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côté du Nord, lorfqu'on entre dans le paffage du Nord Oüeft. Ils ne labourent ni ne fement, leur Païs étant trop froid pour que les grains puiffent venir à maturité; ils n'ont point auffi de quoi nourric des beftiaux & ils vivent principalement de daims du poiffon fec & des navets, au lieu de pain: il y en a feulement quelques-uns qui demeurent fur les Frontieres d'Archangel, qui achetent quelques blez des Mofcovites, de qui ils ont appris à manger du pain.

Ils reconnoiffent la Domination du Czar; mais ils refufent d'embraffer le Chriftianifme, de la maniere fuperftitieufe dont les Mofcovites le leur reprefentent; & c'est par cette raifon, comme j'aurai occafion de le dire ciaprès, que plufieurs de ceux qui font immediatement fous la Domination du Czar, ne veulent pas recevoir la Religion Chrétienne. Je me fuis entreteny avec quelques-uns de ces Samoiedes ils m'ont dit qu'ils n'ont aucune forme de Religion établie parmi eux, ni d'ordre de Prêtrife; mais qu'ils ne fuivent d'autres regles que celles de leurs anciens qui ont bien vécu parmi eux; & que s'il arrive quelque different entre deux perfonnes, ils choififfent d'un com

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mun accord, de femblables anciens, au jugement defquels ils fe foûmettent. Ils croyent qu'il y a un Dieu qui gouverne le foleil & les étoiles, & à qui ils font redevables de leur fanté & de la longueur de leurs jours, s'il vivent jufte ment avec leurs prochains.

Le Pais eft fort abondant en daims, qui fe nourriffent d'une espece de mouffe qui eft fur la terre & fur les arbres dans les bois, de quoi ils s'engraiffent en hiver. C'eft une forte particuliere de daims, que la Nature femble avoir fait expiés pour un Païs fi froid, & qui font fort utiles aux natifs à plufieurs égards. Ils ne font guere plus hauts que nos bêtes fauves ordinaires; mais ils font plus de deux fois auffi gros, & ils ont des jambes d'une force proportionnée à leur corps, avec le fabot large, mince & plat; de forte qu'ils courent fur la neige gelée fans aucun obftacle & fans s'y

enfoncer.

Les Habitans s'en fervent au lieu de chevaux pour tirer leurs traîneaux en hiver; c'est pourquoi ils font ces traîneaux fort minces & legers, afin qu'ils puiffent courir par tout fur la neige. Mais les Mofcovites ne fçauroient, lorfqu'il y a beaucoup de neige, fortir du che,

min battu avec leurs traîneaux tirez par des chevaux, fans enfoncer dans la neige. Les natifs ont auffi dans l'occafion un morceau de planche long & épais attaché à leurs pieds, avec quoi ils courent fur la neige fans s'y enfoncer.

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Les daims leur fervent encore à fe couvrir auffi-bien qu'à fe nourrir. Leur peau eft une fourrure fort épaiffe & trèschaude; ils s'en habillent, & fe défendent ainfi des rigueurs de l'hiver. Leurs chemifes font faites de peaux de jeunes daims, qui font douces, & plus chaudes que la toile, lorfqu'elles font apprêtées. Leurs habits & leurs bonnets, qui font fourrez en dedans & dehors, font tout d'une piece, de maniere que leur col ne craint pas le froid; & it y a une piece qu'ils abattent dans le befoin fur leur vifage, avec des trous feulement pour les yeux & le nez. Leus bottes & leurs fouliers font pareillement d'une double fourrure, dont ils coufent les côtez de la chair l'un contre l'autre, pour mieux fe garantir du froid, qui dure chez eux neuf ou dix mois de l'année; & même les endroits les plus feptentrionaux font deux ou trois mois fans voir le Soleil. Ces gens-là néanmoins font allez contens de leur fort;

& plufieurs d'entr'eux qui ont été en Mofcovie, & qu'on a follicitez à y demeurer, aiment mieux retourner en leur Païs, & vivre & mourir où ils font nez. C'eft ainfi que Dieu a donné à chaque Nation d'être contente de fa deftinée.

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&

Dans le plus grand froid, ils demeurent dans des hutes fous terre, où un trés-petit feu fuffit pour les tenir chaudement. Ces hutes, qui font auffi en ufage parmi les Mofcovites, lorsqu'ils doivent paffer l'hiver, ou demeurer longtemps dans un endroit où il n'y a point de maison, se bâtiffent de cette manie re: Ils choififfent un terrain fec & élevé qu'ils creufent affez profondement ils en couvrent les côtez & le haut d'une espece de bois fendu, ou de pou tres, ou du premier bais qu'ils trouvent; & enfuite ils affermiffent les côtez & couvrent le haut de gazons affez épais, & y font des bancs & des places en dedans tout autour pour dormir, & allument un bon feu dans le milieu, dont la fumée fort par un trou qui est au haut de la hute.

Lorfque le feu qu'ils ont été obligé de faire est tout confumé, ils bouchent le trou ou le tuyau par où la fumée

paffe; de forte que la chaleur s'y conferve long-temps. C'eft de ces fortes de hutes que les Mofcovites font dans leurs Armées, lorfqu'ils n'ont que peu de temps à refter en un endroit; mais s'ils les font pour tout l'hiver, ou pour affez long-temps, ils ne font point alors de place dans le milieu pour faire du feu; mais ils font un four tout au bout, dans lequel ils apprêtent leur manger, & cuifent leur pain, & quand le four eft fermé & le tuyau bouché, la chaleur du four échauffe la hute jufqu'à tel degré qu'on le fouhaite ; & il ne faut que très-peu de bois, quoiqu'on ne le chauffe qu'une ou deux fois tout au au plus par jour. Ils font ordinairement aufli une anti-chambre, ou un appentis à l'entrée de ces hutes, pour rompre le froid, pour couper du bois, & pour ferrer diverfes chofes ; & s'ils arrivent dans un endroit, où la terre eft gelée, ils commencent par faire du feu deffus pour la degeler, à proportion de la grandeur dont ils veulent faire la hure.

Si ces Anglois, qui furent autrefois envoyez pour chercher un paffage par cet endroit à la Chine, & qui furpris de la gelée, furent obligez de paffer l'hiver à

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