Le Roy étoit de temps en temps luy-même insulté de la même maniere, & se défendoit aussi de même ; il prenoit quelquefois le parti de l'un & quelquefois le parti de l'autre; non seulement les Comtes & principaux Seigneurs en usoient ainsi, les Seigneurs d'un moindre rang & qui étoient vaffaux de ceux-cy en usoient de même entre eux à proportion de leur puissance. Le Roy Loiis en la même année 951. alla mettre le siége devant Brenne, que deux infignes voleurs avoient fortifiée, & quis'en servoient pour ravager tout le païs d'alentour: il les contraignit par famine à se rendre & fit rafer la place. L'an 958. notre Comte Robert eut quel- 958. que différend avec Anségise Evêque de Troyes, qui selon le sentiment de quelques Historiens étoit Chancelier de France, parce que cet Evêque s'opposoit à ses ambitieux desseins: ce qui fut cause que Robert le chassa par force de la ville de Troyes, dont Mezeray dit qu'il étoit Comte à cause de fa femme; il étoit auffi Comte de Chaalons. L'anné suivante 959. le Roy Lothaire afsisté de l'Empereur Othon, de Brunon Duc ou Gouverneur de Lorraine & Archevêque de Cologne, fit mettre le siége devant Troyes pour tâcher d'y rétablir Anfégise. Cet Evêque amena pour cet effet Helpont & au 959. tres Capitaines avec les troupes de ses protecteurs: inais Rainaud le Vieil Comte de Sens & Archambault Archevêque de la même ville ayant joint leurs forces à celles de Robert, ils défirent l'armée ennemie ; les Saxons furent défaits: Helpont qui les commandoit fut tué, & ceux de Sens remportérent la victoire fur le bord de la Vanne, affez près d'un village nommé Villiers, où les Allemans étoient venus chercher des fromages dont leur armée manquoit, à cause que la saison étoit trop avancée. Ainfi Brunon, qui avoit accompagné Helpont, le voyant mort, leva le fiége de devant Troyes & retourna en son païs. Le corps d'Helpont fut porté aux Ardennes à sa mere Varna qui l'avoit ainsi commandé. Archambault & Rainaud le regretérent, parce qu'il étoit leur parent. Ainfi Anfégise ne put rentrer dans son Evêché que 960. par l'accommodement qui se fit l'an 960. entre le Comte Robert & luy par l'entremise de l'Archevêque Brunon, qui fut envoyé par l'Empereur Othon pour les accorder. Le Comte Robert qui s'étoit rendu maître de la ville de Dijon, qu'il prétendoit luy appartenir du côté de la Comtefle fon époue, la perdit enfin, quoy-que le siége en eût été levé en même temps que celuy de Troyes, parce que le Roy Lothaire avec le secours de l'Arche vêque Brunon, oncle ou frere de la Reine Gerberge, veuve du Roy Lois d'Outre-mer, l'ayant affiégée pour la feconde fois, la reprit peu de temps après. En l'année 962. l'Archevêque Artaud étant mort, il se tint un Concile ou affem- 962. blée de treize Evêques tant de l'Archevêché de Reims que de celuy de Sens, où présida l'Archevêque de Sens, en un village du Diocese de Meaux, que l'histoire ne marque point. On y proposa de rendre l'Archevêché de Reims à Hugues frere de notre Comte Robert. Quelques Evêques furent de ce sentiment, d'autant plus qu'Artaud étoit décédé. C'étoit l'avis de Hugues Capet, qui espéroit par ce rétablissement de voir enfin finir une querelle qui duroit depuis une fi longue suite d'années. Mais la Reine Gerberge poufsée par les conseils de l'Archevêque Brunon fit que le plus grand nombre des Evêques s'y oppoférent, & entr'autres Roricon Evêque de Laon & Gibuin premier du nom Evêque de Chaalons, qui soutinrent que l'Archevêque Hugues ayant été excommunić par un plus grand nombre d'Evêques que ceux qui compofoient leur affemblée, il ne pouvoit être absous par un moindre nombre de Prélats, & ils firent renvoyer au Pape la décision de ce différend. On confulta donc le Pape Jean XII. lequel répondit aux Prélats 963. affemblés que Hugues étoit vrayement excommunić, & que l'on eût à proceder à une nouvelle & canonique élection, ce qui fut fait, dit Fauchet dans l'histoire du Roy Loüis d'Outre-mer l'an 963. & Odalric, fils du Comte Hugues, fut élu, & du consentement du Roy Lothaire ordonné Archevêque de Reims par les Evêques Guy de Soiffons, Roricon de Laon, Gibuin de Chaalons, & Vinfred de Verdun; quelques Hiftoriens blâment la décision de cette affaire. Notre Comte Robert résolut de se venger des mauvais offices que l'Evêque Gibuin avoit rendus en cette occafion à l'Ar chevêque Hugues fon frere, & après avoir joint ses forces avec celles d'Herbert Comte de Meaux fon autre frere, ils affiégérent la ville de Chaalons, ayant pris occafion de l'abfence de Gibuin son Evèque, & s'en étant rendus maîtres ils y mirent le feu, & brûlérent la ville. Notre Comte Robert décéda au mois d'Aoust l'an 963. d'autres disent en 968.II eut de fon mariage avec Alix ou Berthe, fille de Giflebert Duc de Bourgogne, un fils nommé Robert ou Heribert, qui mourut en bas âge avant fon pere. D'autres comptent encore au nombre de ses enfans Archambault Archevêque de Sens, & Adelaïde épouse de Lambert, Comte de Chalon fur Saone. Quelques Hiftoriens prétendent que ce Comte a été marié deux fois, la premiere avec cette Alix, & la seconde avec Verra. Mais d'autres foutiennent avec plus de vrayfemblable qu'Alix étoit furnommée Verra, & qu'elle a figné avec le Comte son époux l'an 959. une charte contenant un accord fait entre ce Prince & Gratian Abbé de Montierender. HERBERT fecond du nom, troisieme H Herbert, Erbert, qui étoit Comte de Meaux, troifiéme fucceda à fon frere Robert au Comté Comte de de Troyes l'an 963. Marlot l'appelle Regu- Champa lus Trecenfis, petit Roy de Troyes. L'histoi-gm. re remarque qu'en ce temps-là les Gouverneurs des Provinces & des Villes étoient ap- 963. pellés Reguli, Reges; non pas qu'ils fuffent Rois, mais parce qu'ils étoient ou Proconfals, ou Gouverneurs ufant de puissance ab folue comme la Royale. Ce Prince occupa toutes les places que le Comte Robert fon frere tenoit; il s'empara aufli par finefle de la ville de Vertus & de quelques autres places en Champagne & en Brie. Flodoard écrit que le Pape Martin fit ci ter à Rome ce Prince pour rendre compte de ses vexations envers les Evêques, à l'occafion du refus qu'ils avoient fait de recon |