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CHAP. 1.

deux Germes ne fe développent pas à la fois fur le même bout? Pourquoi le tronçon ne pouffe-t-il pas à la fois à fes deux extrémités une tête & une queue? J'effayerai de répondre à cette question par une conjecture qui ne me paroît pas dépourvue de vraifemblance, & que je tire d'un fait très-certain.

J'AI dit que la circulation du fang s'exécute dans ces Vers, de la queue vers la tête, du bout poftérieur vers l'antérieur. J'ai fait admirer ailleurs la régularité conftante de ce ment que les fections les plus multipliées ne troublent jamais (1). Il y a donc dans cette Efpece de Vers, un fuc afcendant; je nomme ainfi ce fuc dont la direction constante eft de la queue vers la tête. Seroit-ce abufer de la permiffion de conjecturer, que de fuppofer qu'il y a auffi un fuc defcendant, ou dont la direction eft en fens oppofé? car il faut bien que la partie poftérieure de l'Infecte reçoive la nourriture qui lui eft néceffaire: il eft donc probable qu'elle la reçoit par des arteres qu'on peut nommer defcendantes, & qui tirent leur origine de la principale artere. J'ai fait remarquer dans mes obfervations fur ces Vers, que la tête eft à l'ordinaire la partie qui Se développe la premiere (2). Le développement eft toujours l'effet de la nutrition: le Germe de la téte reçoit donc à l'ordinaire, le premier, les fucs appropriés au développement. Il paroît qu'il les recevra le premier, s'il les reçoit par ce vaiffeau qui pouffe continuellement le fang vers le bout antérieur. Le Germe de la tête a donc probablement avec ce vaiffeau, des liaisons directes & immédiates que n'a pas le Germe deftiné à produire une queue. Celui-ci nourri probablement par des vaiffeaux defcendans, ne fe développe qu'au bout où ces vaiffeaux tendent. Ceci a quelque analogie avec ce qu'on obferve dans les Arbres: on a vu dans le Chapitre XII de la Ire. Partie, que les branches

(1) Voyez l'Art. CXCII.

(2) Traité d'Infectologie, feconde Partie, Obf. IV.

font nourries par un fuc afcendant, les racines par un fuc def- CHAP. I. cendant. Mais les branches peuvent fe développer fur les racines, les racines fur les branches; il ne faut donc pas trop pref fer cette comparaison.

Conjectures fur cette Ef

pece de Vers d'eau douce,

certaines circonftan

ces, pouf fent une lieu d'une

queue au

tête..

CCLXI. MES Vers aquatiques de la feconde Efpece, ou dont la couleur eft blanchâtre (1), ne fe reproduifent pas avec la même régularité. Si l'on ne fait que retrancher à un de ces Vers la partie antérieure, il en reproduit une nouvelle. Mais fi qui, dans on le partage tranfverfalement en deux ou plufieurs portions, toutes reproduisent une queue à la place où elles auroient dû reproduire une tête. L'efpece de conftance du phénomene ne permet pas de le mettre au rang de ces productions fortuites & monftrueufes que l'on voit quelquefois dans le regne animal. Les Polypes à bras offrent de femblables productions: on voit s'élever fur leur corps des queues furnuméraires, dont ils fe fervent comme de leur bout poftérieur pour fe cram ponner. Mais Mr. TREMBLEY fait affez fentir que c'eft-là un cas extraordinaire, en difant, qu'on ne l'obferve que quelquefois; ce font fes termes (2). Je ne chercherai point à deviner pourquoi les portions de nos Vers blanchâtres pouffent une queue à la place où elles auroient dû pouffer une tête; je ne connois aucun fait qui puiffe m'éclairer là-deffus; je ferai feulement remar-. quer, que cette queue furnuméraire étant aufli bien conformée que celle qui croît au bout poftérieur, il est vraisemblable qu'elle a la même origine. Elle provient d'un Germe qui s'eft déve-. loppé à la place où une partie antérieure auroit dû naître. I femble qu'on puiffe inférer de mes expériences, que cette Ef pece de Ver a été conftruite de maniere qu'il ne fe trouve des: Germes de tête que vers la partie antérieure de l'Infecte, & que par-tout ailleurs il n'y ait que des Germes de queue. Nous

(1) Ibid. Obf. XXII, XXIII.

(2) Mém. fur les Polypes à bras; in 8vo. Tome II, Page 112.

CHAP. 1.

Tentatives pour expli quer la re

des pattes

fe.

ignorons pourquoi l'AUTEUR de la Nature a refferré ici la reproduction dans de telles limites, & pourquoi IL les a fi fort étendues dans d'autres Infectes; mais nous voyons au moins qu'il a mis nos Vers blanchâtres en état de réparer la perte qu'ils étoient le plus fouvent expofés à faire, je veux dire celle de leur partie poftérieure. Ils la tiennent ordinairement hors du limon dans lequel ils font leur demeure: elle eft donc plus expofée à être mangée par des Infectes voraces, que ne l'eft le refte du corps.

A l'égard du développement de la queue furnuméraire, il peut dépendre en partie de l'abfence d'un Germe de tête. Le Germe de queue placé au bout antérieur, reçoit feul les fucs nourriciers qui vont à ce bout pour la nourriture des parties qu'il renferme. Mais tout ceci n'eft que conjecture, & je n'y infifterai pas davantage la ftructure de ces Vers m'eft trop peu connue.

CCLXII. Ce que la reproduction d'une tête & d'une queue eft aux Vers que j'ai multipliés de bouture, la reproduction des production jambes & des cornes l'eft à l'Écreviffe. Nous avons vu que la de l'Ecrevif. patte naiffante fe montre d'abord fous la forme d'un mamelon conique, qui s'alonge de jour en jour. Une membrane affez épaiffe qui recouvre les chairs, & l'extrême délicateffe de celles-ci, ne permettent pas dans ces premiers tems à l'Obfervateur, de diftinguer les parties propres à la patte. Mais lorfqu'elles fe font un peu fortifiées, elles deviennent fenfibles, & en perçant alors l'enveloppe, on met à découvert des articulations très - reconnoiffables. Nous fommes donc fondés à regarder la nouvelle patte comme un nouveau tout organique, dont le Germe exiftoit dans le tronçon de l'ancienne patte. La rupture de celle-ci a donné lieu au développement de ce Germe, en détournant à fon profit des fucs qui fe feroient portés à d'autres parties.

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IL fe préfente ici une difficulté qui mérite que je m'y arrête. J'ai dit ci-deffus, qu'en quelque endroit qu'on coupe la patte, ce qui fe reproduit eft toujours précisément femblable à ce qu'on a retranché. M. de REAUMUR a beaucoup infifté fur cette difficulté, & il convient de l'entendre lui-même.

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DEVONS-NOUS entreprendre, dit-il (1), d'expliquer comment fe font ces reproductions? Nous ne pourrions tout au plus que hafarder quelques conjectures; & quelle foi ajouteroit-on à des conjectures, lorfqu'il s'agit de rendre raifon de faits dont les raifonnemens clairs fembloient prouver l'impoffibilité! Nous dirions bien que vers la partie coupée, il fe porte ,, beaucoup de fuc nourricier, & affez pour former de nouvelles chairs. Mais où trouver la caufe qui divife ces chairs » par diverses articulations, qui en forme des nerfs, des muscles, des tendons différens. Tout ce que nous pourrions avancer & de plus commode, & peut-être de plus raisonnable; ce feroit de fuppofer que ces petites jambes que nous voyons naître, étoient chacune renfermées dans de petits œufs, & qu'ayant coupé une partie de la jambe, les mêmes fucs qui fervoient à nourrir & faire croître cette partie, font employés à faire développer & naître l'efpece de petit Germe de jambe, renfermé dans cet oeuf. Quelque commode après tout que foit ,, cette fuppofition, peu de gens fe réfoudront à l'admettre. Elle engageroit à fuppofer encore, qu'il n'eft point d'endroit de la jambe d'une Écreviffe où il n'y ait un oeuf qui renferme » une autre jambe; ou ce qui eft plus merveilleux, une partie de jambe femblable à celle qui eft depuis l'endroit où cet œuf eft placé, jufqu'au bout de la jambe; de forte que quel» que endroit de la jambe que l'on affignât, il s'y trouveroit » un de ces œufs, qui contiendroit une autre partie de jambe » que l'œuf qui eft un peu au-deffus, ou que celui qui eft un

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CHAP. I.

CHAP 1.

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„, peu au-deffous. Les œufs qui feroient à l'origine de chaque
pince, par exemple, ne contiendroient qu'une pince; près
du bout des pinces, il en faudroit placer d'autres qui ne con-
tinffent que des bouts de pinces. Peut-être aimeroit-on mieux
croire que
chacun de ces oeufs contient une jambe entiere; mais
ne feroit-on pas encore plus embarrassé, lorsqu'il faudroit
rendre raifon pourquoi de chacune de ces petites jambes, il
n'en renaitroit qu'une partie femblable à celle que l'on a re-
tranchée à l'Écreviffe? Ce ne feroit pas même affez de fup-
pofer qu'il y a un œuf à chaque endroit de la jambe d'une
Écreviffe; il faudroit y en imaginer plufieurs, & nous ne
faurions déterminer combien. Si l'on coupe la nouvelle jambe,
il en renait une autre dans la méme place. Enfin, il faudroit
encore admettre que chaque nouvelle jambe eft, comme l'an-
cienne, remplie d'une infinité d'oeufs, qui chacun peuvent
fervir à renouveller la partie de la jambe qui pourroit lui
étre enlevée.

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PEUT-ÊTRE pourtant, que dans chaque jambe de l'Écreviffe il n'y a qu'une certaine provifion de jambes nouvelles, ou de parties de jambes. Comme la plupart des jeunes Animaux ont une petite dent cachée au-deffous de chacune des leurs ; de-là il arrive que fi on leur arrache une dent, il en revient une autre dans la place; mais fi on arrache cette derniere, fa place demeure vuide: la Nature n'en a pas mis d'autres en réferve fous celle-ci. Il feroit curieux de favoir fi de même les Écreviffes ont en chaque endroit de leurs. jambes, une provifion de parties de jambes, qui puiffe s'épuifer. C'eft fur quoi je ne faurois encore rien décider ".

On ne peut affurément fe diffimuler que la régénération des pattes de l'Écreviffe ne préfente, comme toutes les autres reproductions de même genre, des côtés obfcurs; mais

ombres n'éteignent pas la lumiere que réfléchiffent divers faits, &

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