PAGNE. 684. électif, il fuffifoit, pour que l'on dît qu'une perfonne étoit ANNE'E 646. Après qu'il eut fondé ce Monaftére, où l'odeur de fa Sainteté attira en peu de tems une foule de Moines, qui vivoient dans une grande retraite & en vrais Pénitens, fon beau-frere porta contre lui des plaintes au Roi, s'efforçant de lui faire entendre que les biens qui appartenoient à fa femme, avoient été emploiés dans cet ouvrage pieux. Le Roi, dont la Religion fut furprise par de fauffes dépofitions, ne put refufer à celui qui lui paroiffoit lézé, la juftice qu'on Ïui demandoit. Ainfi il délivra au beau-frere un ordre, pour rentrer en poffeffion des biens qu'il répétoit, & pour en dépouiller le Monaftére. Saint Fructueux en aïant été averti, fit fur le champ ôter & cacher tous les Ornemens des Autels, & tout ce qui fervoit au Culte Divin, & redoubla en même tems fes priéres & fes jeûnes, pour obtenir du Ciet d'embraffer la défense de sa cause, qui étoit celle du Monaftére & des Moines. Dieu eut égard à fa demande, &permit. que l'injufte beau-frere mourût fans enfans, avant que de s'être faifi des biens du Monaftére, ce qui mit fin à cette tempête, que le Pere des Enfans du Siècle avoit fufcitée contre ceux qui l'avoient abandonné fous la direction du Saint. Cependant la grande réputation de Saint Fructueux dont la Majesté Divine faifoit connoître la Sainteté par un doivent leur grand nombre de miracles, étoit caufe que l'on s'empref- origine à ce foit de toutes parts d'aller le voir. Le Saint Abbé fatigué Saint. de ce grand nombre de vifites, fe retiroit quelquefois dans le Défert, afin de pouvoir plus librement fe livrer tout en-tier à Dieu dans la folitude, Voïant que le nombre de ceux Plufieurs Monaftéres DE PAGNE 6841 qui accouroient pour fe mettre fous fa conduite dans la Vie Le digne Fondateur forma dans ces Monaftéres de grands auffi venues par la fuite lui demander la même faveur, il RE D'ES fonda pour elles un Monaftére, où il fe trouva bien-tôt ANNE'E DE PAGNE 684. 685. quatre-vingt Religieufes. Peu après mourut Bénédicte, qui J.C. 646. Eugêne Métropolitain de Toléde mourut en cette année 647 647. C'étoit un homme vertueux d'un grand jugement Mort d'Eus gêne de Tolé. & très-fçavant dans l'Aftronomie, comme je l'ai déja ob- de. S. Eugêfervé. Le Siége de cette Métropole étant venu à vaquer, ne le rempla le Roi fit venir Saint Eugêne, fils d'Evance, qui étoit de la ce principale Nobleffe des Gots, & qui avoit paffé par les premiers poftes de la Milice. Ce Saint avoit été Eccléfiaftique de l'Eglife Paroiffiale du Palais; mais laffé d'être à la Cour & de vivre dans le monde, il fe retira à Saragoffe, où il fe fit Moine dans le Monastére des Saints Martyrs de cette Ville. Il y fleurit pendant quelque tems en grande réputation de vertu & de fcience, ce qui fut cause que le: Roi le rappella à Toléde, où il parvint à le faire élire Suc-ceffeur de l'Eugêne defunt (B),. Les Sarazins commencerent en cette année à faire des (A) HUGUES MENARD & Don PEDRO D'EL-PULGAR dans le Tom. I. de l'Hift. de Palence; S. VALERE dans la Vie du Saint, imprimée par SANDOVAL dans les Fondations; TAMAYUS & les BOLLANDISTES au 16. d'Avril. * (B) S. EUGENE de Toléde dans fes Epitaphes; S. ILDEFONSE dans le Livre des Ecrivains. * Ces Peuples qui étoient Arabes d'origine, furent d'abord furnommés Scenites, d'un mot Grec qui veut dire Tente, parce qu'ils logeoient fous des Tentes, comme font encore aujourd'hui les Bédouins qui font de véritables Scenites. Par la fuite, ils reçurent le furnom de Sarazins, lequel vient de PArabe Sarcka, qui veut dire voler & piller. Il fuit delà, que Scenites & Sara- Entrée dés ANNE'E DE J. C. 647. Sarazins en Afrique. S. 648. conquêtes en Afrique du côté de l'Egypte (A). Je fais cette Chindafuinthe n'étoit pas moins illuftre par fa piété & conce. 649. Tajon de Saragoffe paffe à Rome par or dre de Chia dafuinthe. Le Roi fâché de ce que l'on n'avoit en Espagne des Livres de Morales, du Pape Saint Grégoire, que ceux que le Saint avoit envoïés à Saint Léandre, réfolut de donner à quelque perfonne la commiffion d'aller à Rome chercher les autres qui manquoient. Pour cet effet, il jetta les yeux fur Tajon Evêque de Saragoffe, homme très-vertueux & très-fçavant, qui partit en conféquence des ordres du Roi. Tajon arriva à Rome dans le tems que la Chaire de Saint Pierre étoit occupée par le Pontife Théodore, qui mourut fur ces entrefaites, & fuivant la meilleure Chronologie, le 20. d'Avril. Cette mort, & l'élection de Saint Martin, pour remplacer le Pape défunt, fut caufe que Tajon ne put point pendant quelque tems traiter l'affaire, qui faifoit le sujet de fon voïage. Saint Martin aiant été élu Pontife de Rome, Tajon le follicita de lui faire donner à copier les Livres de Morales que l'on n'avoit pas en Espagne. Le Pontife lui répondit qu'il le feroit avec plaifir, mais qu'il falloit les chercher dans les Archives, ce qui ne lui étoit pas poffible pour lors, à cause du grand nombre d'affaires qu'il avoit fur les bras dans fon avénement au Pontificat. Il fe paffa ainfi quelque Il y a une tems, à la grande mortification de Tajon. Pendant ce réapparition mi- tard, Tajon engagea un des Portiers de l'Eglife de Saint Pierre de le laiffer une nuit dans l'Eglife pour y prier. Vers le milieu de la nuit, toute l'Eglife parut éclairée, & Tajon raculeufe. (4) PAGI. (B) Le même Saint, dans la Lettre au Roi Chin lafuinthe; S. ILDEFONSE, dans ERE DE 685. 686. 6876 ERE D'ES PAGNE. 687. J. C. 649. y vit entrer une Proceffion d'une admirable fplendeur. Il Récéfuin la Roïauté avec Chinda fuinthe. Cependant Chindafuinthe fentant que fon grand âge demandoit de lui qu'il partageât avec quelqu'un le poids du the affocié à Gouvernement, fongea à fe faire donner un Collégue qui lui fuccédât dans la Souveraineté. Outre l'avantage qu'il entrevoïoit pour lui dans ce parti, il n'avoit pas moins en vûe le bien de fes Sujets : il se flattoit par ce moïen de les exempter des funeftes effets d'une guerre civile qu'ils pourroient bien avoir après fa mort, lorfqu'il s'agiroit de lui choifir un Succeffeur, comme il arrivoit affés com-. munément dans les élections des nouveaux Monarques. Après avoir donc mûrement réfléchi fur la démarche qu'il vouloit faire, il communiqua fes intentions aux Evêques & aux Grands du Roïaume, qui par confidération pour lui, proclamerent fon fils Récéfuinthe pour fon Compagnon & fon Succeffeur. Cette élection fe fit le 22. (4) S. ISIDORE de Badajoz dans la Chronique, l'Archevêque Doa RODETome II. 11 RIC, LOAYSA & plufieurs autres. |