n. 64. AN.1434. beaucoup de menées secretes pour groffir son parti: if entretint plusieurs fois les députez du concile de fon Voyez plus haut dessein, & ceux-ci lui promirent de le seconder. Sur cette assurance Maynard tenta l'entreprise, dont il ne voulut pas néanmoins se déclarer chef, parce que connoissant qu'il y avoit en Bohême des maisons plus anciennes que celle dont il étoit forti, il apprehenda de leur donner de la jalousie. Il y avoit un gentilhomme nommé Wissembourg issu de la meilleure de ces maifons, mais très-pauvre; Maynard l'avoit assisté pendant plusieurs années, ce qui l'avoit rendu fort soumis; & comme il n'avoit point d'autre talent pour la guerre, que celui d'obéir exactement; il jetta les yeux fur lui, & lui donna le titre de genéral, pendant qu'il en reNaucler. gener. tint l'autorité. Maynard ayant pris toutes ces mesures, engagea la ville de Pilsen à commencer la révolte. Les Thaborites & les Orphelins se mirent aussi-tôt en cam 48. P. 4520 CIL. deux villes de Prague. pagne pour la recouvrer; Procope le grand avec un auDivifion entre tre surnommé le petit Procope en formerent le siege les gouverneurs après la jonction de leurs troupes. Mais ils furent interrompus dans la plus grande ardeur du siege, par la querelle qui s'éleva entre Roquesane qui commandoit dans l'ancienne Prague pour les Thaborites & Loup dans la nouvelle pour les Orphelins; cette querelle causée par la jalousie, alla si avant que les deux villes de Prague se cantonnerent l'une contre l'autre, Maynard averti de ce desordre, ne manqua pas d'en profiter. Il s'avança vers l'ancienne Prague, battit les Thaborites déja fort pressez par les Orphelins, & se ques fe rendent rendit maître de la ville. Cette nouvelle déconcerta les Procopes, qui leverent aussi-tôt le siege de Pilsen, & ce qui acheva de les accabler, fut d'apprendre que Maynard en même tems avoit pris d'assaut la nouvelle Prague, CIIL. Les Catholi maîtres des deux Pragues. CIV. Les Bohémiens taille, & les Prague. Ils voulurent la recouvrer avant que les Ca- AN. 1434. tholiques euffent achevé de s'y fortifier. On leur parla de paix ; mais ils répondirent qu'ils ne pouvoient traiter avec honneur, jusqu'à ce que les Catholiques leur eussent rendu Prague, & tiré de Pilfen les hommes & les munitions qu'ils venoient d'y jetter. Ces deux conditions parurent si ridicules aux Catholiques, qu'ils demanderent d'être menez à l'heure même contre les Hussites, & Maynard profitant de leur ardeur poursuivit l'armée Huflite, qui s'étoit retranchée dans son camp: on força ses retranchemens, la confufion fe-mit parmi les foldats, le combat dura plus de quatre heures, & le grand Procope y fit des efforts si extraordinaires que les Catholiques se virent plus d'une fois sur Je point de perdre la victoire; mais un coup de lance le renversa mort, & fit perdre courage à son armée. Le petit Procope eut aussi la tête fendue d'un coup de fa- P. Labbe. bre, ce qui obligea son Lieutenant Coapchon de se retirer dans la ville de Colnitz, avec ce qui lui restoit de Cavalerie Hufsite. Cette victoire fut remportée le dimanche dans l'octave du saint Sacrement: & on la fit sçavoir au concile, à Sigifmond & aux autres fideles, parce qu'elle les interessoit tous. Maynard flaté par ces premiers avantages, au lieu de s'amufer à poursuivre les fuyards, acheva de se rendre maître du camp ennemi, & contraignit tous ceux qui restoient de se rendre à discretion. L'armée victorieuse s'assembla pour déliberer sur ce qu'on en feroit; & comme on étoit prêt à les renvoyer la vie fauve, Maynard remontra que la clémence étoit hors de saifon; que la plupart des vaincus étoient nez dans l'armée Hussite, qu'ils ne sçavoient point d'autre métier que la guerre; qu'il s'en falloit donc absolument dé Tome XXII, perdent la ba deux Procopes font tuez. Nancier. gener. 108. & feq. 48.453. In append. I. conc. Bafil. art. tom. XII. concil. : • AN. 1434. taire, puisque rien n'étoit si dangereux pour la monar chie de Bohéme, que de laisser vivre tant de soldats aguerris; & qu'on ne seroit jamais en sureté, tant qu'on donneroit retraite à plus de vingt mille hommes accoutumez à tuer, à voler & à piller en toutes occasions: que si on les laissoit vivre ensemble, ils éliroient un chef, & renouvelleroient la guerre ; & fi on les distribuoit dans les villes & dans les villages, ils y corromproient la bourgeoisie & les paysans. Ces remontrances changerent l'inclination des Catholiques, & les porterent à consentir que l'infanterie Hussite fût exterminée; mais ils en laisserent le soin à Maynard qui s'en acquitta avec beaucoup de difcernement. CV. Artifices dont on se sert pour des Huffires. Il sçavoit qu'il y avoit parmi les vaincus un assez grand nombre qui ne s'étoient engagez à suivre l'armée achever la ruine Huffite, que par le seul motif de porter les armes, & ceux-là, il les regarda comme innocens, & fe fit un scrupule de les confondre avec les coupables. Mais il ne vouloit pas que l'on s'apperçut de son dessein; & pour cet effet, voici l'artifice dont il usa. Il fit publier dans un quartier du camp où l'on tenoit renfermez les fantassins Hussites; que la guerre n'étoit pas finie; que Coapchon s'étoit renfermé dans Colnitz avec toute la cavalerie, & qu'il y prétendoit rétablir l'armée; que l'unique moyen de prévenir ses desseins étoit de l'inveftir incessamment; mais qu'on ne pouvoit ni entreprendreni exécuter ce projet sans l'assistance de tant de braves soldats qui s'étoient rendus si experimentez sous la discipline de Zisca; que les états du royaume vouloient affigner une pension à chacun d'eux sur les deniers publics, pour leur marquer l'estime honorable qu'ils en faifoient, & pour empêcher qu'il ne se glifssat, parmi eux ce qu'on appelle passe-volans, on prioit les vrais foldats de passer tous dans les granges voisines, & ceux AN. 1434. qui ne l'étoient point, de retourner dans leurs maifons. Les soldats Hussites furent assez crédules pour s'imaginer qu'on vouloit se servir d'eux pour ruiner Coapchon, mais ce n'étoit pas là le dessein de Maynard. Ils fe séparerent donc des soldats inutiles, en se retirant dans les granges qu'on leur avoit montrées. Ils y trouverent une grande abondance de viandes & de vin qu'on leur avoit préparé, & s'en remplirent. Quand on les vit plongez dans un profond sommeil, l'armée Catholique investit les granges au milieu de la nuit, de peur que quelqu'un n'échapat, & y mit le feu. Comme les murailles n'étoient presque que de bois, & les couvertures que de chaume elles furent bientôt embrasées. Ainsi perit l'armée que Zisca avoit formée & aguerrie, & qui avoit ravagé durant vingt ans les plus riches provinces du septentrion. Ces soldats étoient presque tous grands & extrêmement robustes; ils étoient tellement endurcis au travail & aux injures du tems, que rien n'étoit capable d'alterer leur temperamment. Leur peau étoit devenue si dure qu'il sembloit qu'en un besoin elle eût pu servir de cuirasse: on ne pouvoit les voir fans une certaine frayeur; car outre qu'ils étoient très-basannez, & qu'ils n'avoient pour habits que des peaux de bêtes féroces, ils négligeoient de se peigner, & laissoient croître leur barbe d'une maniere indécente, & qui inspiroit la terreur. L'empereur Sigifmond étoit alors à Ulm. Dès qu'il eut appris ces nouvelles, il en écrivit au concile, & envoya ses ambassadeurs en Bohême, afin qu'ils travaillassent à l'y faire reconnoître roi, comme légitime heritier de son frere Venceslas. Pendant ce tems là les CVI. Ils font tous brûlez dans dos granges. AN.1434. députez du concile à Bohême, se trouvant débarrassez de l'armée Hussite plutôt qu'ils ne pensoient, & délivrez par là du grand obstacle de la réconciliation de la Bohême avec l'église Catholique, ils y travaillerent avec ardeur, & la conclurent en peu de semaines, à la fatisfaction des peres du concile. CVII. Députation du tisbonne. Æn. Sylv. hist. Bohem. c. 51. Krantz. II. Wendel. 32. Huffit. lib. 8. Les Bohémiens vinrent aussi en grand nombre trouconcile à l'af ver Sigifmond à Ratifbonne où il étoit allé, & le fafemblée de Ra- luerent comme leur roi. Coapchon & Rocksyzanes ne les accompagnerent point, mais ils y vinrent en particulier pour leurs propres affaires. Le concile y envoya de même ceux qu'il avoit députez à Bohême. Cochlée, hist. L'empereur témoigna aux uns & aux autres la joie qu'il ressentoit de l'union qu'ils venoient de faire, & recommanda aux Bohémiens d'exécuter avec fidelité les articles de la convention qu'ils avoient jurée. Sponde appuyé sur des actes manuscrits du college de Navarre dit qu'il y eut en présence de l'empereur une dispute affez vive au sujet de la communion sous les deux especes entre les députez du concile; & plusieurs Bohémiens qui n'avoient point confenti à l'union qui venoit d'être faite avec les autres. Ces obstinez vouloient qu'on contraignît les Catholiques de Bohême à communier ainfi, quoiqu'ils ne le demandassent pas: mais l'empereur & les députez le refuserentabsolument; ils ne leur permirent pas non plus d'entrer dans l'église avec les Catholiques; & l'un d'eux étant mort à Ratisbonne, on lui refusa la sépulture ecclesiastique. On trouve dans les mêmes actes que l'empereur se plaignit aux députez du concile du mépris de celui-ci à son égard sur beaucoup d'articles, entre autres, d'avoir écrit pendant qu'il étoit en Italie, au duc de Milan pour le recouvrement du patrimoine de CVIII. Plaintes T'empereur de la conduite du concile. , ۱ ! : |