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objet féparé du corps. Il fuffit de ce détail pour faire sentir le prix des monumens hiftoriques quefournit la terre, & pour faire voir jufqu'où l'hiftoire peut parvenir dans tous les pays en fuivant cette méthode, puifque la population des Gaules, qui ne paffe pas pour être une des plus anciennes, remonte à une époque fi éloignée, qu'on n'ofe en fixer la date.

Le temps eft arrivé où l'historien ne fera plus borné par des époques récentes, où il abandonnera les chartres & les autres titres auffi frais & auffi fragiles: il fentira que pour faire l'hiftoire des hommes & des fiècles il faut d'autres fecours que le papier; il s'élevera au deffus de la nuit des temps; il obfervera l'hiftoire dans fon immenfe éten

due; il l'embraffera avec le monde, &, curieux de la développer avec fon âge & fes révolutions, il cherchera les titres de famille du genre humain égarés ou enfouis fous les décombres des fiècles: la terre fera fon chartrier, les fciences & les arts fes indicateurs; l'histoire naturelle lui fournira des preuves, l'astronomie des renseignemens, la fculpture & l'architecture des échantillons, à la vue defquels il jugera des époques par leurs variétés & leurs nuances, la profondeur de leur enfouiffement, & le temps qui a dû s'écouler jufqu'à leur fabrique. Les veftiges du travail de l'homme fur la terre, ou dans fes entrailles, conduiront fon defcendant jufqu'à lui; fa main cherchant dans les ténèbres fouter

qu'abandonnant les traditions qu'on trouve à la furface de la terre, ils aillent chercher dans fes entrailles les fecrets qu'elle a voulu cacher. Des morceaux de métal, dont la rouille épaiffe dérobe le mérite, feront les caractères qui leur révéleront ces fecrets, & la pétrification rapportera fous leurs yeux les formes primitives que la nature avoit confervées fous ce fidèle cachet; car la terre eft la plus belle bibliothèque de l'histoire ancienne, & la feule qui puisse inftruire. l'homme fur des époques & des découvertes qu'il eft peut-être encore bien éloigné de soupçonner.

Le temps, moiffonnant dans fa courfe les générations fucceffives, & effaçant fous fes pas les montagnes, les profondeurs & les tra

ces des révolutions qu'éprouve le globe, ne permet pas aux hommes de favoir d'où il est parti, ni de s'affurer de l'époque précise des grands évènemens; il en eft cependant d'effentiels, fur lefquels il pourra s'inftruire, en appelant tout à-la-fois à fon aide & les cieux & la terre, tel que le féjour des hommes dans les contrées polaires; il s'affurera, par le fecours de l'aftronomie, des dates de l'habitation de ces climats & de leur refroidissement; il calculera le degré de chaleur nécessaire aux éléphans pour vivre dans la Tartarie; il fupputera le temps qu'il a fallu, avant que cette chaleur foit defcendue au terme où elle eft, avant que l'homme ait trouvé la période fex-cent folaire, avant que les Chi

nois aient calculé l'éclipfe centrale du foleil plus ancienne de deux mille cent cinquante-cinq ans que l'ère chrétienne, avant les observations aftronomiques de Babylone remontant à quatre mille dix-neuf ans, avant la conftruction des pyramides d'Egypte, avant les expériences phyfiques faites en préfence de Pharaon par les mages oppofés à Moyfe, avant que les Indiens euffent frappé ces monnoies fi anciennes connues fous le nom de pagodes, avant qu'ils euffent écrit le Védam qu'on lit depuis cinq mille ans, avant qu'ils euffent inventé l'art d'écrire. Il ne

perdra pas de vue fur-tout que ces monumens avoient été précédés par d'autres; que ces traits qui nous paroiffent perdus dans l'an

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