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me, ce cardinal dit qu'il y avoit quatre chefs de controverfe entre les Grecs & les Latins. Le AN. 1438. premier, de la proceffion du faint Efprit; le fecond, de l'ufage du pain azyme, ou levé dans le facrifice; le troifiéme, du purgatoire; & le quatrième, de la primauté du pape : & il demanda aux Grecs par lequel de ces articles ils vouloient qu'on commençât. Ils refuserent de traiter de la proceffion du faint Efprit, difant qu'ils le réservoient à un autre tems, & ne voulurent point répondre fur les autres articles, qu'ils n'euffent auparavant confulté l'empereur. Dans la quatriéme conférence, ils offrirent de traiter de l'article du purgatoire, ou de celui de la primauté, & laifferent aux Latins la liberté de choifir. Le cardinal Julien choifit l'ar ticle du purgatoire: mais on ne commença à agiter cette queftion que dans la cinquiéme conférence tenue le cinquième de Juin.

Conference

Comme les Grecs avoient demandé qu'on leur XCIII. exposât la doctrine de l'églife Romaine fur ce entre les point, le cardinal Julien leur dit, qu'elle croioit Grecs & les que les ames des Juftes, qui étoient pures & fans Latins fur le tache, & qui avoient été exemptes de péché mor- purgatoire, tel, alloient droit au ciel, & jouiffoient du bonheur éternel: mais que celles des hommes qui font tombez dans des péchez après le batême, quoiqu'ils en ayent fait pénitence, s'ils n'ont pas accompli entierement la pénitence néceffaire pour expier ces péchez, ni porté des fruits dignes de pénitence pour obtenir une entiere remiffion, paffent par le feu du purgatoire; & que les unes y font plus long-tems, & les autres moins, felon la qualité de leurs péchez; qu'enfin étant purifiées, elles jouiffent de la beatitude: mais que les ames de ceux qui meurent dans le péché mortel, font auffi-tôt envoyées dans les fupplices. Marc d'Ephese réTome XXII,

I

pondit que le fentiment de l'églife Grecque n'e AN. 1438. toit différent de cette doctrine qu'en fort peu de chofes, & qu'il croyoit qu'il feroit aifé de rectifier celle-ci par une explication. Cette difference fut éclaircie dans la fixiéme conférence; & les Grecs la firent confifter, en ce que les Latins difoient que la purification des ames fe faifoit par le feu; au lieu que les Grecs croïoient bien que les ames des pécheurs alloient dans un lieu de ténébres & de trifteffe, où elles étoient pendant un tems dans l'affliction, & privées de la lumiere de Dieu; mais ils ajoutoient qu'elles étoient purifiées & délivrées de ce lieu d'afflictions par les facrifices & par les aumônes; ils croyoient encore que les damnez ne feroient entierement malheureux, & que les Saints ne jouiroient d'une béatitude parfaite, qu'après la réfurrection de leurs corps. Les Latins demanderent que cette déclaration des Grecs fût mife par écrit; mais quand il s'agit de le faire, Marc d'Ephefe & Beflarion ne purent convenir enfemble, & drefferent chacun un écrit différent. Le premier étant perfuadé que la béatitude étoit differée jufqu'au jour du jugement; & l'autre croyant qu'il ne manquoit aux Saints pour la perfection de leur béatitude, que d'avoir leurs corps. Cette contestation les brouilla l'un avec l'autre, & depuis ce tems-là, ils n'agirent plus de concert, & ne furent plus en bonne intelligence.Ces conférences dégénererent enfuite en altercations, & finirent fur la fin du mois de Juillet, fans qu'on y eût traité d'autres points que de celui du purgatoire, fur lequel on ne put pas même convenir. Les actes ne rapportent point qu'on fit autre chofe jufqu'au huiSpond. ad tiéme d'Octobre, auquel Sponde place la premiere feffion; ce qui s'eft fait au neuvième d'Avril, n'étant que l'ouverture du concile. Nous

ann. 1438.

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rapporterons jufqu'à ce tems-là les autres évenemens de l'histoire.

AN. 1438.

XCIV.

Albert

roi de Hon

46.

Albert d'Autriche gendre de l'empereur Sigifmond, après lui avoir rendu les derniers devoirs, fut courronné roi d'Hongrie avec fon d'Autriche époufe Elifabeth à Albe-roiale, le premier couronné jour de Janvier ; & le fixiéme de Mai il fut proclamé roi de Bohême à Prague, & couronné grie & de Pologne. folemnellement le vingt neuviéme de Juin, malgré les vains efforts d'une, faction puiffante, Naucler. qui jetta les yeux fur Cafimir frere du roi de gener. 48. p. Pologne, qui n'avoit encore que treize ans, & An. Sylve qui fut caufe de la guerre ; car Roquefane qui hist. Bohem ne pouvoit demeurer en repos, forma une ar. cap. 51. mée de Bohémiens, commandée par Peterfcon Cochl.l.go & Pogebrac, qui fe joignit aux Polonois. Albert, dont les forces étoient devenuës plus grandes que celles de fon prédeceffeur, qui ne pof fedoit pas l'Autriche, preffa fi fort les Bohémiens & les quatorze mille foldats qu'ils avoient reçus de Pologne, qu'il les contraignit de quitter la campagne, de laiffer prendre toutes les places qui s'étoient déclarées en leur faveur, & de fe retirer enfin fous l'artillerie de Thabor, où le Polonois ayant refusé de combattre, furent réduits par la famine à fe débander. Les Bohémiens trop foibles pour réfifter feuls, fe foumirent, & le pape de fon côté, les peres de Bafle du leur, ménagerent une tréve avec les Polonois, afin d'unir leurs armes avec celles de l'empire, pour s'opposer aux progrez des Turcs qui faifoient beaucoup de dégats & de ravages fur toutes les frontieres du royaume de Hongrie.

XCV.

Les électeurs de l'empire Romain s'étant auffi Il eft !g affemblez à Francfort dans le carême, élurent roi des Role même Albert pour roi des Romains. Mais mains. fe préfentoit une difficulté : c'étoit le ferment

An. Sylv.

hifi. Bohem.

n. 55.

28.

qu'il avoit fait aux barons de Hongrie de ne AN. 1438. point accerpter cette dignité, fi on la lui offroit, Ce qui avoit porté les barons à lui faire faire ce ferment, c'eft qu'ils n'attribuoient les ravaDubrav. 1. ges que les Turcs avoient faits dans leur pays, qu'à l'abfence de Sigifmond, qui étant roi des Romains, n'avoit pu conferver & l'Allemagne & leurs états; ils avoient intérêt à prévenir de femblables malheurs. Cependant les électeurs employerent fi à propos la médiation du jeune Frederic duc d'Autriche, que les barons donnerent enfin leur confentement à ce que l'on demandoit d'eux; de forte qu'Albert II. du nom, reçut l'empire au grand contentement de toute l'Allemagne. Deux jours avant la proclamation, les électeurs voyant les grandes brouilleries qui étoient entre le pape Eugene & les peres de Bafle, & les différens décrets qu'ils publioient réciproquement, réfolurent de ne recevoir ni les uns, ni les autres, fans manquer toutefois au refpect qu'ils devoient & au pape & au concile de Bafle; d'où vint la neutralité d'Allemagne, qui déplut fi fort à Eugene & aux peres de Bafle. Albert élu roi des Romains, approuva toutefois ce concile; & ordonna aux ambaffadeurs nommez par Sigifmon, de s'y rendre accordant aux peres l'argent qu'on avoit levé en Allemagne pour l'arrivée des Grecs, & leur Reglemens permettant d'en faire un autre ufage. Il voufaits en Al- lut même qu'on obfervât dans toute l'Allema lemagne touchant le gne les décrets du concile de Bafle; mais on

XCVI.

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lui demanda du tems pour s'y déterminer, attendu l'affemblée qu'on avoit indiquée, & dans laquelle on prendroit des réfolutions conformes au bien public. Par le décret fait à Francfort le dix-huitiéme de Mars, on prit fix mois pout déliberer fur le parti qu'on devoit prendre, pendant lequel tems on ordonna que les

églifes feroient gouvernées fuivant le droit or

dinaire.

la

'

AN. 1438

Sur cette déliberation, les électeurs envoye rent des députez à Bafle pour engager les peres du concile à furfeoir la pourfuite du procès contre Eugene; ce qui étoit auffi demandé par l'ambaffadeur du duc de Milan, & foutenu par les prélats Italiens & Efpagnols. Mais Louis cardinal d'Arles préfident du concile, & la plupart des peres vouloient le continuer fans aucun retardement. Il fe tint là-deffus une congrégation générale le vingt-huitiéme de Mai, dans laquelle, malgré l'oppofition des ambaffadeurs des rois de Caftille, d'Arragon & du duc de Mil'an, l'on réçut les accufations faites contre Eugene, & il fut ordonné que l'on en feroit preuve par témoins.« On le fit cependant fort « Panorm. de paifiblement, dit Panorme; & quoique les « conc. Bafil. peres, après tant de traitemens injurieux de « Ja part du pape, euffent pû légitimement ve- «< nir à de plus grandes extrémitez, & le dé- « pofer tout-à-fait, furtout après le décret de « la feffion deuxième, qui portoit expreffément << que le pape ne fe reconnoiffant pas après deux mois de fufpenfion, feroit dépofé du « pontificat; cependant on ne précipita point «< les procedures contre lui, on garda les dé- « lais dont on pouvoit fe difpenfer, on reçut » les dépofitions de plufieurs perfonnes qu'il c n'étoit pas néceffaire d'entendre fur les faits << contenus dans les monitoires, dont la plû- « part étoient d'une notoriété publique, & « dont chacun en particulier étoit fuffifant « pour le dépofer fur le champ. La patience du « concile fut même fi grande, qu'il differa de « prononcer fa dépofition pendant l'espace de « vingt-trois mois à compter du jour du moni- « toire; efpérant toujours qu'Eugene rentre- «

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