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font des chofes nouvelles que je vous donne, & que je n'ufe point de redires: mais je veux dire qu'elles compofent un même genre d'Ouvrages de penfées détachées, férieufes, enjouées; fans aucune tranfition, entrelaffées de traits. d'Hiftoire finguliers, de petits ouvrages légers, de poëfie badine, galante, morale; que fçais-je moi? Je ne puis vous définir mon Livre dans la derniere précifion; & ce qui fait fon mérite, c'eft peut-être en ce qu'il eft d'une nature à ne pouvoir bien être défini, parce qu'il a fa fource dans une grande variété. Ce que je dis-là pourroit bien être un peu obfcur; regardez-le comme une petite enigme, dont je veux vous amufer au commencement de ce fecond volume.

Ne croyez pas que le petit Factum qui commence à la page 97. foit un jeu d'efprit: ce Procès a été jugé en faveur du Chirurgien, au rapport de M. Benoit, Confeiller au Châtelet, 25: Juin 2372.

le

L'ART

D'ORNER L'ESPRIT

EN L'A MUSAN T.

N Seigneur paffant par un
Village, rencontra un jeu-
ne fou veux-tu être mon
fou, lui dit-il je fuis le
fou de mon pere, répondit

le bouffon, parce qu'il m'a fait ; fi vous
voulez en avoir un, allez le faire: je
fuis trop fage, répondit ce Seigneur
pour faire un fou. Hé bien, dit le
bouffon, fi votre femme eft un peu
complaifante, je vous en ferai un, qui
fera à vous, parce que je vous ferai pré-
fent de la moitié, qui fera à moi, dans
l'enfant. J'ai vû,dit ce Seigneur,bien des
gens de bon fens, qui ne répondent pas
si juste que ce fou-là.

Un homme d'efprit a fait un fecond choix parmi des Epigrammes, qui avoient déjà été choifies. Voici fon Recueil.

Figuier dont le fruit fait grand plaifir.

Le pauvre Jean ayant l'ame éperduë De voir le défefpoir & le fâcheux deftin III Partie.

A

Epigramme.

M. de la Monnoye.

De fa Perrete qu'un matin

Au figuier de fa cour il rencontra penduë,
Difoit à fon voifin qu'il couperoit au pied,
Et qu'il mettroit au feu cet arbre, ou sa moi-

tié

Par grand malheur avoit perdu la vie :
Mais le voifin mal fatisfait

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De ce que la femme avoit fait,
Croyant qu'il lui prendroit envie
De fe pendre ainfi quelque jour,
S'il pouvoit avoir dans fa cour
Un tel figuier, tint ce langage:
Je ne puis le diffimuler,
Mon cher voifin, c'eft grand dommage:
Donne-m'en quelque greffe, avant de le brûler.

Sur un baifer.

La Foire étant finie, Anne s'en retournant Fit rencontre en chemin d'un drôle affez galant,

Qui fçachant fon Village

Lui dit, connoiffez-vous la fille au grand Ba-
ftien ?

Oui, dit-elle, Monfieur, je la connoiffons bien,
Elle eft de notre voifinage :

Je vous crois, reprit-il, fille de bonne foi;
Donnez-lui ce baiser paffant devant fa porte;
Non, dit-elle, Monfieur, que mon âne lui
porte,

Il y fera plûtôt que moi.

Abbé peu dévót.

A midi fonné réglement

L'Abbé Côme alloit à la Meffe,
De l'avertir à ce moment

Trois Valets avoient charge expreffe ;
Avint cependant que tous trois
Ils y manquerent une fois

Le propre jour de Pentecôte:
Sur ce, grand bruit entr'eux s'émut;
Ah! dit Côme, excufant leur faute,
Paix, j'irai ce foir au Salut.

Joueur, de niveau avec un Mendiant.

Un petit Maître après mauvaise chance
Sortoit du jeu la tabatiere en main,
Un Gueux paffoit qui vint à lui foudain,
Lui demandant l'aumône avec inftance:
Des deux côtez grande étoit l'indigence;
Il ne me refte, ami, dit le Joueur,
Que du tabac, en veux-tu? ferviteur,
Répond le Gueux qui n'étoit pas trop nice;
Nul befoin n'ai déternuer, Seigneur,
Chacun me dit affez, Dieu vous benisse.

Contre un Médecin.

Muni de tous fes Sacremens,
Le Médecin Monfieur Desbarges,
Attend la mort à tous momens,
Et les Crieurs d'enterremens

Parlent tous de vendre leurs Charges.

Sur la mort d'un autre Médecin.

Il a rendu fon ame à Dieu,
Le Médecin Monfieur Mathieu
Qui rendoit la Ville déferte:
La mort fait une grande perte.

Définition de la fortune.

La fortune n'a rien qui puiffe me tenter; A fes fauffes grandeurs je ne veux point prétendre,

Il faut mille degrés pour qui veut y monter,
Il n'en faut qu'un pour en defcendre.

Mauvais débiteur.

Paul qui vient de mourir faifoit groffe figure:
De mille Créanciers que le bon-homme avoit,
Il n'a payé ce qu'il devoit
Qu'à la nature.

La confcience parle.

Ma justice eft irréprochable;
L'innocent comme le coupable,
Tout le juge à mon Tribunal:
Je fuis témoin, juge & partie,
Et bourreau cruel, je chatie
Un mortel qui fe livre au mal.

Bon confeil donné à un mauvais
Auteur.

De par le Roi, Criton à fait défendre
Qu'autre que lui n'expofe fon écrit ;
Il peut lui feul le débiter, le vendre,
En quoi fans doute il montre fon crédit.
Or fçavez-vous ce qu'il faudroit que fit
Le vieux rimeur? en voici la recette :
Criton devroit par un nouvel Edit
Faire ordonner que chacun en achette,

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