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Quoique l'air nitreux foit plus ou moins fort, en raison de ce qu'on a employé l'acide nitreux plus ou moins concentré, ou que la diffolution, opérée par cet acide, a été faite plus ou moins promptement, néanmoins nous pouvons, par le moyen de l'air nitreux, déter. miner le degré de pureté & de refpirabilité des airs, tant naturels que factices, avec beaucoup plus de précision que fi nous voulions en juger par le tems que les animaux demeurent en vie dans ces airs non renouvelés, & par la facilité que les lumieres ont à brûler dans ces mêmes. airs; il eft certain que les airs mortels ne font point du tout diminués par l'air nitreux, & que les airs que l'animal respire le plus facilement & dans lesquels il meurt le plus tard, font ceux qui éprouvent le plus de diminution ; mais la mort de l'animal, qui arrive plus ou moins tard dans l'air non renouvelé, eft fi dépendante de l'économie animale & de la force de l'animal, que, fans un grand nombre d'expériences variées en mille manieres on ne pourra favoir rien de certain fur cette matiere; il faut ajouter à cela que l'animal qui meurt exhale de fon corps des vapeurs déjà altérées en partie & fétides; que fa refpiration eft déjà viciée, & qu'il doit néceffairement fortir de fes poumons des vapeurs alkalef

centes, qui, retenues dans le récipient, en infectent l'air, & peuvent accélérer la mort de l'animal. Enfin, il ne faut pas confondre ici la falubrité de l'air, qui laiffe mourir plus tard l'animal, avec la falubrité de l'air même, qui peut être avantageuse à l'économie animale , parce qu'un air renfermé peut très-bien laiffer mourir deux ou trois fois plus tard un animal, fans que pour cela il dût vivre deux fois ou plus dans le même air libre. La vie & la mort dépendent de trop de causes, pour qu'on puiffe déduire des conféquences certaines de ces expériences. Cependant la curiosité a engagé M. l'Abbé Fontana, de qui nous empruntons ces judicieuses obfervations, à faire quelques expériences, fur la durée de la vie, dans les airs non renouvelés; mais fur des animaux qui ne transpirent pas fenfiblement & qui font d'une vie ténace. Ce célebre Phyficien a choisi les animaux à fang froid, & parmi ceux-ci les grenouilles; il a renfermé celles qui lui ont paru de groffeur & de force égale, dans des vaiffeaux de même grandeur, dans le même tems; & ces vaiffeaux étoient remplis, les uns d'air déphlogistiqué tiré des fleurs de zinc, les autres d'air tiré du précipité rouge, & les autres d'air tiré du minium parfaitement purgé d'air fixe. Dans le même tems, il avoit mis de ces animaux dans des

bocaux remplis d'air commun frais; chaque vaisseau ne renfermoit qu'une feule grenouille. Les résultats moyens de toutes ces expériences font que la vie moyenne des grenouilles eft de vingt heures dans l'air commun, & de trente-six heures dans les airs déphlogistiqués. Si l'on vouloit maintenant mefurer la falubrité de cet air fur la durée de la vie, l'air déphlo giftiqué feroit tout au plus deux fois meilleur que l'air commun, & ce rapport eft trèsdifférent de celui qu'a trouvé M. Priefiley. Les vaiffeaux, dont M. l'Abbé Fontana s'eft fervi pour faire fes expériences, contenoient fept pouces d'air, fans compter le volume de la grenouille; ils étoient exactement bouchés.

Quoique M. l'Abbé Fontana faffe moins de fond fur les expériences avec les animaux à fang chaud, il a été curieux de voir dans quel rapport fe trouve la vie des oifeaux avec celle des quadrupedes dans les airs commun & déphlogistiqué. La vie moyenne des moineaux, fur lefquelles il a fait fes expériences, est de 26 minutes dans l'air commun, & de 130 dans l'air déphlogistiqué; la vie moyenne des fouris, fur lefquelles il les a répétées, eft de 30 minutes dans l'air commun, & de 240 dans l'air déphlogistiqué; mais, fi les fouris font fort jeunes, leur vie moyenne eft de 130 mi

nutes dans l'air commun, & de 360 dans l'air déphlogistiqué. Si l'on vouloit maintenant évaluer la falubrité des airs par la vie moyenne de ces animaux, on croiroit que l'air déphlogiftiqué est cinq fois meilleur que l'air commun pour les oiseaux, & en même tems qu'il eft trois fois à peu-près meilleur pour les fouris jeunes, & huit fois pour les vieilles. Ces rapports pourroient bien varier & varient en effet, fi l'on fait ces expériences fur des animaux de différente efpece, plus ou moins âgés, & dans des vaiffeaux plus ou moins grands; tant il eft vrai qu'il eft difficile d'eftimer la falubrité des airs par la mort des animaux.

Quant aux expériences faites avec la flamme des chandelles, M. l'Abbé Fontana les trouve encore plus équivoques & plus trompeuses; en forte qu'il lui paroît plus avantageux & plus exact, après tout, de déduire la pureté & la falubrité des mêmes airs, des diminutions qu'ils éprouvent lorfqu'on les mêle avec l'air nitreux, d'autant plus qu'il eft démontré que ces diminutions obfervent une loi conftante & qui eft la même pour l'air commun que pour l'air déphlogistiqué, & plus fain, en ayant égard à la quantité d'air nitreux décomposé, qui eft plus grande avec l'air déphlogistiqué qu'avec l'air commun, & d'autant plus con

fidérable que l'air nitreux employé à moins

de force ou d'activité.

La méthode de M. Fontana prévient l'erreur qui peut réfulter de la qualité différente de l'air nitreux, qui ne fe trouve pas toujours de la même force, quoique fait de la même maniere; il ajoute, à deux mefures d'air dont il veut connoître la bonté, autant de mefures d'air nitreux qu'il en faut, jufqu'à ce que la derniere mefure ajoutée ne produise plus aucune diminution fenfible. Dans cette maniere d'opérer, il importe peu quelle eft la force de l'air nitreux employé. La feule différence qui puiffe en arriver, eft qu'il faille ajouter d'autant plus de mefures d'air nitreux, que

celui-ci fe trouve moins actif.

i La théorie de ceci eft très-facile à comprendre, pourvu qu'on ait préfente, à l'efprit, la propriété merveilleufe qu'a l'air nitreux de diminuer l'air refpirable dans la proportion de la pureté de cet air; comme il faut que l'air nitreux foit de la meilleure qualité pour opérer la plus grande diminution poffible, il s'enfuit que, fi l'air nitreux eft affoibli, il en faudra une quantité plus grande pour faturer entiérement la quantité d'air refpirable employé dans l'effai. Suppofons, pour mieux comprendre cette épreuve, que l'air nitreux n'ait que

la

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