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Duc de Frife, offenfé de ce que Grimoald, qui avoit éponse sa fille, sembloit le méprifer, à quoy il y a bien de la vray-semblance, & que Ratbot fut de la conspiration, parce que Rangaire étoit un de ses soldats. Grimoald ne laissa point d'enfans de cette Princeflè; mais il eut entr'autres enfans un fils d'une concubine nommé Théodoald, dont nous allons parler.

Pepin étant revenu de cette maladie, fit arrêter ceux qu'il crut coupables de la mort de Grimoald fon fils, & les fit tous mourir. Comme fa puissance n'avoit point de bornes, il fit élire Théodoald, bâtard de fon fils, qui n'avoit que fix ans, Maire du Palais de Neustrie & de Bourgogne par tous les Seigneurs dans le lieu même où Grimoald avoit été rué, & il y a apparence qu'il fut auffi Duc de Champagne. Il y a néanmoins des Historiens qui prétendent que Thibault fils de Dreux fucceda à Grimoald son oncle à ce Duché.

Cette entreprise de Pepin fut hardie, car il faifoit ainsi héréditaire dans sa maison en la personne d'un enfant bâtard, une charge dont les plus habiles auroient eû peine à remplir les devoirs; & il exécuta une affaire de cette importance, qui dépendoit de tant de voix, en un mois de temps, dont il avoit employé la meilleure partie à rechercher & à punir les meurtriers de fon fils. Après ce

coup d'autorité il retomba dans la même maladie, dont il n'avoit pas été entierement gueri, & mourut à Jupil le 16. Décembre

714.

Pepin avoit épousé Plectrude, de laquelle il eut Drogon & Grimoald, qui fuccedérent l'un à l'autre au Duché de Champagne, comme nous l'avons dit. Il laissa encore un fils nominé Charles, connu depuis sous le nom de Charles-Martel, qu'eut Pepin d'Alpaïde sa concubine, ou sa femme selon le sentiment de quelques Historiens, qui disent que Pepin répudia Plectrude, fondes fur ce que le second continuateur de Frédégaire dit que ce Prince épousa Alpaïde. Mais cet Ecrivain composa son hiftoire par les ordres du frere & du neveu de Charles-Martel, & il n'avoit garde de parler des amours de Pepin & d'Alpaïde autrement que comme d'un mariage. Il ne dit pas que Plectrude ait été répudiće; il reste même plusieurs actes qui font voir que Plectrude n'a jamais été séparée d'avec Pepin; de forte que ni felon les loix ecclésiastiques ni felon les loix civiles Alpaïde n'a pû être regardée comme la fenime légitime de Pepin, & s'il l'a épousée, il a eû deux femmes à la fois."

Ce qui eft de certain est que Plectrude se mit en état de gouverner toute la France, comme ayeule de Théodoald & d'Arnould,

714.

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& que dès que Pepin fut mort, elle envoya un grand nombre de troupes avec Théodoald pour prendre poffession du Palais de Neustrie en qualité de Maire. Elle se saisit en même temps de Charles, qu'elle envoya prisonnier à Cologne, & commença à gouverner l'Auftrafie au nom d'Arnould, l'un des fils de Drogon fixieme Duc de Champagne. Il semble par ces circonstances qu'il y a lieu de croire qu'Arnould fut Duc de Champagne à la place de Théodoald, parce que cette Province dépendoit toûjours du Royaume d'Auftrafie.

En l'année 715. Charles-Martel étant 715. encore jeune & fans autre conseil que celuy qu'il pouvoit prendre de luy-même dans l'étroite prison où Plectrude le retenoit, trouva moven de se mettre en liberté, & d'amaffer affez de troupes pour se faire reconnoître d'une partie des peuples d'Austrasie pour leur Prince: inais Plectrude conserva l'autre partie pendant quelque temps, elle retint aufli tous les trésors de Pepin. Les chofes étoient en cet état lorsque DagobertII.mourut. Théodoald mourut en 716. fi l'on en croit quelques Historiens; mais il y a plus d'apparence de croire que ce fut en 741. comme nous le dirons. Quoy qu'il en foit, il ne paroît pas que Charles-Martel ait poffedé la Champagne en ce temps-là, puisque nous

lisons dans l'Histoire qu'en l'année 718. Charles se présenta aux portes de Reims, 718. sous prétexte de vouloir faire ses prieres dans l'Eglise de Notre-Dame, ayant avec luy Clotaire IV. qu'il avoit fait reconnoître pour Roy, nonobstant que Chilpéric II. fût für le trône; mais Rigobert, qui en étoit Evêque s'étant saisi des clefs de la Ville, leur en refusa l'entrée. Charles l'année suivante se rendit maître de Paris, fit proclamer Clotaire Roy de Neustrie & de Bourgogne, afin de se faire donner le titre de Maire du Palais de ces deux Royaumes, & de les gouverner comme il faifoit la partie du Royaume d'Austrasie, dont il s'étoit rendu maître, à quoy fes Seigneurs consentirent; il fit auffi-tôt exiler Rigobert, qui se sauva auprès de Chilpéric en Aquitaine, & on mit Milon à sa place qui n'étoit que tonfuré. Flodoard dit que S. Rigobert retourna quelque temps après dans son Diocese & qu'il demeura long-temps à Gernicourt, où il mourut le 4. Janvier 733. & y fut enterré dans l'Eglise de S. Pierre.

On ne sçait pas de qui Clotaire étoit fils, mais il est certain qu'il étoit de la race Royale: il mourut dix-sept mois après avoir commencé à porter le titre de Roy.

Charles qui voyoit tout soumis sous sa puissance, remit en 719. Chilpéric fur le trône ; mais il mourut l'an 721. à Noyon,

719.

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où il fut inhumé. Charles fit aussi-tôt reconnoître pour Roy, Thierry fils de Dagobert Second, dit de Chelles, parce qu'il avoit été élevé dans ce château.

Plectrude, qui s'étoit retirée en Baviere, mit dans son parti les Bavarois contre Charles, fous prétexte qu'étant femme légitime de Pepin, ce bâtard l'avoit dépoüillée de tous ses biens: mais Charles ayant diffipé cet orage, pardonna généreusement à Plectrude, qui luy rendit Cologne, & fe retira dans un Monaftere, où elle passa le refte de ses jours fort faintement.

Arnould & Hugues, enfans de Drogon fixiéme Duc de Champagne, & petits-fils de - Plectrude, prétendirent au gouvernement : 723. mais Charles les fit arrêter l'an 723. Arnould mourut en prison, & Hugues se délivra de sa captivité se faisant Ecclesiastique: il mourut en 730. Il étoit pourvû des Evêchés de Roiien, Paris, Bayeux, & des Abbaïes de Fontenelle & de Jumieges; il poffedoit d'ailleurs des biens confidérables: mais loin d'augmenter son patrimoine du re venu de ces grands bénéfices, il en enrichit toutes les Eglises dont il avoit eû l'administration. L'Histoire remarque que toutes ces Eglifes furent fi bien servies, & les pauvres fi abondamment assistés, qu'on vit bien qu'il ne s'en étoit fait pourvoir que pour

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