PAGNE. 811. ANNE'E 78;. DE d'Elipand, & l'a embraffée à fa follicitation, parce que la ERE D'ES- premiére fois qu'il eft parlé de lui, c'eft en cette année dans la Lettre qu'Elipand écrivit à Fidéle. Cependant, quoiqu'Urgel reflât fous la Domination des Mahometans jusqu'à l'année 785. que les François l'en tirerent, de même que Girone, il paroît que long-tems avant que d'être délivrée de cet affreux joug, elle avoit déja Felix pour Evêque, parce que la Soufcription de celui-ci au Concile de Narbonne, tenu en 781. précéde celle d'Adolphe, Evêque de Girone. Au refte, les Sçavans porteront de ceci le jugement qui leur paroîtra le plus conforme à la vérité. Saint Béat s'appercevant que l'erreur d'Elipand trouvoit des Sectateurs, prit la plume & écrivit en fon nom, & au S. Béat écrie nom d'Etherius Evêque d'Ofma, contre le même Elipand, pand deux Livres, dans lefquels il réfute avec beaucoup d'érudition fes fentimens erronés. André Scote de la Compagnie de Jefus a tiré cet Ouvrage d'un Manufcrit de la Sainte Eglife de Toléde: Pierre Stevart l'a publié d'abord à Ingloftad, & on l'a mis depuis dans la Bibliothéque des Peres. L'on verra par la fuite qu'Elipand, au lieu de fe rendre à l'évidence de la vérité, n'en devint que plus opiniâtre & plus attaché à fon opinion. 823. 784. contre Eli Vers ce même tems, le Pape Adrien eut connoiffance des Adrien Pape erreurs d'Elipand, & apprit avec douleur que ce Prélat en fait autant, avoit féduit & corrompu Afcaric & plufieurs autres Evêques. Sur le champ, il écrivit une Lettre à tous les Evêques Orthodoxes d'Espagne, par laquelle il leur prouvoit, que tout ce qu'enfeignoient Elipand & fes Adhérens, étoit Hérétique, & il les détrompoit fur les autres erreurs dont j'ai déjà parlé (A). 785. Girone fe met fous la Domination En 785. les Habitans de Girone remarquant que la Garnifon Mahométane étoit très-foible, complotterent en grand fecret de fe mettre fous la Domination de France, & firent fçavoir leurs difpofitions aux Commandans des Frontiéres. de France. Auffi-tôt les Officiers François en donnerent avis à Louis Roi d'Aquitaine, qui fit promptement marcher fon Armée vers cette Place. Dès qu'elle fut arrivée, les Chrétiens l'introduifirent dans la Ville & firent main-baffe fur tous les Mahométans qu'ils rencontrerent. Girone fut ainfi délivrée du joug des Infidéles par les François, qui y laifferent un (4) Le Pape ADRIEN, Lettrę 97. dans GRETSER ANNE'E DE Comte pour les défendre & pour les gouverner, & comme rone, Les Armes de France ne s'en tinrent pas à la prise de Gielles enleverent encore aux Mahométans les Villes Conquêtes d'Urgel & d'Aufone & toutes les autres Places fituées au en Efpagne. pied des Pyrénées (B). des François 786. Saint Emerius ne fçut pas plûtôt que la Contrée de Fondation Girone étoit foumife aux François, qu'animé d'un pieux tére par Saint zéle pour le Salut du Prochain, il y paffa de France avec d'un Monaf Emerius. Conftruction d'une Mofà Cordoue. quée fuperbe 787. Monaftére de Ripol. Felix d'Ur Llipand. quelques Compagnons, & il y fonda à Bagnoles un Mo- Abderrame, Roi de Cordoue, réfolu de bâtir une Mof- Quelques-uns mettent en 787. la Fondation du Monaf tére de Ripol en Catalogne; mais par un Privilége que Baluze rapporte dans l'Appendice de la Marca-Hifpanica, & qui eft le quarante trois, il est constant qu'elle eft beaucoup postérieure. Elipand au défefpoir de voir que Saint Béat & Ethegel féduit par rius avoient garanti les cœurs des Afturiens de fes Dogmes empestés, voulut effaïer s'il ne pourroit pas féduire Felix Evêque d'Urgel qui étoit Homme d'efprit, & qui paffoit pour fçavant. Dans cette vûe, il lui écrivit une Let tre, comme pour le confulter fur l'erreur qu'il foutenoit, cachant adroitement tout le poison, sous les raisons apparentes qui faifoient le fondement de fon Héréfie on croit même que pour l'obliger davantage, il lui offrit de (A) La Chronique de Morssac, Annales d'Aniane, & celles de Ripo... (B) La fuite de l'Hiftoire, & le Con cile de Narbonne fous l'année 791. PAGNE, 823. 824 815 D'Es GNE 25. 26. se soumettre à fes décifions *. Felix glorieux d'être con- ANNE'E DE 787. 788. Mort de Don Maurégat. Le Roi Don Maurégat mourut cette année, & il me paroît que ce fut après le mois de Juillet: les uns difent avec Don Alfonfe le Grand qu'il régna fix ans : la Chronique d'Albayda, n'en marque que cinq, & l'Hiftoire de Compoffelle cinq & demi. Il étoit d'un fi mauvais caractére, que l'on dit de lui en Proverbe, que comme il fut Prave, c'est-à-dire méchant, il fut enterré à Pravia: Como fuè Pravo, en Pravia fuè fepultado. Sa mémoire eft restée odieufe à la poftérité, pour avoir acheté la paix des Mahométans, comme on le voit communément dans les Histoires d'Espagne, par le Tribut des cent filles, dont j'ai déja parlé. L'Archevêque Origine de Don Roderic eft le premier qui en ait fait mention; mais Tribut des comme il n'a écrit que quatre cens ans après la mort de ce cent filles Prince & que fon fentiment n'eft autorifé d'aucun Chrétiennes Ecrivain ancien; je crois que c'eft une Fable introduite métans. dans les Hiftoires d'Efpagne, laquelle doit fon origine aux Mariages réciproques qui fe faifoient entre les Chrétiens & les Mahométans, & que l'on ne peut en tirer une preuve des Dévifes & des Armoiries de quelques familles, dont le Blafon annonce feulement, que l'on a délivré quelques filles emmenées Captives par les Infidéles. la Fable du aux Maho Après la mort de Don Maurégat, les Seigneurs & les Don VéréGrands du Roïaume, élurent pour Roi Don Berumde, mond Diacre, (4) JONAS D'ORLEANS, EGINHART, le Poete SAXON. * Tous les Hiftoriens qui ont traité de ce Point de l'Hiftoire Eccléfiaftique d'Ef pagne, parlent de cette confultation. Plufieurs néanmoins prévenus que Felix fut l'Auteur de l'erreur fur la Filiation de Jefus-Chrift, la mettent avant la Lettre d'Elipand à l'Abbé Fidéle, puifqu'ils difent qu'Elipand ne commença à débiter fes fentimens erronés qu'après y avoir été confirmé par la répon fe de Felix. Cpendant fi la Lettre d'Eli " J. C. 788. élu Roi & Succeffeur de gal. PAGNI 8:6 fils de Don Froila, Neveu de Don Alfonfe le Catholique, ANNE'E DE & frere de Don Auréle & de Doña Adofinde. Ils l'éleverent ERED fur le Trône, quoiqu'il fût Diacre, parce que de la Famille Roïale de Récared, il ne reftoit plus que Don Alfonfe, dont ils redoutoient toujours le reffentiment, à caufe de la mort de fon pere, & de la révolte de Don Maurégat, dans laquelle ils avoient trempé. Malgré l'Ordre du Diaconat, il paroît qu'ils l'obligerent auffi-tôt d'épouser une Demoifelle, appellée Nunila par quelques Hiftoriens, & Offenda par d'autres. Pendant qu'il étoit Eccléfiastique, on avoit remarqué en lui beaucoup de courage, ce qui ne contribua pas peu à le faire afféoir fur le Trône (4). Ceux qui écrivent que Don Bermude étoit fils de Don Froila, ou de fon frere Don Wimaran, fe trompent, comme on le voit par la chronique du Roi Don Alfonfe. Mort d'Ab. derrame. A Cordoue mourut auffi le Roi Abderrame, qui fut enterré dans l'Alcazar *. L'Archevêque Don Roderic dit que ce fut l'an 171. de l'Egire, & Elmacin en l'année 172. de la même Epoque qui commença le 11. de Juin de cette année. Outre que celui-ci a la réputation d'être meilleur Chronologifte que l'autre, tous les Sçavans s'accordent à marquer cette année 788. Il laiffa onze fils, dont plufieurs étoient Gouverneurs des principales Provin ces, & neuf filles. Avant que de mourir, il avoit déclaré fon Succeffeur à la Monarchie Zulema ou Suleiman, qui étoit pour lors à Toléde, dont il avoit le Gouvernement; Iffem fon fils mais Iffem fecond fils d'Abderrame, profitant de l'abfence eft proclamé de fon aîné, gagna les principaux Seigneurs du Roïaume, Roi. Troubles & fe fit proclamer Roi. Sur cette nouvelle, Abdalla fon à ce sujet chez les Mahomé- frere, qui avoit le Gouvernement de Valence, réfolut de s'approprier cette Province. Zulema informé que fon frere Iffem s'étoit emparé du Roïaume à fon préjudice, contre la difpofition Testamentaire & la volonté de fon pere qui en avoit été le Fondateur, prit les Armes pour le chaffer du Trône, & pour recouvrer ce qu'Iffem se disposoit aussi à conferver par la même voïe (B). fans. Il paroît que vers ce tems le Roi Don Bermude attira à fa Cour l'Infant Don Alfonfe, & que difpofant les ef* C'est ainsi que les Maures appelloient les Palais où leurs Rois fa foient leurs demeures. (A) Don ALFONSE le Grand, la Chronique d'ALBAYDA & les autres. (B) Don RODERIC, dans l'Hiftoire des Arabes, chap. 18. ́ ERE D'ES PAGNE. 827. 828. prits des principaux Seigneurs en faveur de ce Prince, il Zulema cependant fongeoit à recouvrer le Roïaume de Iffem, après s'être affûré de la Province de Toléde penfa à recouvrer celles de Murcie, de Valence & de Catalogne, parce qu'il paroît que Zulema & Abdalla avoient joint leurs Armes & leurs intérêts contre Iffem, & avoient attiré dans leur ligue Zade Gouverneur de Catalogne. Dès que le Printems parut, il affembla fon Armée, & il ouvrit la Campagne. Il entra d'abord dans le Roiaume de Murcie, où fe tenoit Zulema, avec qui il eut quel-' ques rencontres d'autant plus heureufes, que celui-ci voïant fes Troupes diminuer de jour en jour, fe détermina de s'ac (A) Don RODERIC dans l'Hiftoire des Arabes. Tome II. Vuu |