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fubftance; laquelle s'unit à l'une des deux premieres, & force l'autre à s'en féparer.

C'est ainsi que fi, après avoir diffous quelques petites feuilles d'argent dans de l'Eau-forte, on met dans cette diffolution quelques petites feuilles de cuivre; l'eau-forte s'unit au Cuivre qu'elle diffout, & fe fépare de l'argent qui fe précipite au fond du verre. De-là, l'origine des Précipitations chymiques.

EXISTENCE DES AFFINITÉS CHYMIQUES.

88. OBSERVATION. On ne peut fe difpenfer de reconnoître dans la Nature, des Affinités particulieres, des Attractions Spéciales, entre certains corps; lefquelles ne paroiffent point découler des loix l'Impulfion & des loix de l'Attraction générale : les plus célebres Phyficiens, les plus grands Chymiftes, en ont connu & en ont fenti l'existence.

1°. Quelques-uns fe font bornés à regarder ces Affinités ou ces Attractions fpéciales, comme l'effet de tout autant de propriétés particulieres de la Matiere, dont on ne pouvoit rendre aucune raifon, finon que telle eft fa nature: ce qui eft ramener directement la Phyfique au regne des Qualités occultes; & attribuer à la Matiere, une intelligence, une action, une vertu, qui répugnent effentiellement à fa nature. (75 & 76).

II. Quelques autres ont tenté de rapporter ces phénomenes aux loix de l'Impulfion & de l'Attraction; & n'ont abouti qu'à en démontrer l'infuffifance.

L'Impulfion exifte dans la Nature : mais fon action ne peut rien avoir de commun avec une foule de phénomenes que nous préfente la Nature; comme nous le ferons voir bientôt.

L'Attraction générale, l'Attraction bornée à être toujours, relativement à tous les Corps fans diftinction, en raifon directe des maffes & en raifon in

verfe des quarrés des distances (84), joue le plus beau rôle dans le Ciel. Mais elle n'eft propre qu'à fe donner en fpectacle rifible fur la Terre: quand on veut lui attribuer des phénomenes où elle n'entre & ne peut entrer pour rien.

III°. Un plus grand nombre attribue les différens phénomenes d'Affinité, que l'on obferve dans la Nature vifible, à une Loi Spéciale d'attraction entre certaines efpeces de corps: Loi diftinguée & indépendante, du moins en partie, de l'Attraction générale en raifon directe des maffes & en raifon inverse des

quarrés des distances. Voici l'idée que l'on peut fe former en général, de cette Caufe ou de cette Loi. IDÉE DES ATTRACTIONS SPÉCIALES, OU des AFFINITES CHYMIQUES.

89. OBSERVATION. Selons le plus célebres Philofophes & les plus judicieux Naturalistes de nos jours, l'Auteur de la Nature, qui a établi l'ordre & l'état préfent des chofes, qui a voulu l'exiftence permanante de tels & tels phénomenes d'affinité, dans la Nature par lui créée, a décerné fans doute, au commencement des tems, que les Corps analogues, en contact ou fur le point du contact, auroient une Tendance fpéciale les uns vers les autres; & que cette Tendance feroit d'autant plus grande, que l'analogie & la contiguité de leurs élémens, feroient plus parfaites.

Ainfi, dans cette hypothefe, deux Elémens de matiere, s'attirent réciproquement fur le point du contact, ou adhérent plus ou moins fortement entre eux dans le cas de contiguité : non en vertu d'une force qui leur foit intrinfeque, non en vertu d'une impulfion qui les porte l'un vers l'autre, non en vertu de la Loi générale d'attraction qui affecte indifféremment tous les corps; mais en vertu d'une

ki

Volonté primitive du Créateur, qui a décerné que tels Corps plus ou moins analogues auroient telle tendance les uns vers les autres, uniquement au moment de leur contact, ou fur le point très-prochain de leur contact.

POSSIBILITÉ DES ATTRACTIONS SPÉCIALES.

90. HYPOTHESE. L'Auteur de la Nature, qui a établi une Loi d'attraction relative à la différence des dif tances, n'auroit-il pas pu établir une Loi d'attraction relative à la différence des élémens? (Fig. 4).

EXPLICATION. L'Auteur de la Nature, qui a décerné que l'élément M attireroit plus fortement l'élément N qui eft plus voifin, que l'élément A qui est plus éloigné; n'a-t-il pas pu décerner également qu'à une distance infiniment petite & fur le point du contact uniquement, le même élément M attirât plus puiffamment dans une proportion quelconque, l'élément N qui lui reffemble, que l'élément R qui ne lui reffemble pas ?

Il est évident que cette idée ne renferme rien d'impoffible: fuppofons-la réelle. De cette fuppofition, qui n'eft qu'une modification nouvelle de la Loi générale d'attraction, découlera l'explication d'une foule de phénomenes de la Nature, dont il paroît impoffible de rendre aucune autre raison.

I. Dans cette hypothefe, dont tout ce Paragraphe montrera les folides fondemens, la Loi d'attraction, toujours proportionelle aux maffes, fe réduiroit fimplement dans fes variations, à deux modifications différentes.

Elle agiroit en raison inverse des quarrés des diftances, relativement à tous les élémens quelconques de la Matiere foit dans le cas de contiguité, foit hors du cas de contiguité. C'est la Loi générale d'attraclion,

qui affecte univerfellement & indiftinctement tous les corps & toutes les diftances.

Elle agiroit, relativement à certains élémens plus analogues, feulement fur le point du contact ou dans le cas de contiguité, dans une autre proportion encore inconnue, mais propre à augmenter immenfement l'Attraction précédente à l'égard de ces élémens analogues, contigus ou prêts à être contigus. Ce feroit la Loi Spéciale d'autraction, reftreinte à certaines efpeces de corps analogues entre elles, dans le feul cas de la contiguité ou de l'infiniment petite distance.

II°. Dans cette même hypothefe, la Loi d'attraction, fe diviferoit comme en deux Loix differentes à raifon de fes différens effets, ou de fa différente maniere de s'exercer.

La premiere de ces deux Loix, ou la Loi générale d'attraction, eft indubitablement la Cause physique de la tendance des Corps quelconques vers certains centres communs; de la gravitation des Planetes & des Cometes vers le Soleil; de la gravitation des Satellites de Saturne ou de Jupiter vers leur Planete principale; de la gravitation de la Lune & des Corps terreftres vers le centre de la Terre. (1441).

La feconde de ces deux Loix, ou la Loi d'attraction fpeciale, pourroit être la Caufe physique de la tendance finguliere & frappante de certains élémens vers d'autres élémens analogues, uniquement dans le cas de contiguité ou d'une très-grande proximité.

Par exemple, je débouche une bouteille de biere; & à l'inftant cette liqueur s'élance en torrent écumeux hors de la bouteille, contre l'exigence de fa gravitation naturelle. D'où peut venir ce phénomene, finon d'une Attraction fpéciale & très-marquée entre les molécules de l'air & certaines molécules de cette liqueur, au moment où ces deux efpeces analogues & fympatifantes deviennent contiguës,

& peuvent s'attirer en liberté? On verra par la fuite de ce Paragraphe, qu'envain on chercheroit à affigner quelqu'autre caufe à ce phénomene, ou à mille autres phénomenes femblables.

III. Pour fimplifier les chofes : nous regarderons la Loi d'Affinité, comme une Loi à part; comme une Loi en tout diftinguée de la Loi générale d'attraction, avec laquelle elle n'a en effet rien de commun. CAUSE EFFICIENTE DES ATTRACTIONS SPÉCIALES, OU DES AFFINITÉS CHYMIQUES.

91. OBSERVATION. En fuppofant réelle la Loi d'Attraction fpéciale dont nous venons de donner une idée: la Tendance particuliere qu'ont certains Corps analogues les uns vers les autres, a pour caufe efficiente, l'action de l'Etre créateur; qui, en conféquence de la Loi par lui portée & de l'Ordre de chofes par lui établi, imprime ce mouvement aux Corps analogues à l'occafion de leur co-existence, de leur analogie, de leur contiguité ou de leur très-grande proximité, Ainfi, pour donner des définitions fimples & lumineufes fur tous ces objets:

1o. Cette Tendance particuliere qu'ont entre eux certains élémens infiniment peu éloignés les uns des autres, eft un mouvement qui leur eft imprimé par l'être créateur, feule caufe efficiente de tout mouvement dans la Nature, (76).

II. Ce Mouvement a pour caufe occafionnelle conféquemment à la Volonté primitive & toujours fubfiftante de PÊtre créateur, la Co-existence & la très-grande Proximité des élémens qui forment ces Corps plus ou moins analogues.

Quand la proximité s'eft convertie en contiguité : la Tendance réciproque fubfifte & produit une adhé fion ou une réfiftance à la féparation. Plus l'analogie & la contiguité font parfaites: plus eft grande

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