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servées : à la vérité, l'esprit françois en général étoit le résultat de tous les autres; mais les peuples du Languedoc et de la Provence différoient de ceux de la Flandre et du Brabant ; ceux des bords du Rhin, de ceux de la Guyenne. Mais malgré ces variétés l'esprit national s'appercevoit au premier coup d'œil, et un habitant de la France étoit tout autre qu'un Espagnol ou un Italien aussi, après la fonte de tant de peuples étrangers dans sang Celtique, l'esprit des habitans

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est encore aujourd'hui le même qu'il étoit du tems de César, impétueux, prompts à se résoudre et se rebutant aisément. La nation a englouti tous ces différens essains, elle les a confondus dans son sein, et le climat a tout ramené à l'esprit qui lui est propre (a).

(a) Quand le peuple conquis est immense visà-vis le peuple conquérant, et que ce dernier est, en quelque façon, noyé dans sa conquête, il finit par s'y fondre; de sorte qu'après deux ou trois

Ce caractère primitif du Gaulois s'est conservé jusqu'à nous; son inconstance et sa légèreté lui font éprouver toutes les positions, et ne lui permettent guè res de s'en tenir à une favorable; son esprit inquiet le porte au changement; il abandonne souvent le bien qu'il pos sède, pour courir après le mieux qu'il trouve rarement. Il doit à son impétuosité et de sanglantes défaites et des journées glorieuses. Nulle nation n'a encore été plus célèbre pour le coup de main; et le François actuel, ainsi que le Celte son aïeul, ne s'occupe guères du nombre de ses ennemis : il charge, et ne compte pas.

La langue a eu aussi ses altérations

siècles il n'en reste plus de vestiges : le tems a effacé les différences, et les a ramenées au même niveau. C'est ce qui est arrivé à la Chine: envain les Tartares l'ont conquise plusieurs fois, ils s'y sont toujours perdus; le conquérant dispersé, trop foible et trop isolé pour lutter contre le climat et les mœurs de peuples innombrables, finit par les adopter.

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et ses variétés; et après ses métamorphoses elle a paru plus brillante que jamais, et s'est élevée au rang des premières de l'univers. Elle fut dans l'origine stérile et grossière; mais à la fondation de Marseille, les caractères grecs étant connus prévalurent insensiblement dans les affaires publiques. Le peuple conserva cependant sa langue jusqu'à l'arrivée des Francs; alors elle disparut, et fut confinée dans pays de Galles en Angleterre, où on en voit encore les traces, dans les montagnes surtout, ce qui a fait appeler les Gallois Welchs par les Anglois : c'étoit l'ancien nom des Celtes, et rien ne prouve mieux que ce pays étoit une colonie de Gaulois, puisqu'il en avoit le nom, la langue et la religion. On trouve aussi des traces de ce dialecte dans la basse Bretagne, et qui provient de ce que ce pays ne fut pas conquis par les Francs, mais possédé par les Bretons qui avoient le langage

des Celtes (a).. Cette langue se confondit en France avec la Tudesque, dialecte allemand qui étoit la langue des Francs, et cette dernière se conserva jusqu'au règne de Charles le chauve; on l'appelloit François-thiois. Jusques-là les actes étoient écrits en Latin ou en Tudesque. A cette époque l'Allemagne seule en demeura en possession; mais cette langue n'eut l'exclusion en France, qu'après avoir contribué à former et à enrichir celle qui lui succéda; car celle des Romains s'étant établie avec eux, un mélange de cette dernière qui étoit celle des vainqueurs, de la Grecque qui étoit celle de l'état, du Celtique qui étoit celle du pays, du

il se

fit

(a) Nous voyons la même chose dans l'Islande, habitée autrefois par des peuples qui parloient la langue runique, et dont les traces se sont conser vées dans cette isle : les pays de montagnes, par leur propre nature, se prêtent moins aux change

mens.

Tudesque qui étoit celle des derniers conquérans, et il résulta de cette confusion une cinquième langue qui fut composée des autres, et qu'on appela langue Romance ou Romain rustique. Dès le sixième siècle elle devint la langue des Gaules; quatre siècles après, c'est-à-dire dans le commencement du dixième, celle que nous parlons aujourd'hui vint à éclore. Brute et foible, elle sortit avec peine de ce chaos, et mit plusieurs siècles à se débrouiller: se débarrassant peu à peu de la langue romance, s'enrichissant du grec et de l'italien qui se perfectionnoit, elle arriva à l'époque de François I qui l'éleva en la rendant la seule active dans le royaume. De-là ses progrès et son éclat; de-là les Bossuet, Voltaire, Buffon, Raynal, enfans glorieux qu'elle mit au monde sept cens ans après sa naissance. Mais, la langue romance, reléguée vers les Alpes, bien avant ce prince, s'y con

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