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les nerfs&les muscles s'en font remplis, ils font tendus, les poings font fermés, & les bras affermis & prêts à frapper;mais il faut encore lâcher la corde, il faut que la volonté laiffe aller le corps, autrement le mouvement ne s'acheve pas.

Ce qui fe dit de la colere, fe dit de la crainte & des autres paffions,qui difpofent tellement le corps aux mouvemens qui lui conviennent, que nous ne les retenons que par vive force de raifon & de volonté.

On peut dire que ces derniers mouvemens aufquels le corps eft fi difpofé, par exemple, celui de frapper, s'acheve roit tout à fait par la force de cette difpofition, s'il n'étoit refervé à l'amé de lâcher ce dernier coup.

Et il en arriveroit à peu-prés de même que dans la refpiration que nous pouvons fufpendre par la volonté quand nous veillons mais qui s'acheve, pour ainfi dire, toute feule par la fimple difpofition du corps, quand l'ame la laiffe agir naturellement , par exemple, dans le fommeil.

En effet il arrive quelque chofe de femblable dans les premiers mouvemens des paffions: & les efprits & le fang s'émeuvent quelquefois fi vîte dans la co

fere, que le bras fe trouve lâché avant qu'on ait le loifir d'y faire réflexion. A lors la difpofition du corps a prévalu, & il ne reste plus à la volonté, trop promtement prévenue, qu'à regretter le mal qui s'eft fait fans elle

XVII.

La nature'

de Patenti

fets imme

où paroift l'empire de

Mais ces mouvemens font rares, n'ar rivant guere à ceux qui s'accoutâment de bonne heure à fe maîtriser euxmêmes Outre la force donnée à la volonté pour empêcher le dernier effet des paffions, elle peut encore en prenant la on, & fes ef chofe de plus haut, les arrêter& les mo diats fur le derer dans leur principe, & cela par le cerveau, par moyen de l'attention qu'elle fera volon tairement à certains objets, ou dans le la volonté. temps des paffions pour les calmer, on devant les paffions pour les prévenir. Cette force de l'attention, & l'effet qu'elle a fur le cerveau le cerveau fur tout le corps, & même fur la partie de l'ame & par-là fur les paffions & fur les appetits, eft digne d'une grande confideration.

› par

Nous avons déja obfervé que la contenfion de la tête fe reffent fort grande dans l'attention, & par-là il eft fenfible qu'elle a un grand effet dans le cerveau.

On éprouve d'ailleurs que cette attention dépend de la volonté, en forte que

le cerveau doit être fous fon empire,>en* tant qu'il fert à l'attention.

Pour entendre tout ceci, il faut remarquer que les penfées naiffent dans notre ame quelquefois à l'agitation naturelle du cerveau, & quelquefois par une

attention volontaire.

Pour ce qui eft de l'agitation du cerveau, nous avons obfervé qu'elle erre quelquefois d'une partie à une autre. Alors nos pensées font vagues comme le cours des efprits ; mais quelquefois auffi elle fe fait en un feul endroit, & alors nos pensées font fixes & l'ame est plus attachée, comme le cerveau eft auffi plus fortement & plus uniformement tendu..

Par là nous obfervons en nous-mêmes une attention forcée ce n'eft pas là toutefois ce que nous appellons attention, nous donnons ce nom feulement à l'attention, où nous choififfons notre objet pour y penfer volontairement. Que fi nous n'étions capables d'une telle attention, nous ne ferions jamais maître de nos confiderations & de nos penfées, qui ne feroient qu'une fuite de l'agitation du cerveau: nous ferions fans liberté, & l'efprit feroit en tout affervi au corps, toutes chofes contraires à la

railon, & même à l'experience. Par ces chofes on peut comprendre la nature de l'attention, & que c'eft une application volontaire de notre efprit fur un objet.

Mais il faut encore ajoûter, que nous voulions confiderer cet objet par l'entendement, c'est-à-dire, raifonner deffus, ou enfin y contempler la verité. Car s'abandonner volontairement à quelque imagination qui nous plaise, fans vouloir nous en détourner, ce n'est pas attention, il faut vouloir, entendre, & raifonner.

C'est donc proprement par l'attention que commence le raifonnement & les réflexions, & l'attention commence el-le-même par la volonté de confiderer &

d'entendre.

Et il paroît clairement que pour fe rendre attentif, la premiere chofe qu'il faut faire, c'est d'ôter l'empêchement. naturel de l'attention, c'eft-à-dire, la diffipation & ces pensées vagues, qui s'élevent dans notre efprit, car il ne peut être tout ensemble diffipé & attentif.....

Pour faire taire ces penfées qui nous diffipent, il faut que l'agitation naturelle du cerveau foit en quelque forte

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calmée. Car tant qu'elle durera, nous ne ferons jamais affez maîtres de nos pensées pour avoir de l'attention. Ainfile premier effet du commandement de l'ame, eft que voulant être attentive, elle appaife l'agitation naturelle du cer

veau.

Et nous avons déja vû que pour cela il n'eft pas befoin qu'elle connoiffe le cerveau, ou qu'elle ait intention d'agir fur lui, il fuffit qu'elle veuille faire ce qui dépend d'elle immédiatement, c'eftà-dire, être attentive. Le cerveau,s'il n'eft prévenu par quelque agitation trop violente, obeït naturellement, & fe calme par la feule fubordination du corps à l'ame.

Mais comme les efprits qui tournoyent dans le cerveau, tendent toûjours à l'agiter à leur ordinaire, fon mouvement ne peut être arrêté fans quelque effort. C'eft ce qui fait que l'attention a quelque chofe de penible, & veut être relâchée de temps en temps.

Auffi le cerveau abandonné aux efprits & aux vapeurs qui le pouffent fans ceffe, fouffriroit un mouvement trop irregulier, tes penfées feroient trop diffipées, & cette diffipation, outre qu'elle tourneroit à une efpece d'extra

vagance

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