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font au-deffus de la grotte, & qui étant mis en mouvement par la chaleur de l'été, fe mêlent avec les eaux qui coulent par les fentes du rocher, & pénétrant ainfi jufques dans la grotte, y produifent la congélation qu'on y trouve dans les jours chauds.

Les Phyficiens concluent de-là que les fels contribuent à la formation de la glace, & ils confirment cette conféquence par des expériences décifives.

On met une bouteille pleine d'eau dans un vaiffeau plein de neige, mêlée avec du fel commun & du falpêtre, & même avec du falpètre feul,& l'eau fe gèle en fort peu de temps.

On produit une congélation lorfqu'on fe fert d'efprit de nitre fumant, mêlé avec de la neige, ou avec un mélange de neige & de vitriol. Le froid que ces mélanges excitent eft fi violent, que non-feulement tous les liquides s'y convertiffent en une maffe folide, mais encore le mercure même y acquiert un tel degré de congélation, qu'il devient un métal malléable. C'eft une découverte qu'ont fait de nos jours les membres de l'Académie de Pe tersbourg.

Il n'eft point facile d'expliquer de quelle manière des fels & de la neige peuvent produire un effet fi confidérable dans les parties de l'eau. Comment les fels & la neige peuvent-ils agir fur l'eau qu'ils ne touchent pas? On fait, & nous l'avons déjà vu, que les parties intégrantes de l'eau, quoique beaucoup plus petites que celles des fels, ne peuvent pénétrer le verre. Il eft donc impoffible que ces parties des fels les pénètrent, Sans doute que c'est en vertu

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de ce mélange que cette tranfmiffion fe fait.
Ce n'eft ici qu'une conjecture qu'aucune ob-
fervation n'autorife. En effet ces obfervations
ne nous apprennent que les faits fuivans.

Lorfque l'eau commence à fe geler, on
voit des filets qui fe forment fur la furper
ficie de l'eau, & qui s'étendent en travers.
Chaque filet jette à fes côtés des feconds filets,
qui en ont bientôt d'autres. Ces filets s'entre-
lacent, & forment le premier tiffu de la
glace. A ce tiffu fe joignent d'autres tissus,
jufques à une entière congélation.

Ce n'eft pas tout-à-fait là la manière dont fe fait la glace artificielle. On a remarqué qu'on ne parvient à former de la glace qu'en produifant un froid plus grand que celui de la glace même. Or, ce froid précipite tellement la congélation, qu'on a de la peine à diftinguer les premiers filets de glace, parce qu'ils font fi uniformes & fi près les uns des autres, qu'ils forment dans un moment une efpèce de couronne fur les bords intérieurs du vafe qui contient l'eau & qu'elle s'y congele parallèlement à ces bords, à peu-près comme les métaux fondus quand ils fe refroidiffent jufqu'à ce qu'enfin l'endurciffement parvien ne à l'axe du vafe.

En général ce qu'on remarque de plus conftant dans la formation de la glace, c'eft que les filets fe difpofent prefque toujours en croix de malthe, en étoiles ou en feuilles d'arbre. Cette fingularité de la formation de la glace donna lieu à une recherche fingulière: ce fut de favoir quelle forme prendroit une leffive de cendres de plantes, congelée.

Dans

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Dans cette vue, Boyle a écrit qu'ayant fait diffoudre un peu de verd-de-gris, qui contient beaucoup de parties falines de marc de raifins, & l'ayant fait convertir en glace artificiellement, il avoit vu des figures de vigne fur la fuperficie de la glace : le Chevalier Digbi affure avoir fait la même expérience avec des cendres d'ortie, & avoir remarqué réellement des feuilles d'ortie. Mais le favant Auteur de la differtation fur la glace, M. de Mairan, dit que ce font-là des vifions & des expériences mal faites, ou qui ne réuffiffent point.

Ce qu'il y a de certain, c'eft que quand l'eau eft glacée, elle occupe un plus grand efpace que celui qu'elle occupoit dans fon état naturel. Auffi fait-elle crever des vaiffeaux épais & d'une matière très-dure, dans lefquels elle se forme. Inftruit de cette vérité, M. Hughens voulut mettre cette force de la glace à l'épreuve : il remplit d'eau un canon de fer épais d'un doigt, le boucha bien, & l'expofa à une forte gelée, & il fe trouva caffé en deux endroits au bout de deux heures; d'où il conclut que la force de la glace est égale à celle de la poudre à canon qui s'enflamme.

Vers le milieu de ce fiècle, les Membres de l'Académie de Florence voulurent s'affurer de la réalité de cet effet. Ils expofèrent à un grand froid différens vaiffeaux remplis d'eau, des vaiffeaux de verre & de divers métaux, la plupart fphériques ou phéroïdes, & tous fort épais; & ils crevèrent. Là-deffus le célèbre Mufchenbroek chercha les moyens de déterminer cette force. Ayant choisi le vaiffeau de cuivre, il trouva que

G

1667

350 ans

l'effort de la glace étoit capable de foutenir un poids de vingt-fept mille fept cent-vingt livres.

On a fait encore une autre expérience affez curieufe fur la force de la glace. Après avoir rem li d'eau un boulet de fer creux fort épais de trois ou quatre lignes de diamètre, on laiffa ouvert le trou par lequel on l'avoit rempli : l'eau s'étant gelée dans le boulet, la glace fortit par le trou, & forma une tige d'environ trois pouces de longueur.

On a encore obfervé que lorfque l'eau eft glacée, elle eft plus légère que lorfqu'elle eft liquide, quoique fon volume foit plus grand. Et tous ces phénomènes de la glace exercent depuis long-temps les Phyficiens, pour en connoître la cause.

Ariftote enfeignoit qu'un corps eft dur, parce avant J. C. qu'il contient beaucoup de matière dans un pe tit volume, & qu'un corps eft liquide, parce qu'il contient peu de matière fous un volume affez grand. De-là il fuit que la glace n'est que de l'eau condenfée; mais,fi cela étoit, un morceau de glace devroit être plus pefant qu'un pa reil volume d'eau ; ce qui eft contraire à l'expérience : car on trouve que la denfité de la glâce eft à celle de l'eau comme 8 à 9.

A cette mauvaise explication de la caufe de la glace, on a voulu en fubftituer une autre. Un anonyme a écrit que le froid refferre les parties de l'eau, & que par ce refferrement elles perdent tout le mouvement qu'elles avoient : l'air fe dilate alors, comme on le voit par les bulles qui s'y forment, & cette dilatation contribue fur-tout à embarraffer les parties de l'eau les unes avec les autres. Mais

qu'est-ce que le froid? Sans une décifion exacte de ce mot, cette explication ne fignifie rien. Mufchenbroek croit que ce font des parties frigorifiques qui forment la glace; de façon que s'il y a dans l'air de ces parties,il gélera,quoique l'air foit chaud; & réciproquement la gelée pourra n'être pas confidérable, quoique l'air foit très-froid: ce font peut-être des parties de nitre infiniment atténuées.

Ce qui paroît confirmer cette admiffion de parties frigorifiques, c'est ce qu'on a obfervé 17201 fur l'eau enfermée dans une bouteille bien bouchée, & expofée à un grand froid.

Cette eau eft liquide dans la bouteille, quoiqu'elle ait refté affez long-temps pour fe geler; mais, lorsqu'on la débouche, il fe forme fur le champ de petits glaçons. C'eft MM. Fareneth & Mufchenbroek, qui ont éprouvé cela: or il femble qu'on doit cet effet à l'introduction des parties frigorifiques dans l'eau, lorfqu'on débouche la bouteille, & que ces parties frigori fiques font des parties de nitre, d'autant mieux qu'on remarque dans cette glace comine une criftallifation confufe de ces fels. Et une preuve que cette conféquence est assez jufte, c'eft que MM. Michelli & Jallabert ont reconnu de nos jours, que l'eau expofée à l'air tranquille, fe refroidit bien au-delà de la congélation, fans fe geler: nouvelle preuve que ce font des parties frigorifiques qui forment la glace, & qui agiffent fur l'eau comme les fels, lorfque l'eau eft en mouvement, fuivant le principe des Chimistes, que nous avons vu ci-devant.

Mais fi des molécules falines congèlent l'eau, cette eau congelée devroit être plus falée que

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