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point de vue ; que de former heureusement la Chaîne générale des Principes & des Conféquences, qui doit conduire un Amateur de la Phyfique, dans l'interminable Dédale de tout ce que l'oeil découvre & de tout ce que l'efprit conçoit de Subftances matérielles, dans l'immenfe Univers!

La Matiere eft en prife & aux Spéculations métaphyfiques, qui ne dépendent que du témoignage des Idées; & aux Obfervations phyfiques, qui dépendent du témoignage des Sens.

Nous l'avons confidérée fous le premier rapport, à la fin de notre Métaphyfique : il nous refte à l'examiner fous ce fecond rapport, infiniment plus riche & plus intéreffant que le précédent, dans ce commencement de notre Phyfique.

NOTIONS

PRELIMINAIRES.

1. DÉFINITION I. La Phyfique eft la fcience des Corps ; c'est-à-dire, de toutes les Subftances fenfibles qui forment la Nature vifible: comme nous venons de l'expliquer dans la Préface de cet Ouvrage.

1°. J'entends par Matiere, toutes les Subftances fenfibles qui forment les Corps, qui forment cet immenfe Univers: quelle que foit leur nature, leur figure, leur grandeur ou leur petiteffe.

II. J'entends par Subftances fenfibles, toutes les fubftances qui, par leur réunion en une plus ou moins grande maffe, en un plus ou moins grand volume, font capables d'affe&ter en quelque maniere que ce foit, quelqu'un de nos Sens; ou de lui occafionner un ébranlement organique quelconque, qui puiffe donner lieu à notre Ame, d'en fentir l'existence ou d'en connoître la nature.

III°. L'idée de Maticre, l'idée de Subftances fenfibles, l'idée de Corps en général, en faifant abftraction & de leurs efpeces & de leurs maffes, font trois

idées qui n'ont pour le fonds qu'un même objet. On peut cependant mettre une diftinction quelconque, entre l'idée de Matiere, qui est toujours abftraite & indéterminée, qui ne renferme & n'exclud aucune union ou défunion dans les fubftances matérielles qui font fon objet; & l'idée de Corps, qui renferme toujours dans fon objet, une réunion d'un nombre plus ou moins grand de fubftances matérielles en un même tout.

2. DÉFINITION II. J'appelle nature de la Matiere, les différentes propriétés qui lui font par-tout inhérentes, qui la diftinguent de tout ce qui n'eft pas matiere, qui la caractérifent & la fpécifient dans fon état naturel: fans examiner quelles autres proprié tés elle pourroit avoir, ou dans un autre ordre de chofes, ou dans un état miraculeux, dont je fais ici pleinement & abfolument abftraction.

3. DÉFINITION III. J'appelle nature des Corps, les différentes propriétés caractéristiques, qui les diftinguent dans leurs cfpeces; qui font qu'une efpece n'eft pas l'autre, & qu'elle differe de l'autre & dans fes principes & dans fes effets.

Les propriétés caractéristiques du Marbre, qui font que cette matiere differe de toute autre matiere, par exemple, du bois, de l'argille, de l'air, du feu, de l'eau, du foufre, de l'or; c'eft ce que je nomme nature de Marbre.

De même, les propriétés caractéristiques de l'Air, qui font que cette matiere, diftinguée de toute autre matiere, n'eft ni l'eau, ni la terre, ni le feu, ni un minéral, ni un végétal; c'est ce que je nomme nature de l'Air ; & ainfi du refte.

4. DÉFINITION IV. On donne le nom d'Atomes, ou d'Elémens primitifs, ou de Molécules élémen

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taires, aux plus petites parties où un Corps puiffe être réduit par la décompofition.

Par exemple, fi je mets fur mon feu, une Bûche de chêne ou de fayard: cette bûche fe décompose & fe réfout en particules de feu, en particules d'air, en particules de terre, en particules de divers fels fixes, en particules de vapeurs aqueufes, huileuses, fulphureufes, gafeufes; & ainfi du reste.

Ces particules, en les fuppofant réduites à leur derniere divifion naturelle, font les élémens ou les molécules ou les atomes de cette bûche. Leibnitz donne à ces mêmes êtres, le nom de Monades. (*).

5.

DEFINITION V. On appelle Corps, un affemblage plus ou moins confidérable de ces Elémens primitifs. L'idée d'un Corps, exprime donc néceffairement une multiplicité d'élémens réunis en un même tout.

La bûche dont je viens de parler, est un corps: l'eau contenue dans un verre, eft un corps: un grain de fable, à peine fenfible, eft un corps: le faifceau

(*) ETYMOLOGIE. Pour mieux faire fentir l'idée exacte & precife que la Phyfique attache à ces différentes dénominations, nous allons en préfenter ici l'étymologie; c'eftà-dire, la fource & l'origine grammaticale.

1. Elémens: Principes primitifs d'où réfultent les Corps. Primigenia partes, feu principia, ex quibus conflatur Corpus quodlibet.

:

II°. Molécules très- petites maffes. Diminutif de moles; parvula moles; molecula

III. Atomes: particules infécables, indivifibles. Molecula infecabilis, aut quæ confideratur ut non ultrà fecabilis. D'arouos. indivifibilis, non fecabilis.

IV. Monade: être feul & unique, être fans aucune compofition de parties. Ens unicum & folitarium ; ens omnem à se compofitionem excludens. De povos, folus.

Le terme de Monade a été employé & confacré par Leibnitz, pour exprimer l'unicité & la fimplicité de chaque Etre priimordial, matériel ou immatériel. (50).

de lumiere, qui de ma prunelle paffe dans ma rétine,

eft un corps.

Un feul & indivifible élément d'air, ou d'eau, ou marbre, ou de terre, s'il exiftoit de tels élémens ifolés, feroit matiere, & ne feroit pas un corps.

6. DÉFINITION VI. On divife les Corps, en corps fimples & en corps mixtes.

Io. On appele Corps fimples, ceux dont les élémens feroient tous de même efpece ou de même nature.

II°. On nomme Corps mixtes, ceux dont les élémens font de différente efpece, ou de différente na

ture.

Si les élémens de l'Or, étoient tous de même nature; en telle forte que chaque élément reffemblât parfaitement à chaque autre élément & par fa maffe & par fa configuration: l'Or feroit un corps fimple.

Un Arbre, compofé de particules ignées, aériennes, falines, huileufes, aqueufes, terreuses, toutes diffemblables entre elles, eft un corps mixte.

7. DÉFINITION VII. Les Subftances qui forment les divers Mixtes, peuvent être envisagées fous deux points de vue différens; favoir, ou comme en étant les Parties conftituantes, ou comme en étant les Parties intégrantes.

I°. Dans un Mixte, on nomme Parties conftituantes, celles qui par leur union & leur combinaison, déterminent fa nature & fon efpece.

II°. Dans ce même Mixte, on nomme Parties inté grantes, celles qui, déterminées dans leur nature, dé terminent fa maffe & fa quantité.

Un morceau de Bois, eft déterminé à être bois plutôt que pierre, par tel mélange de parties terreufes, falines, aqueufes, huileufes, ignées, aériennes, qui font fes parties conftituantes..

Ce même morceau de Bois, eft déterminé à avoi

une maffe d'une livre, ou d'une once, par le nombre de fes parties intégrantes, dont chacune a la nature & la qualité de bois.

7. II°. REMARQUE. Pour répandre un plus grand jour fur ce qui concerne les Parties conftituantes & les Parties intégrantes d'un même Mixte quelconque ; nous allons en préfenter encore ici l'Idée diftinctive, fous des points de vue les plus propres à la bien caractériser.

1°. Les Parties conflituantes d'un Mixte, font des élémens de différente nature, qui par leur union & leur combinaifon, conftituent réellement un mélange, un corps mixte; & deviennent la fource & le principe de fes différentes propriétés.

Par exemple, le Sel commun a pour parties conftituantes, l'Acide marin & l'Alkali marin, qui déterminent fon être & fa nature. Comme cet Acide & cet Alkali, unis & combinés enfemble, font les conftitutifs intrinfeques du Sel commun; il eft clair qu'on ne peut défunir & féparer ces deux principes, fans détruire la nature de ce fel: enforte qu'après cette féparation, ce ne fera plus le 'Sel commun qui exiftera, mais feulement l'Acide & l'Alkali de ce même fel; qui font deux chofes fort différentes entre elles, & fort différentes du fel qu'elles formoient par leur combinaison.

II. les Parties intégrantes d'un Mixte, font les plus petites portions que l'on puiffe extraire de ce mixte, fans le dénaturer. Les parties conftituantes different -entre elles, & different du mixte qu'elles forment. Les parties intégrantes ne different abfolument en rien entre elles; & ne different non plus en rien, quant à -leur nature & à leurs principes, du Corps même dans la maffe duquel elles entrent.

Si on divife une maffe de Sel commun, en molécu

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