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Le commerce ayant fait fortir les Arméniens de leur Pays, ils fe font établis par des Colonies volontaires, dans prefque tous les endroits où ils l'ont exercé; dans la Géorgie & les Provinces voifines, dans la Perfe, dans la Turquie, dans la petite Tartarie, jufqu'en Pologne, & dans les autres lieux, où les guerres qui ravageoient leur patrie, les ont con→ traint de fe refugier. De forte que les Arméniens, qui difperfés comme ils le font, paroiffent un peuple infini, réunis enfemble, ne feroient peut-être pas deux ou trois Provinces de France.

tres,

Les Infidéles, qui font leurs maîexercent fur eux un dur empire; ils les chargent d'impôts, & les exigent avec violence, ce qui entretient dans les efprits de toute la Nation une timidité qui paffe des peres aux enfans. Mais,

qui plus eft, ils aggravent euxmêmes leur propre fervitude, faifant éclater au-dehors des diffentions & des jaloufies mutuelles qui fervent de prétexte à leurs maîtres pour leur faire des avanies, & pour en tirer de groffes fommes.

Il n'y a point de nobleffe parmi eux, non plus que parmi les autres peuples d'Orient. L'exclufion qu'ils ont des emplois hono rables, ne leur laiffe pour toute diftinction, que celle d'avoir plus ou moins de biens. Tous apprennent un métier dans leur jeuneffe, & ceffent de l'exercer quand ils fe mettent au commerce, ou qu'ils ont d'ailleurs de quoi faire fubfifter leur famille.

Une grande partie de la Nation eft occupée des travaux de la Campagne, à labourer les terres, & à cultiver les vignes.

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Pour ce qui eft des femmes, il en eft d'elles comme de toutes celles qui font dans l'Orient. L'on peut dire qu'elles font condamnées, pour ainfi parler, à une prifon perpétuelle. Si elles font obligées de fortir du Logis, c'eft toujours fous l'enveloppe d'un long manteau, & d'un grand voile blanc, qui les couvrent de telle maniere, qu'ils ne leur laiffent de libre, que les yeux pour fe con'duire, & le nez pour refpirer. Cependant, afin qu'elles puiffent fe vifiter & s'entretenir, on leur fait des portes de communication avec les maifons voisines; mais ces portes, bien différentes de celles du Temple de Janus, s'ouvrent quand les Dames font en paix, & fe ferment quand elles font en guerre. Les filles & les jeunes femmes ne paroiffent à l'Eglife qu'une ou deux fois l'année,

quoiqu'elles aillent bien plus fou-. vent aux bains. Voilà à peu-près l'état où se trouvent à préfent les Arméniens.

CHAPITRE IV.

Gouvernement Eccléfiaftique.

E Patriarche qui fait sa résidence à Echmiadzin, & dont nous avons déja parlé, eft reconnu & honoré par tous les Arméniens, non-feulement de la grande Arménie, mais encore par ceux qui commercent dans la Perfe, la Romilie, & la petite Tartarie, comme le Chef de leur Eglife, & de leur Gouvernement Eccléfiaf tique. Ce Prélat prend lui-même le nom & la qualité de Pasteur Catholique & univerfel de toute la Nation, quoiqu'elle fe foit

laiffée malheureusement divifer entr'elle par un ancien fchifme, dont nous dirons l'origine ailleurs.

Outre ce grand & célébre Patriarchat, trois autres Prélats ont encore le titre de Patriarche, mais ils font bien moins confidérés & moins confidérables: le premier de ces trois Prélats réfide à Sis, ou en Cilicie, & étend fa jurifdiction fur la petite Arménie & les Provinces voisines, fur la Natolie, & fur la Syrie les deux autres font à peine connus, leur pouvoir eft borné dans l'espace d'un Diocèfe, Fun eft en Albanie, & l'autre à Agtamar.

Les Arméniens Catholiques de la Province de Nafchivan, ont un Archevêque, qui reléve immédiatement du Saint Siége: ce Prélat & tout fon Clergé font de 'Ordre de faint Dominique, mais

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