fe polir, fe civilifer & s'inftruire par la frequentation des autres Peuples. La Couronne de Mofcovie eft hereditaire, & le pouvoir du Souverain fi defpotique, qu'il est le maî tre abfolu de la vie & des biens de fes Sujets, & les terres ne peuvent paffer du pere au fils fans fon agrément. Ce Prince entretient ordinairement un corps

de troupes de 120000 à 130000 hommes, parmi lefquels il y a 10000 Cofaques & 6000 Cullmiks, ou Calmuques, & en peu de temps il peut mettre fur pied une Armée de 300000 hommes chaque Province étant obligée de lui fournir un certain nombre de Soldats.

Les Mofcovites font d'une humeur fort fervile, & les plus grands Seigneurs, felon quelques Auteurs, fe faifoient au trefois un honneur de prendre le titre d'Esclave du Czar; mais le Czar regnant, a ordonné que dans tous les Etats, perfon ne ne fe diroit Efclave, mais feulement Sujet. Leur Langue a beaucoup de rapport à l'Esclavonne & à la Polonoife. La Langue Esclavonne eft la Langue primitive, dont celle de ces Peuples eft tirée. Ils ont emprunté des Grecs leur caractere, qu'ils ont pourtant fort alteré; &ils ont même tant de lettres doubles, que leur Alphabet a jufqu'à quarante lettres.

CHAPITRE II.

De la Religion des Mofcovites.

N ne fçait pas précisément le temps

Chriftianifme. Si on en croit leurs Hiftorres & leurs Annales; la Religion Chrétienne a pris fon commencement en Ruffie dès le temps des Apôtres, difant que S. André paffa de la Grece dans la Mofcovie, & que la Religion Chrétienne ayant enfuite été abolie par les Tartares, VVolodimir Grand Duc de Ruffie la rétablit en 989.

Ils fondent leur Religion fur les Livres du Vieux & Nouveau Teftament. Ils fe fervent de la Bible de la Verfion qu'on appelle des Septantes, qu'ils ont fait traduire en leur Langue. Ils donnent beaucoup de croyance aux explications de S. Cyrille Evêque de Jerufalem, & à celles de S. Jean Damafcene, de S. Gregoire de Nazianze & de S. Jean Chryfoftome, & à quelques autres.

Le Symbole de Saint Athanafe fert de regle à leur croyance. Ils croyent en Dieu le Pere, comme au Créateur de tout le monde, en Jesus-Christ, comme au Sauveur & Redempteur de tout le genre humain, & au Saint Efprit, comme à celui qui fanctifie tous les fideles. Ils ont auffi l'ufage des Sacremens. Les bonnes œuvres qu'ils croyent meritoires, eft de bâtir des Convens & des Eglifes, & de donner l'aumône.

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