Imágenes de páginas
PDF
EPUB

au bout defquelles on recommençoit, fans qu'il y eût aucun vuide dans ce facrifice continuel de louanges offert à Dieu. Cette pfalmodie perpetuelle n'étant interrompuë ni par le repos de la nuit, ni par les heures du repas, ni par les autres exercices de la vie religieufe, qui s'obfervoient d'ailleurs avec autant de régularité que fi perfonne n'eut été emploié à la pfalmodie. On appella ces nouveaux religieux Acemetes, c'eft-à-dire, les non-dormans, comme fion eût voulu dire qu'ils ne dormoient pas, parce qu'on veilloit chez eux à toute heure dans la priere, & que le chant des louanges de Dieu ne finifloit point.

Plufieurs Auteurs font mention de ces moines Acemetes qui étoient à Conftantinople, Theodore le Lecteur,Evagre, Theophanes. Saint Marcel d'Apamée fucceda à l'abbé Alexandre. Theodoret dit que faint In Philo. Publius avoit dans fon monaftere des Grecs theo.c.s. & des Syriens, qui fe fuccedoient les uns aux autres, & chantoient les hymnes du matin & celles du foir chacun en fa propre langue.

Lib.

2.

Sophronius dans la vie de fainte Marie Egyptienne, rapporte que dans le monastere de iis de l'abbé Zozyme on ne ceffoit jour & nuit de chanter des pfeaumes: cela fut inftitué pour fe conformer à la Jérusalem célefte, où

Patr. c.4.

felon faint Jean on ne ceffe de chanter Alleluia, comme l'explique faint Auguftin.

InPf.141.

Cette loüange perpetuelle fe pratiquoit auffi en Occident. Saint Bernard dans la vie de faint Malachie, rapporte que faint Colomban le faifoit obferver ainfi dans fon monaftere de Luxeu; Ut fuccedentibus fibi viciffim choris continuarentur folemnia divinorum, ita ut ne momentum quidem diei ac noctis vacaret à laudibus. Grégoire de Tours dit le faint Roi & martyr Sigifmond L4 que l'avoit auffi établi dans fon monaftere d'Aft... gaune; In monafterio Agaunenfi inceffabilis Pfalmodia ratio: ce qu'il repete qu'il repete ailleurs ; Affiduum & quotidianum pfallentium infti- In Glor, tutum in Againenfi monafterio ; & que cet 75. ufage pafla enfuite dans plufieurs autres monafteres de France.

Lib. 4.

Marly.

Ecclef.

an.

Un Auteur moderne prétend que l'on Tom 1. n'a jamais obfervé cette maniere de dire Annal. l'office continuellement, & que quand Gré- Gallic, goire de Tours parle de la priere affiduë ". 519. qu'on faifoit dans le monaftere d'Agaune, qu'il faut l'entendre comme Caffien, qui appelle l'affiduité des prieres, orationum affiduitatem, les heures de Tierce, Sexte & Nones: il foûtient que cette pfalmodie n'étoit appellée continuelle que parce que l'office fe faifoit tous les jours dans ces monasteres; au lieu que dans les autres mai

Lib. 3.

Franc. c.

80.

fons on ne s'affembloit pour faire l'of fice que les Dimanches & les fêtes; c'est pourquoi, dit-il, Grégoire de Tours parlant du monaftere d'Agaune, rapporte que l'office s'y faifoit tous les jours; Quotidianum officium; mais cet Auteur n'a pas pris garde qu'il y a grande difference entre prier affiduement, en difant tous les jours l'office, ainfi que prétend Caffien, & entre la pfalmodie continuelle dont Grégoire de Tours fait mention: que celle-ci fe faifoit non-feulement chaque jour, mais à toutes les heures & à tous les momens de la journée, puifque les religieux fe relevoient tour à tour, qu'ils fe fuccedoient les uns aux autres, qu'on les partageoit pour cela en plufieurs bandes : ce qui marque expreffément la multiplicité des offices qui fe faifoient à toutes les heures dans chacun de ces monaf

teres.

Aimoin parlant du Roi Gontram, dit de gest. qu'il fit bâtir une Eglife dans laquelle on prioit fans interruption, comme dans le monaftere d'Agaune. Il ajoûte que cette maniere de pfalmodier continuellement s'étoit autrefois pratiquée à faint Martin de Tours; que faint Germain l'avoit établie à Paris dans fon monaftere de S.Vincent ; que le Roi Dagobert l'avoit ainfi ordonné à faint Denis. Fredegart parlant de l'abbaye de

faint Denis, dit la même chofe, qu'elle avoit été fondée fur le modele d'Agaune, & que cet office continuel fut interrompu par la négligence de l'abbé Aigulfe, qui fans doute n'eut pas foin de maintenir cette pfalmodie perpetuelle.

La pratique du même monaftere d'Agaune montre affez cette pfalmodie continuelle, comme on voit dans leurs anciens manufcrits: ils commençoient les premieres Matines à huit heures du foir, les fecondes à neuf heures & demie, les troifiémes à onze heures, les dernieres à minuit & demi. Les premieres Laudes à deux heures après minuit, les fecondes à deux heures trois quarts, les troifiémes à trois heures. & demie, les dernieres à quatre heures & un quart. Les premieres Tierces fuivies de de la Meffe fans interruption à fept heures, les premieres Sextes à midi, les fecondes à midi & un quart, aprés lefquelles les deux premieres bandes alloient au Réfectoire. Les premieres Nones à une heure & demie. Vêpres à trois heures pour la pre miere bande, la derniere à cinq heures & un quart, & au fortir les deux dernieres bandes alloient fouper, pendant qu'à fix heures on fonnoit Complies pour la premiere bande.

Il y avoit auffi des Monafteres de filles

où cette pratique étoit en ufage. Surius. 13. Sept. rapporte que faint Amat abbé, qui vivoit au tems de Dagobert, fit bâtir un Monaftere de vierges qu'il partagea en fept bandes, pour fe relever & chanter jour & nuit les louanges de Dicu, en forte qu'il y eût toûjours douze vierges à chaque bande.

Surius

16. Jin.

Dans la vie de faint Aichard, on voit 15. Sept. qu'il avoit fous fa difcipline plus de neuf cens moines, qui s'occupoient à louer Dicu fans interruption. Dans la vie de faint Benon évêque de Mifnie en Allemagne, on lit qu'il diftribua les clercs de fon Eglise en plufieurs bandes pour y chanter continuellement, felon qu'Erneft & Albert, Princes de Saxe & Marquis de Mifnie, tous deux freres, l'avoient fondé.

Sæcul. 2.

Benedict.

Dans les actes de faint Quirien martyr, il eft parlé de l'établiffement d'un nouveau monaftere, que firent les Religieux de faint Gal, & qu'en peu de tems on y mit jusqu'à cent cinquante Religieux, qui fe partageoient en trois bandes, fe relevant & fe fuccedant les uns aux autres aux offices & aux autres exercices du monaftere.

Dans la vie de fainte Salaberge à Laon en 655, il eft parlé d'un femblable monaftere de filles. Saint Amand abbé l'établit à In vit. Remiremont en Lorraine l'an 627; Multis cap. 10. virginibus pfallentium per feptem turmas in

« AnteriorContinuar »