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Après que les alimens qu'on prend ont été moulus, broyés & divifés avec les dents, & détrempés par la falive, ils descendent dans l'eftomac, où ils continuent de fe divifer en trèspetites parties: cette feconde division est ce qu'on appelle la digeftion.

Les premiers Phyficiens qui ont cherché la caufe de la digeftion, ont cru l'avoir décou-verte en difant qu'elle eft l'effet de la chaleur de l'eftomac; mais on reconnut bientôt l'erreur de cette opinion, en obfervant que les poiffons digèrent bien, quoique leur eftomac n'ait point

de chaleur.

Pour fuppléer à cela, d'autres Phyficiens ont fuppofé une force extraordinaire dans les mufcles de l'eftomac, laquelle digère les alimens par la trituration. Enfin on a imaginé un troifième fyftême qu'on croit plus clair, pius fatisfaifant & plus vrai que les deux autres : c'eft que la digeftion s'opère par des diffolvans. D'abord la falive dans la maftication commence la première digeftion. Parvenus à l'eftomac, les alimens font arrofés par un diffolvant qui distille des extrémités de plufieurs branches d'artères qui aboutiffent à la furface intérieure de l'eftomac, & cette digestion fe perfectionne dans les inteftins par l'action du fiel qui y diftille continuellement, qui colore les alimens auffi-tôt qu'ils fortent de l'eftomac, & qui achève, comme un dernier diffolvant, ce que les autres liqueurs avoient commencé.

C'eft ainfi qu'il fe forme dans l'estomac une liqueur très-fluide, qu'on appelle chyle, & qui fe dégageant des matières groffières, monte jufqu'au cœur, où elle fe convertit en fang.

Les Anciens croyoient que le chyle étoit attiré hors des inteftins par les extrémités des branches de la veine-porte à laquelle ils attribuoient la vertu de fucer; que de là il continuoit de couler vers le foie, par qui il étoit auffi attiré, & dont il pénétroit la fubftance, & qu'enfin le foie le changeoit en fang.

Cette doctrine a été enfeignée jufqu'au temps de la découverte des veines lactées. Cette découverte a été faite vers le milieu du feizième fiècle. Ce font de petits tuyaux trèsminces, qui partent de la cavité des inteftins & rampent fur le méfentère. On appelle méfentère une forte membrane d'une figure ronde, laquelle eft attachée aux vertèbres des lombes. C'eft à cette membrane que les intestins sont attachés.

Ces veines lactées font fi petites, qu'on ne peut les voir que quand elles font pleines de chyle. Ce chyle eft porté par les veines dans les glandes du méfentère: de là il paffe dans d'autres veines lactées, qu'on nomme fecondaires, puis fe décharge dans un réservoir situé dans les veines d'un mufcle large, rond & plat, qui fépare la poitrine d'avec le bas ventre, lequel eft connu fous le nom de diaphragme. Ce réfervoir a été découvert peu de temps après la découverte des veines lactées, par un Médecin appelé Pequet, dont il porte le nom. De là le chyle monte le long des vertèbres canal thorachique, qui le verfe dans le cœur.

par

le

En effet, ce canal eft un petit vaiffeau, lequel monte le long des vertèbres du dos, & s'inclinant vers le côté gauche de la poitrine, va fe rendre à la veine fousclavière gauche, d'où

il defcend par la veine cave, dans le ventricule droit du cœur. Parvenu là, le chyle fe fubtilife & commence à fe changer en fang. Pouffé enfuite par le fiftole du cœur dans l'artère pulmonaire, il fe diftribue dans toute la fubstance du poumon. Là il eft repris par la veine pulmonaire qui le conduit au ventricule gauche du cœur, où il ne trouve d'iffue que par l'aorté, laquelle le répand dans tout le corps: & en circulant ainfi il devient peu-à-peu ce que nous appelons fang.

animaux,

Il fe paffe à cet égard, comme dans tous les fuivant l'obfervation très - remarquable de M. Deidier fi connu par fon Anatomie raifonnée du corps humain, ce que nous voyons dans toutes les plantes qui ornent la furface de la terre où elles font attachées, & qui s'y nourriffent par des racines. Toutes ces plantes, dit-il, ont des racines ouvertes de toutes parts pour recevoir leur nourriture, comme par une infinité de petites bouches, par lefquelles l'eau de pluie ou l'arrofage fait entrer les parties intégrantes des autres plantes qui leur fervent de fumier. L'homme & tous les animaux reçoivent leur chyle ou fucre nourricier par une infinité de points ouverts qui partent de la bouche, de l'eftomac & des boyaux, comme de tout autant de racines par lefquelles le chyle eft diftribué à toutes les parties du corps. Or, ce chyle n'eft autre chose que les parties des alimens que nous prenons, & qui s'uniffent à la falive, au fuc ftomachal, à la bile, au fuc inteftinal &c. qui leur fervent de fimple arrofage en les diffolvant & les entretenant dans nos vaisseaux pour y fuivre le cours

naturel de la circulation, qui fe fait dans l'homme comme dans les plantes,

Ainfi les alimens digérés dans les boyaux font la terre; & les veines lactées, les racines par lefquelles le fuc nourricier ou le chyle monte; de façon qu'un homme pourroit vivre fans manger ni fans boire. Pour le nourrir, il fuffiroit de remplir les inteftins d'alimens convenablement digérés, ou encore de faire tremper les veines lactées dans quelque vafe où ces alimens feroient dépofés & dans un état de mouvement, pour parvenir aux premières veines lactées. On planteroit ainfi un homme comme une plante, & il fe nourriroit & vivroit comme elle.

Mais fi l'homme n'eft qu'une plante, en le confidérant phyfiquement & abftraction faite de la fpiritualité de fon ame, il doit produire une fleur, comme elle; & cette fleur dans l'homme comme dans tous les animaux, c'est la tête. Il paroît que c'eft-là l'objet de toutes les opérations de la Nature. L'homme penfe par la tête, fent par la tête, entend, voit, a le fentiment de la faveur, &c. Auffi l'Auteur de la Médecine rendue fenfible (M. Lecamus) confidère le cerveau comme le noyau qui fe trouve enfermé dans le fruit des plantes, & qui contient le germe de l'efpèce qu'il doit repro duire.

Quoi qu'il en foit de cette fimilitude entre l'homme & la plante, comme les parties des alimens que nous prenons ne fe convertiffent pas toutes en chyle, & que la plus grande partie eft un excrément inutile, de même tout le chyle ne fe convertit pas en fang, ni tout le

fang en quelque partie de notre corps; telle ment qu'il y a des excrémens de plufieurs fortes & de nature fort différente, lefquels fe féparent de notre corps en plusieurs

manières.

2

D'abord les parties des alimens qui ne se convertiffent point en chyle, étant beaucoup plus groffières & moins fuides que lui, ne paffent point avec lui dans les veines lactées mais fe déchargent par le boyau destiné à cet office, qui les expulfe hors du corps. En fecond lieu toutes les parties du chyle ne fe convertiffent point en fang, & ces parties s'en séparent par des organes particuliers appelés glandes. On nomme cette féparation fecrétion. Le foie fépare la bile; les glandes falivaires, la falive; le pancréas (qui eft une groffe glande placée fous l'eftomac) le fuc dit pancréatique, & les reins féparent l'urine.

Le fang, en circulant dans toutes les parties du corps, fe débarraffe encore d'une eau qui s'échappe par les pores de la peau, c'eft-à-dire 2 par de petits intervalles qui font entre les fibres des chairs.

Enfin c'eft l'air qui eft le grand reffort qui met en mouvement toute la machine qui compofe le corps de l'homme. Ce fluide entre dans la poitrine lorfqu'elle fe dilate par la trachéeartère, & se rend de là aux poumons. On donne le nom d'infpiration à cette dilatation de la poitrine, & on appelle expiration le refferrement de la poitrine, lequel oblige l'air de fortir du poumon. C'est un mouvement alternatif qui entretient le jeu de toutes les parties de l'homme, & par conféquent fa vie. Lorsque

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