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la maffe du Sel à dijoudre, fans ceffe dépouillée du fel qu'elle attire, & fans ceffe rendue à fon avidité pour le fel qu'elle touche, continue donc à divifer & à abforber les molécules de ce fel : jufqu'à ce que toute la masse d'eau en foit pleinement faturée. C. Q. F. D.

106. REMARQUE I. Quand l'eau a attiré & abforbé précisément la quantité de fel qu'elle appete, & qu'elle a épuifé à cet égard toute fa force attrac tive; le Sel fuperflu refte en maffe au fond du vaiffeau, & ne s'y diffout plus : à moins qu'on n'y mette une nouvelle quantité d'eau, qui foit fuffifante pour en achever la diffolution.

Le Sel ne change point de nature, en fe diffolvant dans l'eau: chacune de fes molécules, unie à une ou à plufieurs molécules d'eau, conferve la même nature de fel qu'elle avoit dans la maffe totale. Le Sel eft donc divifé par cette opération, fans étre décompofé: il effuye la plus grande divifion poffible dans fes Parties intégrantes: il n'en effuye aucune dans les Parties conftituantes.

107. REMARQUE II. L'Eau faturée de fel, & féparée du fel fuperflu qu'elle n'a pu diffoudre, tient adhérant à fes molécules, tout le fel dont elle s'est chargée.

Mais cette eau vient-elle à s'évaporer? A mesure que la quantité d'eau diminue, le Sel dont étoit faturée la partie qui s'évapore, fe criftallife & fe précipite fucceffivement au fond du Vaiffeau, en petites maffes femblables & régulieres ; & quand l'évaporation eft entiérement achevée, on trouve au fond du vaiffeau où l'eau étoit contenue, entaffé en Cristaux femblables & réguliers, tout le fel qu'elle tenoit en diffolution.

108. REMARQUE III. L'eau fait de même la fonċ

tion de Dujolvant, à l'égard d'un grand nombre d'au tres corps: c'est-à-dire, qu'elle les pénetre, qu'elle en écarte & en fépare les parties intégrantes, que fouvent-elle en rompt le noeud & l'union.

C'eft ainfi qu'elle divife les terres, les fels & les fucs des plantes: elle fe charge de leurs particules divifées ; & elle les tient féparées, tant qu'elle a une force fuffifante, pour empêcher qu'elles ne fe rejoignent.

Cette propriété de l'Eau, que l'action de l'air & du feu peut aider & augmenter confidérablement en mille & mille circonftances, a fouvent pour cause principale & fondamentale, l'affinité ou l'attraction qui fe trouve entre l'eau & les fubftances qu'elle pénetre. Attirée par ces fubftances, & attirant ces fubftances à fon tour, on conçoit facilement comment elle s'infinue entre leurs parties élémentaires, quand elle n'eft pas arrêtée par une force fupérieure: comment elle tient ces parties élémentaires en diffolution, tant que fa force attractive n'eft pas furchargée & épuisée.

109. REMARQUE IV. C'eft à cette vertu attractive & diffolvante, que l'Eau doit l'avantage ou le défavantage de n'être prefque jamais pure; & de tenir prefque toujours en diffolution, quelques fubftances étrangeres à fa nature.

1°. En paffant fur des maffes de fel, répandues dans le fein de la Terre; l'eau les diffout fucceffivement, fe charge de leurs molécules; & forme des Sources falées.

II°. En coulant fur la furface & dans l'intérieur de la Terre; l'eau y détache & y faifit des particules terreufes, gypfeufes, féléniteufes; & forme des Eaux dures, ou des Eaux crues.

III. En fe filtrant à travers des fubftances miné

rales de différente efpece; l'eau en détache une quantité plus ou moins grande de particules gafeufes, fulphureufes, falines, métalliques, qu'elle tient en diffolution; & forme des Sources minérales, qui ont différentes vertus, felon la différence des Principes hétérogenes qu'elles contiennent.

AUTRES ESPECES DE DISSOLUTIONS.

110. ASSERTION. Les autres efpeces de Diffolutions, ainfi que la diffolution des Sels, paroiffent refulter uniquement de la Loi d'affinité, ou de l'Attraction spéciale qui exifte entre les Parties intégrantes des Corps qui fe diffolvent réciproquement.

Cette Affertion va être établie & démontrée par la fimple explication de quelques Expériences fenfibles & décifives, dont les phénomenes partent toujours de la même Caufe différemment modifiée; favoir, de la Loi d'affinité.

III. EXPÉRIENCE I. Dans un Verre à boire, mettez une très-petite monnoie de cuivre; & verfez dans ce verre environ une once d'Eau-forte, laquelle n'eft autre chofe que l'Acide du nitre, féparé de fon Alkali.

EFFETS. I fe fait à l'inftant dans ce Verre, une effervefence & un bouillonnement fentibles. La Liqueur s'infinue, avec violence, dans les pores du cuivre, en divife & en exalte les parties. Elle s'échauffe & s'éleve en vapeurs verdâtres; & enfin, toute la piece de monnoie a disparu, & fes molécules divifées fe trouvent en diffolution dans la maffe d'eau-forte, qu'elles colorent.

L'Eau-forte opere à peu près les mêmes effets de diffolution, fur le fer, fur le plomb, fur tous les métaux; à l'exception de l'Or & de la Platine, qu'elle n'attaque point.

Si, avec la monnoie de cuivre, on met dans le

verre dont on vient de parler, une petite piece d'or: tandis que le cuivre fe diffout, l'or n'eft point attaqué par le Diffolvant, qui eft ici l'eau-forte.

112. EXPLICATION. Les parties élémentaires de l'Eau-forte, que l'on peut regarder comme autant de petits tranchans fort aigus, fe portent & s'infinuent avec une violente impétuofité, dans les pores du Cuivre: les molécules du cuivre fe détachent fucceffivement de leur maffe, avec une femblable impétuofité, pour s'unir aux molécules de la Liqueur qui les touche, les affiege, les cerne, les abforbe.

I. A quelle Caufe attribuer cette action impétueufe, qui défunit des parties fi adhérentes; fi ce n'eft à l'Attraction spéciale qui exifte entre les élémens du Cuivre & les élémens de l'Acide nitreux : attraction qui emporte avec violence les uns vers les autres, ces Elémens analogues; & qui, par leur choc mutuel, fait naître une affez forte chaleur dans ces deux fubftances ainfi combinées?

II°. Aucune autre Cause ne peut rendre raifon de ces phénomenes: comme il feroit aifé de le faire voir & fentir, en montrant & en développant encore l'infuffifance de la Matiere tourbillonnante, de l'Attraction générale, de l'action de l'air, de l'action de la chaleur qui eft ici effet plutôt que caufe. Il paroît donc que la Caufe que nous affignons à ces phénomenes, en eft la vraie caufe phyfique. C. Q. F. D.

113. EXPÉRIENCE II. Dans un autre Verre à boire, mettez ou une petite piece ou quelques petites feuilles d'Or; & verfez dans ce verre, environ une demionce d'Eau régale, qui est un mélange d'Acide nitreux & d'Acide marin.

EFFETS. Les molécules de l'Eau régale, comme tout autant de petits tranchans, s'infinuent avec violence à travers les pores de l'Or; en divifent les par

ties

ties intégrantes, fe combinent avec elles, & les tiene nent en diffolution dans leur maffe liquide.

114. EXPLICATION. La Diffolution de l'Or par l'eau régale, ne peut réfulter que d'une Attraction Spéciale entre les élémens de l'or & les élémens de l'eau régale.

Toutes les autres caufes étant inadmiffibles dans ce phénomene; ainfi que dans tous les autres phénomenes des diffolutions : il est très vraisemblable que celle que nous lui affignons, en eft la vraie cause phyfique.

115. REMARQUE. Mais pourquoi l'Eau-forte, qui feule diffout l'argent, feule ne diffout-elle pas auffi Por? Pourquoi enfuite l'Eau régale, qui diffout l'or, ne diffout-elle pas l'argent? Quel changement peut opérer, relativement à ce double phénomene, le mé lange de l'Acide nitreux avec l'Acide marin?

116. EXPLICATION I. Quelques Phyficiens, pour, rendre raison de ce double phénomene, ont recours, à une diverfité de pores dans ces deux Métaux: pores acceffibles aux molécules de l'eau-forte dans l'argent, inacceffibles aux mêmes molécules de l'eau-forte dans l'or: pores enfuite acceffibles aux molécules de l'eau régale dans l'or, inacceffibles aux mêmes molécules de l'eau régale dans l'argent, Mauvaise explication à toute forte d'égards! Car,

1o. En fuppofant réelle cette différence de pores: conçoit-on comment les pores de l'Or, inacceffibles aux molécules de l'Acide nitreux, deviendront acceffibles aux mêmes molécules de l'Acide nitreux; quand ces molécules feront unies & combinées avec d'autres molécules qui ne les dénatureront point?

C'eft dire, ce mé femble, qu'une épée nue ne peut pas pénétrer dans une ouverture donnée; mais que cette même épée y pourra pénétrer, étant unie avec Tome I.

I

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