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CHAP. V. Fécondité des Ani

maux.

CCCXXVIII. LES grands Animaux font, en général, bien moins féconds que les petits. Les premiers ne portent qu'un ou deux Foetus; les autres en portent plufieurs, & fouvent des milliers.

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En vain il continua à épier les deux ,, Pipas. Apparemment qu'ils s'étoient tout dit dans cette premiere vifite. Au bout de quelques jours, il prit la Femelle, & s'affura, à l'aide du ,, microfcope, que fes œufs étoient effectivement fécondés. Quand le qua,, tre-vingt-troifieme jour, à compter de celui de la ponte, fut venu, elle mit bas fucceffivement, dans l'efpace de cinq jours, foixante & douze petits ,, Crapauds de fon Efpece, & acheva de laiffer comme en dépôt, au curieux ,, Obfervateur qui l'avoit épiée, le fecret qu'il révele dans cet Ecrit ". Malgré le cas que les eftimables Journalistes paroiffent faire de la découverte de M. FERMIN, je ne diffimulerai point, que ce qu'il rapporte de la premiere opération du Måle, me femble fort fufpect, ou exige fort d'être revu. J'ai peine à croire, qu'il prenne les aufs avec fes pattes, pour les tranfporter fur le dos de la Femelle. Je ne me fens pas plus de difpofition à croire, qu'il fe renverfe fur elle, dos contre dos, &c. Je m'en tiens donc à ce que M. ALLAMAND m'en a rapporté, & j'attendrai pour changer d'avis, que les obfervations de M. FERMIN aient été vérifiées d'une maniere à ne laiffer aucun doute

La génération de l'Opoffum, Animal de l'Amérique, qui a quelque ressem blance avec le Renard, préfente des fingularités que les prétendues matrices externes du Pipa rappellent à mon efprir. Dans cet Animal fi remarquable, & jufqu'à préfent unique en fon genre, les organes de la génération paroiffent doubles chez l'un & l'autre fexe. Mais la particularité la plus finguliere, eft une poche charnue & velue, placée fous le ventre de la Femelle, & qui peut s'ouvrir & fe fermer au gré de l'Animal. Au fond de cette poche, parfemée intérieurement de glandes qui filtrent une humeur particuliere, font placées les mamelles. Dès que les Petits fortent du ventre de la Mere, ils entrent dans la poche, & s'attachent aux mamelles. Leur naiffance eft étonnamment précoce; & l'accouchement de l'Opoffum femble moins un accouchement qu'un avortement. Les Petits n'ont gueres que la groffeur d'une Feve, quand ils viennent au jour. Ainfi la matrice de cet étrange Quadrupede paroit n'avoir été deftinée qu'à procurer le premier développement des Fœtus: un fecond développement doit s'opérer dans la poche, qui eft, en quelque forte, une matrice externe. Elle fert en même tems d'afyle aux Petits, qui s'y réfugient lorfqu'ils font épouvantés; car ils en fortent & y rentrent à volonté

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LES Ovipares font ordinairement plus petits & plus féconds CHAP. V. que les Vivipares. Les Foetus de ceux-ci devoient croître dans la matrice; les Foetus de ceux-là au dehors.

La fécondité de quelques Poiffons à écailles eft merveilleuse. Une Carpe (1), une Perche pondent neuf à dix mille œufs (2), un Merlus vingt mille. La Morue & le Hareng ne font pas moins féconds. On peut juger de la fécondité de la Morue par le grand nombre de vaiffeaux employés annuellement à la pêche de ce Poiffon. Il pond deux fois l'année, & dépofe fes oeufs fous le fable. Ils éclofent ainfi plus fûrement, parce que la Mer ne les disperse point (3). D'épaiffes & nombreuses nuées de Harengs tranfmigrent de l'Océan polaire fur les côtes d'Écoffe & de Hollande, poursuivis par les grands Poiffons qui habitent les profondeurs de cet Océan. Ce petit Poiffon femble être une manne préparée par la PROVIDENCE pour la nourriture des Monftres marins, & pour celle de quantité d'autres Poiffons & d'Oiseaux de Mer. Enfin l'Homme lui fait la plus cruelle guerre: plufieurs milliers d'Hollandois font occupés annuellement à la pêche de ce Poiffon (4). La fécondité de chaque Efpece a été proportionnée aux dangers qui menaçoient les Individus, & aux moyens qu'ils avoient de s'y fouftraire.

LES Araignées, les Papillons, différentes Efpeces de Mou

& la Mere peut les tranfporter par-tout | calculs de LEUWENHOEK, une Morue
avec elle. Voyez Hiftoire Naturelle gé-
nérale particuliere, Tome IX de
l'Edit. in-12. Paris, 1769, page 168
& fuiv.

(1) ++ Le célebre PETIT avoit trouvé par le calcul, qu'une Carpe de grandeur moyenne, contenoit trois cent quarantedeux mille cent quarante quatre œufs ou environ: & s'il en faut croire aux

ordinaire renferme neuf millions trois
cent quarante-quatre mille œufs. Dict.
d'Hift. Nat.

(2) M SCHEFFER, Pifcion Bavarcio
Ratisbonfiona Pentas. Ratisbona, 1761,
in-4to. page 34.

(3) Voyage de D. ULLOA, Tome II. (4) Avantages Défavantages de la France de l'Angleterre, &c.

CHAP. V.

ches, &c. pondent' des centaines d'oeufs; les Gallinfectes, des milliers. J'ai parlé d'une Mouche vivipare, dont la matrice eft une vraie merveille, & qui renferme ving tmille petits (1). Les ovaires de la Reine-Abeille ne font pas moins admirables. Ils font diftribués en deux paquets, qui ne reflemblent pas mal à un écheveau ou à un pinceau, mais les fils de ces écheveaux font auffi déliés que des fils de Vers-à-foie, s'ils ne les furpal fent même en fineffe. Chaque fil eft néanmoins une forte d'inteftin, qui contient une fuite déterminée d'oeufs, dont la grof feur diminue graduellement depuis le bout inférieur de l'ovaire jufques vers fon bout fupérieur. Ici les œufs font d'une telle petiteffe, qu'on a peine à les appercevoir avec le fecours des verres. Ces œufs fi petits, reffemblent pourtant plus aux œufs ordinaires que ceux qui font les plus avancés, dont la forme alongée paroît imiter celle d'un Ver naiffant. L'infatigable SWAMMERDAM a ofé entreprendre de nombrer les fils de chaque écheveau, & il croit en avoir compté au moins cent cinquante, dans chacun defquels il diftinguoit dix-fept oeufs. Il feroit donc parvenu à voir cinq mille & cent oeufs dans les ovaires de la Reine-Abeille (2). Combien étoit plus grand encore le nombre de ceux qui lui ont échappé, puifqu'il eft prouvé qu'une Mere-Abeille donne naiffance à vingt, trente ou quarante-mille Mouches (3).

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EN calculant d'après mes expériences, la fécondité des Pucerons, M. de REAUMUR s'exprime ainfi (4): „, Si on fait un calcul groffier de tous les Pucerons qui peuvent venir d'un feul dans le cours d'une année, il femblera que quand il ne , s'en fauveroit qu'un chaque Hiver, dans un jardin, toutes les feuilles des Arbres de ce jardin ne fuffiroient pas pour donner

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,, des places à ceux qui en naîtroient; la terre méme fembleroit devoir en être couverte. Car fi ou fuppofe à chacun de ces Pucerons du Sureau une fécondité égale à celle des Pucerons du Fufain, que chacun mette de même au jour quatre-vingt-. dix à quatre-vingt-quinze Petits, la premiere génération d'un Puceron fera au moins de quatre-vingt-dix Petits. Si cha,, cun de ceux-ci en donne à fon tour quatre-vingt-dix, la fe-. conde fera de huit mille & cent Pucerons. La troifieme fera, de huit-mille & cent multipliés par quatre-vingt-dix ou de fept cent vingt-neuf-mille Pucerons. Ce dernier nombre doit encore être multiplié par quatre-vingt-dix, pour avoir celui des Pucerons de la quatrieme génération, qui fera foixantecinq millions fix cent dix-mille Pucerons,, & en multipliant encore ce nombre par quatre-vingt-dix, pour avoir les Pucerons de la cinquieme, celle-ci fera trouvée de cinq milliards neuf cent quatre millions neuf cent mille. Nous ne fommes encore qu'à la cinquieme génération; fi nous prenions toutes celles qui peuvent venir d'un Puceron qui, a ,, commencé à accoucher dès le mois d'Avril, & qui ne finit qu'en Novembre, combien pourroit-il donner de généra tions dans le cours de l'année, ou feulement en fix mois? A les mettre au rabais il y en auroit plus de vingt. Or fi », cinq générations ont produit cinq milliards neuf cent quatre millions neuf cent mille Pucerons, quelle innombrable quantité de ces petits Infectes doit venir de vingt généra tions? Mais on eft bientôt rafluré contre les inquiétudes qu'une fi grande fécondité pourroit donner, quand on fait combien d'autres Infectes font occupés journellement à les détruire pour s'en nourrir".

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LA fécondité de quelques Efpeces de Polypes & fur-tout des Polypes à bulbes, eft plus furprenante encore que celle des Pucerons. Nous avons vu, (1) que d'une feule bulbe, il naît en (1) Art. CCI.

CHAP. V.

CHAP. V.

vingt-quatre heures, par des divifions & des fubdivifions fucceffives & graduelles, au moins cent-dix Polypes, qui tous peuvent donner naiffanice dans le même intervalle de tems, une fuite pareille de Polypes.

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M. de BUFFON remarque (1), que les Animaux qui ne produifent qu'un petit nombre de Foetus, prennent la plus grande partie de leur accroiffement, avant que d'être en d'être en état d'engendrer.

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LES Animaux qui multiplient au contraire, beaucoup gendrent avant même que leur corps ait pris la moitié ou même le quart de fon accroiffement.

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L'HOMME, le Cheval, le Taureau font des exemples des premiers, ainfi que les Pigeons & les autres Oifeaux qui ne pondent qu'un petit nombre d'oeufs. Les Poiffons, les Poules font des exemples des derniers (2).

(1) Hift. Nat. Gen. & Part. T. II, page 308.

(2) tt La fécondité des Végétaux eft en général plus étonnante encore que celle des Animaux; & cela devoit bien être, puifqu'ils fervent aux befoins toujours renaiffans de l'Homme & des Animaux. Je me bornerai ici à deux ou trois exemples.

Un grain d'Orge avoit produit cent cinquante-quatre épis, qui contenoient enfemble trois mille cinq cents grains; lefquels produifirent l'année fuivante, un peu plus d'un boiffeau; c'est-à-dire, environ vingt-une livres; lequel donna l'Eté fuivant quarante-cinq autres boiffeaux.

On connoit les curieufes obfervations du célebre DODART, fur la fécondité prodigieufe de l'Orme. Il avoit tenté de la calculer fur un Orme âgé d'environ quinze ans. Il avoit trouvé par des calculs très-modérés, qu'elle étoit de trois cent vingt-neuf mille graines pour la premiere année. Mais l'Orme peut fructifier au moins pendant cent ans: il faut donc multiplier par cent les trois cent vingt-neuf mille graines que cet Arbre peut produire chaque année, & l'on aura trente-deux millions neuf cent mille graines pour la multiplication de l'Orme pendant tout le cours de fa vie.

Que feroit-ce encore, fi, comme le remarque M. DUHAMEL, chacune de ces

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