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mouvoir n'eft pas fentir, fentir n'eft fe mouvoir.

pas

Ainfi quand on dit qu'une partie du corps eft fenfible, ce n'eft pas que le fentiment puiffe être dans le corps ; mais c'eft que cette partie étant toute nerveufe, elle ne peut être bleffée fans un grand ébranlement des nerfs, auquel la nature a joint un vif fentiment de

douleur.

Et fi elle nous fait rapporter ce fentiment à la partie offenfée, fi par exem ple, quand nous avons la main bleffée; nous y reffentons de la douleur, c'eft un avertiffement que la bleffure qui caufe de la douleur, eft dans la main ; mais ce n'eft pas une preuve que le fentiment qui ne peut convenir qu'à l'ame, fe puiffe attribuer au corps.

En effet, quand un homme qui a la jambe emportée, croit y reffentir autant de douleur qu'auparavant, ce n'eft pas que la douleur foit reçûë dans une jambe qui n'eft plus; mais c'est que l'ame qui la reffent feule, la rapporte au même endroit qu'elle avoit accoûtumé de la rapporter.

Ainfi de quelque maniere qu'on tourne, & qu'on remue le corps, que ce foit vite ou lentement › circulairement >

1.

L'Homme

ou en ligne droite, en maffe ou en pa celle feparée, cela ne le fera jamais fentir, encore moins imaginer, encore moins raifonner & entendre la nature de chaque chofe, & la fienne propre encore moins déliberer & choifir, refifter à fes paffions, fe commander à foimême, aimer enfin quelque chofe juf ques à lui facrifier fa propre vie.

Il y a donc dans le corps humain une vertu fuperieure à toute la maffe du corps aux efprits qui l'agitent, aus mouvemens & aux impreffions qu'il en reçoit. Cette vertu eft dans l'ame, ou plûtôt elle eft l'ame même, qui quoique d'une nature élevée au-deffus du corps, fui eft unie, toutefois par la puiffance fupreme qui a creé l'une & l'autre..

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De Dieu Créateur de l'ame & du corps, & Auteur de leur union.

DIE U qui a créé l'ame & le corps > eft un ouvra- & qui les a unis l'un à l'autre d'une gedungrand façon fi intime, fe fait connoître luid'une fagefle même dans ce bel ouvrage. profonde.

deffein & ,

Quiconque connoîtra l'homme, verra que c'eft un ouvrage de grand deffein, qui ne pouvoit être ni conçu ni executé que par une fagelle profonde.

Tout ce qui montre de l'ordre, des proportions bien prifes, & des moyens propres à faire de certains effets, montre auffi une fin expreffe ; par confequent un deffein formé une intelligence reglée, & un art parfait.

C'est ce qui fe remarque dans toute la nature. Nous voyons tant de juftelle dans fes mouvemens, & tant de con», venance entre les parties, que nous ne pouvons nier qu'il n'y ait de l'art. Car s'il en faut pour remarquer ce concert & cette jufteffe, à plus forte raison pour l'établir. C'eft pourquoi nous ne voyons rien dans l'Univers que nous ne foyons portés à demander pourquoi il fe fait tant nous fentons naturellement que tout a fa convenance à sa fin.

Auffi voyons-nous que les Philofophes, qui ont le mieux obfervé la nature, nous ont donné pour maxime qu'elle ne fait rien en vain, & qu'elle va toûjours à fes fins par les moyens les plus courts & les plus faciles : & il y a tant d'art dans la nature, que l'art même ne confifte qu'à la bien entendre

& à l'imiter. Et plus on entre dans fes fecrets plus on la trouve pleine de prø· portions cachées qui font tout aller par ordre, & font la marque certaine d'un ouvrage bien entendu, & d'un artifice profond

Ainfi fous le nom de nature nous en. tendons une fageffe profonde, qui développe avec ordre & felon de juftes regles, tous les mouvemens que nous voyons. Mais de tous les ouvrages de la Nature, celui où le deffein eft le plus fuivi, c'est̃ fans doute l'homme.

Et déja il eft d'un beau deffein d'avoir voulu faire de toute forte d'Eftres. Des Eftres qui n'euffent que l'étendue avec tout ce qui lui appartient, figure, mouvement, repos, tout ce qui dépend de la proportion ou difproportion de ces chofes. Des Eftres qui n'euffent que l'intelligence, & tout ce qui convient à une fi noble operation, fageffe, raifon, prévoyance, volonté, liberté, vertu ou vice. Enfin des Eftres où tout fût unis & où une ame intelligente fe trouvât jointe à un corps.

L'homme étant formé par un tel deffein, nous pouvons définir l'ame raifonnable,fubftance intelligente née pour vivre dans un corps.& lui être intime

ment unie.

L'homme tout entier eft compris dans cette définition, qui commence par ce qu'il a de meilleur, fans oublier ce qu'il a de moindre, & fait voir l'union de l'un & de l'autre.

A ce premier trait qui figure l'hom me, tout le refte eft accommodé avec un ordre admirable.

Nous avons vû que pour l'union, il falloit qu'il fe trouvât dans l'ame, outre les opérations intellectuelles fuperieures au corps, des opérations fenfitives naturellement engagées dans le corps, & affujetties à fes organes. Auffi voyons-nous dans l'ame ces opérations fenfitives.

Mais les opérations intellectuelles n'étoient pas moins néceffaires à l'ame puifqu'elle devoit, comme la plus noble partie du compofé, gouverner le corps & y préfider. En effet, Dieu lui a donné ces opérations intellectuelles, & leur a attribué le commandement.

Il falloit qu'il y eût un certain concours entre toutes les opérations de Fame, & que la partie raifonnable pût tirer quelque utilité de la partie fenfitive. La chofe a été ainfi reglée. Nous avons vû que l'ame avertie, & excitée par les fenfations, apprend & remarque

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