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J. C.

783.

PAGNE.

751.

des Afturies, & emporterent avec eux toutes les Reliques & ANNE'E DE tous les Corps des Saints. Ceux qui enleverent le Corps de ERE D'ESSaint Ildefonfe, le dépoferent à Zamora dans l'Eglife de Saint Pierre, jugeant que les Armes des Sarazins ne pénétreroient pas fi facilement jufqu'à cette Place. Les Reliques & les Corps de Saint Eugêne & de Saint Julien Archevêque de Toléde, furent cachés dans une Eglife des Afturies, près de l'endroit où l'on a fondé par la fuite la Ville d'Oviedo. L'on croit encore que dans cette occafion, celui de la Glorieuse Sainte Léocadie fut porté dans les Afturies, où il resta jufqu'à ce qu'il fût tranfporté en France, & de la en Flandre, comme j'aurai occafion de le dire *.

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Sinderéde Métropolitain de Toléde, prit auffi la fuite, & s'en alla à Rome, laiffant fon Troupeau à l'abandon & expofé à la fureur des Loups, au lieu de refter pour l'animer & le foutenir dans fes tribulations. Les Principaux Seigneurs qui compofoient le Sénat ou qui étoient revêtus de la Dignité de Palatins, voïant que la reddition de la Ville étoit inévitable, en fortirent promptement; mais Taric les aïant' fait fuivre par un Corps de Troupes de Cavalerie, que Don Oppas Métropolitain de Séville** commandoit, ils furent pris & facrifiés, au moins pour la plupart, à la vengeance de cet abominable Prélat, en haine de ce qu'ils n'avoient

la folution, avant que d'adopter l'opi
nion de Mariana. En attendant, on a
toujours lieu de croire qu'Urbain n'a
jamais été Métropolitain de Toléde
& c'eft auffi le fentiment de Ferreras,
comme on le verra fous la méme an-
née.

**

* Le P. d'Orléans dit que l'enleve-
ment de ces Reliques fe fit par un Ar-
chevêque de Toléde, nommé Urbain,
qui fut efcorté par Pélage, le même
qui fut par la fuite reconnu Roi dans les
Afturies. Il fuit en cela Mariana, qui
prétend qu'après la fuite de Sinderéde,
qui occupoit ce Siége Métropolitain,
le Clergé ne voulant pas laisser dans ces
tems fâcheux, l'Eglife de Toléde fans
Pafteur, & regardant Oppas, dont il
eft parlé dans une autre Note, comme
un Intrus contre les Loix & l'Ancienne
Difcipline de l'Eglife, éleva Urbain à
l'Epifcopat. Mais comment comprendre
qu'un Clergé qui auroit tenu Oppas
pour un Intrus, parce qu'il avoit été
transféré de Séville à Toléde du vivant
de Sinderéde, fe foit dépouillé de cettede même, puifqu'il le qualifie feule-
délicateffe au fujet d'Urbain. On au-
roit fçu gré au P. d'Orléans, s'il avoit
fait cette remarque & en avoit donné

Mariana, je ne fçais fur quelle au-
torité, prétend qu'il paffa de l'Archevê-
ché de Séville à celui de Toléde, déja
occupé par Sinderéde, de forte que ce
Siége Archiepifcopal étoit rempli par
deux perfonnes. Cependant il ne tombe
pas fous les fens, que Witiza ait voulu
donner une pareille mortification à Sin-
deréde, qui étoit efclave de la volonté.
de ce Prince, de l'aveu même de Maria-
na. L'Abbé de Vayrac fans doute pense

ment d'Archevêque ou Métropolitain
de Séville; le P. d'Orléans a fuivi Ma
riana.

ERE D'ES

PAGNE.

754.

point voulu couronner un de fes Neveux. C'est ainfi que
crois, que
Je
l'on doit entendre Ifidore de Badajoz, à moins
que l'on n'aime mieux fe perfuader, qu'ils tâcherent de s'é-
chapper dans le tems que la Ville étoit affiégée, ce qui me
paroît fouffrir quelques difficultés.

Muza arrivé à la vûe de Toléde, fit fans doute fommer

ANNE'E

le.

J. C. 713.

DE

Toléde af

les Habitans de fe rendre; mais ne les aïant pas trouvés dif- fiégée par Mu
pofés à lui obéir, il les affiégea dans les formes. Les Tolé- za, & capitu-
dains, après avoir foutenu courageufement quelques affauts,
comprirent à l'ardeur des Affiégeans, que le meilleur partí
qu'ils avoient à prendre, étoit de fe foumettre, s'ils ne vou-
Loient pas être traités avec la derniére rigueur; c'est pour-
quoi, ils demanderent à capituler. Informés toutefois, que
les Maures qu'il avoit dans fon Armée, n'obfervoient pas
les conventions, comme ils le devoient, ils dirent qu'ils
vouloient que la Foi du Général Muza, fût le garant des Ar-
ticles qui feroient dreffés. Muza y aïant confenti, ils con-
vinrent entr'autres chofes, qu'ils exerceroient librement la
Religion Chrétienne dans les Eglifes de Saint Luc, de Sainte
Jufte, de Saint Torquat, de Saint Marc, de Sainte Eulalie,
de Saint Sébastien & de Notre-Dame d'Alficen, qui est
l'Eglife de Notre-Dame, des Carmes de l'Ancienne Obfer-
vance. Lorsque tout fut réglé, Muza entra dans la Place
& y mit une Garnifon d'Arabes, ce qui a fait que par la
fuite les Chrétiens de Toléde ont été appellés Muzarabes 5
terme dont le Marquis de Mondejar, Alderete, & d'autres
ont donné de fçavantes explications. Alcocer & Pisa, Hif
toriens de Toléde, racontent d'une autre maniére la reddi-
tion de cette Ville, difant fur l'autorité de Don Lucas de Tuy,
que Taric fut celui qui la foumit; mais j'ai fuivi Ifidore de
Badajoz qui donne cette expédition à Muza.

Pendant que Muza, à la tête de fon Armée pénétroit ainfi
dans l'intérieur de l'Espagne, l'Officier Général qu'il avoit
chargé de la Conquête de la partie Occidentale, faifoit un
ravage épouvantable avec fon Corps de Troupes. L'on croit
qu'il paffa dans le Païs que l'on nomme aujourd'hui le Por-
tugal, & qu'il démolit Egitanie, d'où il alla en faire autant
à Öffonoba. Evora, Lifbonne, Vifée & Lamégo effraïées
du fort de ces deux Villes, fe rendirent par compofition.
y a apparence que Coimbre ne voulut point en faire au-
tant, & que fa réfiftance fut caufe que les Barbares la dé-

IL

Deftraction de plufieurs Infidéles, Villes par les

ANNE'E J. C. 713.

DE

fils de Muza.

s'oppofe

mentaux Bar: bares.

truifirent presque entiérement *. Rafis rapporte autrement
la prise de Mérida, & après lui Vargas dans l'Hiftoire de ERE D'Es
cette Ville; mais j'ai déja marqué le crédit que mérite cet
Ecrivain Arabe **

Expéditions
Abdalaziz fils de Muza ne travailloit pas avec moins
d'Abdalaziz, d'ardeur ni d'acharnement à conquérir la partie de l'Efpa-
gne, baignée par la Méditerranée, où font les Roïaumes
de Jaen, de Grenade, de Murcie & de Valence; mais il
ne trouva pas d'abord la même facilité que les autres Géné-
Théodomir raux. Le brave Théodomir, un des Principaux Seigneurs
Gots, dont j'ai déja parlé, après s'être échappé de la mal-
courageufe heureuse bataille de Xeres, avoit ramaffé quelques débris
de l'Armée des Gots, & avoit formé avec eux & avec d'au-
tres gens qui s'étoient joints à lui, un petit Corps de Trou-
pes. Trop foible néanmoins pour se préfenter à découvert
à l'Ennemi, il fe contentoit, à la faveur des Poftes & des
occafions, de le harceler & de lui enlever quelques Partis,
fe retirant toujours dans les endroits les plus efcarpés. Mal-
gré tout ce qu'il put faire, il ne lui fut pas poffible d'empê
cher qu'Illiberi, à qui répond aujourd'hui Grenade, ne fût
emportée de force & ruinée par Abdalaziz. Mentése, qui est

*La Chronologie de ces événemens eft confondue par l'Abbé de Vayrac.

** Il a été suivi par Mariana, & enfuite par l'Abbé de Vayrac & par le P. d'Orléans. Tous trois font d'après lui une rélation très - ample du Siége de Mérida, dont la fin eft accompagnée d'une circonstance qui paroît fabuleufe, ou du moins très-douteufe. Ils prétendent que les Affiégés difpofés à fe rendre, envoierent des Députés à Muza. Ceux-ci de retour dans la Ville, ranimerent leurs Concitoiens par le récit qu'ils leur firent de la caducité de Muza, qui leur avoit paru fi infirme & fi caffé, qu'ils ne doutoient point qu'il ne mourût de défaillance, avant que de les avoir réduits à la derniére extrêmité. Muza inftruit de la caufe de leur nouvelle réfiftance, fe fit peindre en noir la barbe & les cheveux qui étoient blancs, & offrit ensuite de recevoir la Ville à com pofition. On lui envoïa les mêmes Députés, qui furpris de voir dans fa perfonne un fi grand changement, le crurent réellement rajeuni. Perdant alors tout espoir, ils perfuaderent à leurs

Compatriotes, lorfqu'ils furent rentrés
dans la Place, qu'il n'y avoit point d'au-
tre parti à prendre, que celui de fe ren-
dre à un homme, pour qui la nature
fembloit avoir changé fes Loix. Tel fut,
conculut-il, le motif qui détermina la
Ville de Mérida à capituler. A la véri-
té, le Traducteur de Mariana & le P.
d'Orléans, ont fenti que les perfonnes
fenfées ne croiroient pas facilement,
qu'une rufe fi grofliére ait pû avoir un
femblable effet. Delà vient que le pre-
mier en attribue le fuccès à la fimplici-
té des Habitans de Mérida. Mais quelle
apparence que des Hommes éclairés de-
puis long-tems des lumiéres de la Foi,
aient pu être féduits par une métamor
phofe de cette nature. Le fecond juge,
qu'il eft plus vraisemblable que les Dé-
putés crurent à leur feconde entrevûe,
qu'ils s'étoient trompés la premiére fois;
mais je trouve encore cette explication
forcée, parce qu'il n'eft guéres naturel
de croire, que deux ou trois perfonnes
puiffent fe perfuader qu'ils ont pris pour
blanc, ce qui auroit été réellement
noir.

PAGNE.

751.

D'ESGNE.

51.

za.

J. C. 713.

Autres ex

Théodomir

avec

Abdalaziz à

à préfent un lieu défert, proche de Cazorla, fut traitée de
même qu'Illiberi. Toutes les autres Villes de ces Quartiers ANNE'E DE
se soumirent au Vainqueur, Théodomir fe maintenant dans
les environs de Murcie fur les Confins de la Valence (A).
Muza, après la reddition de la Ville de Toléde, qui étoit
alors la Capitale de l'Empire des Gots, fongea à faire au ploits de Mu-
plûtôt la Conquête de tout le refte, qu'il regardoit déja
comme à lui. Ainfi étant forti à la tête de fon Armée, il
courut tout le Païs qui compofe préfentement le Roïaume
de Toléde, & il le réduifit en peu de tems fous fon obéif-
fance. Les Places qui oferent lui résister, furent rasées de
fond en comble, telles que Valérie & Arcobriga, Villes
Epifcopales dans le voifinage de Cuença. De ceci, l'on a
lieu de croire que Théodomir, qui étoit dans le Roïaume traite
de Murcie, fur les Confins de la Valence, confidéra que fa des conditions
perte étoit inévitable, fi Muza, dont l'Armée étoit proche, honorables.
faifoit une jonction avec fon fils; parce qu'outre qu'il étoit
déja inférieur en force à celui-ci, il ne pouvoit espérer au-
cun fecours, l'intérieur & la meilleure partie de l'Espagne
étant au pouvoir des Ennemis. Jugeant donc, que pour
prévenir ce malheur, il étoit à propos de s'accommoder
avec Abdalaziz, il lui remit cette Contrée à des conditions
très-honorables, qui furent couchées par écrit & fignées.
Valence & toutes les Villes voifines fe rendirent, en fe
faifant comprendre dans ce Traité. Quoiqu'Ifidore de Bada
joz ne défigne point l'endroit, où Théodomir fit la résis-
tance dont j'ai parlé, j'ai conjecturé que ce devoit être le Conjectu
Roïaume de Murcie fur les Confins de la Valence, fur ce res fur le Païs
qu'il dit
que ce Seigneur alla trouver Walid, Monarque Su-
prême des Sarazins, pour l'engager à ratifier le Traité qu'il
avoit fait avec Abdalaziz. Je me fonde encore fur ce que
le Géographe de Nubie donne le nom de Théodomir à ce
Canton du Roïaume de Murcie & à une partie de la Va-
lence, & fur ce que Sandoval raconte de la reddition de
la Ville de Valence à Abdalaziz par Capitulation. Les con-
jectures bien fondées, fuppléent au défaut des témoignages
pofitifs. L'Anonyme Andalucien & l'Hiftoire de Rafis, rappor-
tent ces faits de la même maniére.

qu'il défendit

Le Général, qui commandoit l'autre Corps d'Armée, pour Conquête conquérir la partie Occidentale de l'Espagne, paffa le Dué- des Sarazing (4) ISIDORE de Badajoz.

ce.

J. C.

713.

PAGSI

734

ro, après avoir foumis toute l'ancienne Lufitanie, & entra ANNE'E DE dans la Galice, où il fe porta aux mêmes excès. Brague, ERE DE Tuy, Orenfe, Lugo, & Britonia qui est à peu de distance dans la Gali- de Mondognedo, furent prifes de force & démantelées pour punition de leur réfistance. Iria qui eft le Padron s'étant rendue volontairement, fut épargnée, & obtint que fon Evêque reftât dans le libre exercice de fon Ministére. Il me paroît que ces événemens ont pû occuper pendant toute l'année les Armes des Sarazins, parce que les fiéges qu'il fallut faire, dûrent confommer quelque tems: ainfi je m'imagine que toute la présente année 713. a été emploïée à ces expéditions.

Plufieurs Re

droits.

l'on

On a lieu de croire qu'en cette année les Habitans d'Anliques empor- dujar enleverent le Corps de Saint Euphraife & le tranftées par les porterent en Galice, où ils le dépoferent dans la Montadifferens en- gne de Valdemar. Ceux de Guadix en firent autant de celui de Saint Torquat, qu'ils placerent dans le voifinage du lieu que a depuis appellé Celanova. On vénére encore aujourd'hui dans ces endroits ces précieux Tréfors. Je crois auffi pour la même raison, que Muza s'étant emparé de Toléde, Saint Urbice emporta d'Alcala de Hénares, qui est l'ancienne Complute, les Corps des Saints Martyrs Juste & Paftor aux Monts Pyrénées, afin de les garantir des outrages des Infidéles, parce que cette invafion des Sarazins a été la caufe du tranfport de ces Reliques. Ce n'eft au refte qu'une conjecture de ma part.

714.

expéditions

Les Sarazins, après avoir fait prendre quelque repos à Suite des leurs Troupes fatiguées par tant de marches qu'elles avoient des Sarazins été obligées de faire, & pour ainfi dire, affoiblies fous le en Espagne. poids glorieux de leurs Conquêtes, continuerent leurs tra

vaux Militaires. Muza prit avec fon Armée la route de la
Celtibérie, dans le deffein d'aller fe rendre maître de Sara-
goffe, Ville Capitale de tout le Païs que l'Ebre arrose de l'un
& de l'autre côté de ce Fleuve. Chemin faifant, il foumit
toutes les Places qu'il rencontra, faifant éprouver les cruels
effets de fon inhumanité à celles qui lui réfiftoient, comme
il arriva à l'ancienne Bilbilis, Patrie du Poëte Martial, &
à d'autres Villes. Saragoffe fe voïant hors d'état de fe dé-
fendre, fe rendit d'abord; de forte que Muza envahit tout
le refte du Païs jufqu'au pied des Pyrénées.

Pendant que ceci fe pafloit en Celtibérie, l'autre Corps

de

752

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