ils avoient à leur tête les Archevêques de Reims, de Lyon & de Narbonne, & les Evêques d'Ainiens & d'Autun dans un Parlement tenu à Compiegne en l'année 833. ou 834. Ils ajoutérent à l'insolence les opprobres & les reproches les plus inoüis, ils pouffèrent l'indignité jusqu'à l'obliger à se mettre à genoux en leur présence à la vuë d'un peuple infini; là ce pauvre Prince prosterné devant l'autel sur une haire, reçut d'eux un papier où étoient écrits les péchés inventés ou ridicules dont on l'accusoit; on le contraignit de les lire & d'en demander pardon à Dieu & à l'affemblée. On luy ôta enfuite fon baudrier & fa ceinture militaire, comme on feroit à un Officier qu'on dégraderoit de nobleffe; on le dépoüilla de fes habits féculiers; enfin pour comble d'outrage ces Prélats facriléges le revétirent d'un froc. Voilà jusqu'où ces Prélats portérent leur téméraire & orgueilleuse autorité; tout plioit sous le joug de leur puissance qui faiToit gémir les peuples qui n'osoient se plaindre: mais le Roy S. Loüis, tout saint qu'il étoit, réprima depuis leurs entreprises, & les renferma dans de justes limites, comme nous le dirons dans la suite. Il faut néanmoins se taire fur ce sujet, car il est dangereux de parler das Prélats & de mal parler d'eux. Mais graces au ciel, nous voyons en France des Prélats qui ne se laiffent point ébloüir d'une gloire mondaine, & qui bien loin de s'ériger en maîtres dans les affaires temporelles, se fervent uniquement de l'autorité spirituelle que Dieu leur a confiée seulement pour ramener les brebis égarées dans le bercail par la douceur, la prudence, la chari-té, en un mot par un exemple véritablement apoftolique. Lothaire & Charles le Chauve, deux de ses enfans, convinrent que pour terminer leurs différens, ils s'assembleroient au Parlement qui se tien droit à Attigny, alors maifon Royale en Champagne, le 8. May fuivant de l'an 841. Lothaire ne s'y trouva pas, & au contraire 841. il essaya d'empêcher Charles de s'y rendre, & envoya inutilement des troupes pour s'oppoler à fon paflage: mais Charles se rendit à Troyes, où il célébra la fête de Pâques; de là il se rendit à Attigny, où après avoir inutilement attendu Lothairedurant quelques jours il marcha vers Chaalons, où il reçut l'Imperatrice Judith få mere & les troupes qu'elle luy amenoit d'Aquitaine. Il y cat une mémorable bataille entre Charles ie Chauve & Loüis Roy de Baviere contre Lothaire & Pepin, en un lieu nommé Fontenay bourg de l'Auxerrois, le 25. : 842. Juin 842. L'Hiftoire remarque que depuis ce jour-là il y eut une coutume établie en Champagne, que le ventre, c'est-à-dire la mere, anobliroit les enfans quoy-que nés d'un pere roturier, parce qu'il y périt en cette bataille tant de Nobleffe de cette Province, qu'il n'en restoit presque plus. Ce fut pour y fuppléer & rétablir le corps de la Nobleffe Champenoise que ce privilége fut accordé aux femmes nobles: mais les Traitans n'ont que trop combattu cette tradition, quoy-que bien établie dans l'histoire. En l'année 843. Pepin alla à Chaalons en 843. Champagne, & de là à Troyes, où trouvant ce païs en partie déclaré contre luy, & le reste peu disposé à foutenir ses interêts contre Charles, il en partit & alla jusqu'à Lyon. L'Hiftoire remarque qu'en ce temps-là les Evêques & les Abbés alloient à la guerre, & il y en eut un nombre confidérable qui furent tués, entre lesquels furent l'Abbé Hugues, fils de Charlemagne & oncle du Roy, & l'Abbé Ratbot, fils d'une fille de Charlemagne. En l'année 846. le Roy Charles le Chau846. ve convoqua pour le mois de Juin de la même année une affemblée générale de ses fujets en la ville d'Epernay fur Marne dans la Champagne, où le trouvérent grand nombre bre d'Evêques & de Seigneurs. Depuis que les Evêques avoient déposé le Roy Loüis le Debonnaire leur Souverain, & rétabli enfuite fous prétexte de la prééminence de la puissance spirituelle au-dessus de la temporelle, ils étoient par là devenus redoutables: néanmoins les Seigneurs l'emportérent fur eux en cette occafion, & le Roy ordonna aux Evêques de fortir du lieu de l'assemblée, pour laisser opiner avec liberté les Seigneurs qui avoient demandé cette grace au Roy, qu'il jugea à propos de leur accorder, soit pour s'attacher la Noblesse, soit pour abaisser les Evêques, qui avoient porté trop loin leur autorité. Mezeray dit que la haine qu'on portoit à Charles le Chauve, réjaillit sur Loüis II. dit le Begue, son fils, qu'il tâcha de la racheter à force de gratifications, en donnant aux uns des Abbaïes, aux autres des terres ou des charges; mais les Princes, c'est ainsi qu'on appelloit les Grands, s'offenférent qu'il eut donné de son mouvement seul ce qu'il ne pouvoit donner que par leur confentement & dans les affemblées générales. Il est certain qu'en ce temps-là nos Rois ne pouvoient aliéner leur domaine fans néceffité & qu'avec le consentement de leur Parlement; mais il s'accommoda avec ces Seigneurs ce qu'il ne put faire fans qu'il luy D 878. disent à en coutât beaucoup. Il fut enfuite couronné à Compiegne Reims par l'Archevêque Hincmar, & depuis en Décem- encore facré & couronné par le Pape Jean bre 877. VIII. le 7. Septembre 878. à Troyes en Champagne où il avoit convoqué un Concile. L'an 882. les Normans ayant été informés qu'on avoit fait abattre une partie des murailles de Reims d'un côté, pour augmenter l'Eglife Cathédrale, ils formérent $82. auffi-tôt le deffein d'en aller enlever les tréfors, & de revenir par Soiffons & par Noyon pour affiéger Laon. L'avis qu'on en donna à Hincmar Archevêque de Reims, fit qu'il fortit de la Ville, tout malade qu'il étoit, avec le corps de S. Remy & tous les tréfors de fon Eglife. On porta Hincmar dans une chaise jusqu'à Epernay, les habitans se sauvérent comme ils purent en divers lieux aude-là de la riviere de Marne. Le Roy Carloman vint avec le peu de troupes qu'il avoit pû ramaffer, & chargea les Normans avec tant de vigueur près d'Avaux, qu'il en tua un grand nombre, & quelques-uns, qui voulurent se sauver du côté de la riviere d'Aîne, furent pouffés de forte qu'ils se jettérent dans l'eau, où ils se noyérent; le reste de l'armée des Normans se retira à Laon : ainsi Reims fut délivré; ce qui donna beaucoup de joye 887. à Hincmar, qui mourut bien-tôt après. L'an 887. les Nermans affiégérent la |