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CHAP. VIII. Pourquoi en effet, n'exifteroit-il pas des caufes accidentelles, qui agiroient fur le Germe avant la conception, & qui modifie

condation.

furnuméraires exercent les mêmes mouvemens que les doigts ordinaires. Dans l'autre, l'organisation eft plus ou moins viciée, & les doigts furnuméraires n'exercent aucune fonction.

Mais, je le demande, fi le fex-digitifme du premier genre peut fe propager par la voie de la génération, ne faudra-t-il pas que les Partisans les plus déclarés des Germes originairement monftrueux, conviennent qu'il eft des caufes purement accidentelles qui peuvent opérer un fex-digitifme plus ou moins régulier? Car la fécondation feroit ici parfaitement analogue aux caufes purement accidentelles, & il en feroit entiérement de la production d'un ou de plufieurs doigts furnuméraires, comme de la modification que le fperme de l'Ane opére dans le larynx du Cheval. (Art. CCCXXXVI, CCCXL ). Je ne vois point comment on pourroit éluder la force de ce raifonnement. Encore une fois, fi le fex-digitisme régulier se propage par la voie de la génération, il faut abfolument que la liqueur féminale du fex-digitaire fécondateur agiffe fur les mains ou les pieds du Germe de maniere à en multiplier les doigts; ou bien il faudroit admettre, qu'il fe trouve toujours à point nommé dans l'ovaire de la Femme quindigitaire, un Germe à fix doigts aux mains ou aux pieds, ou à tous les deux enfem. ble, que le fperme du fex-digitaire fé

conde; chofe trop abfurde pour être admife.

Ce que je viens de dire de la pro pagation du fex-digitifine régulier, s'ap plique à plus forte raifon à celle du fex-digitifme irrégulier; on le voit affez.

Si donc l'action d'un certain fperme fur le Germe peut y occafioner la production ou le développement d'un ou de plufieurs doigts furnuméraires, pour quoi ne pourroit-il fe rencontrer dans le corps de la Femme des caufes pertur batrices, qui agiroient fur le Germe d'une maniere plus ou moins analogue à celle dont agit le fperme des fexdigitaires, & qui y opéreroient à-peuprès les mêmes effets effentiels ? Le premier fex-digitaire qui apparut dans le Monde, devoit-il fon origine à la fé condation; ou s'il la lui devoit, d'où procédoit l'altération fecrette des organes de la génération de fon Pere quindigitaire, dont le fex-digitisme du Fils avoit dépendu ?

Quoi qu'il en foit, les variétés & les irrégularités de tout genre, qui fe rencontrent dans le fex-digitifme, indiquent affez l'intervention de caufes purement accidentelles. Les fex digitaires de Malte, de Berlin, & du Bas-Anjou en fourniffent des exemples.

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Ici je ne puis m'empêcher de tranf crire un mot du Mémoire de M. MoRAND, que mon Lecteur ne verra pas fans surprise. En parlant de mon ex.

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roient la conformation originelle de quelques-unes de fes parties? Il y a peut-être des modifications monftruenfes, qu'on at

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cités par M. WINSLOW, pour réfuter le fyftême de la confufion des Germes, il n'en avoit point trouvé ,, de plus frappant que celui de ce ,, fex-digitaire; & il eft vrai de dire, ,, ajoute M. MORAND, que fi c'est une pierre d'achoppement pour cette hypothese, c'est en même tems un argument victorieux en faveur des Germes originairement monftrueux. Page 145. Et ailleurs je ne ferois pas étonné, ,, que d'après le détail que j'ai donné de ma diffection, M. BONNET vint à adopter l'opinion des Monftres ori,, ginairement monftrueux. Page 147". Je l'adopterois affurément, fi les preuves qu'on en produit me paroiffoient démons

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plication du fex-digitifme qui fe pro- | digitaire, & qu'il avoit produite à l'Apage (Art. CCCLVI.), cet Anatomifte cadémie :,, que de tous les exemples dit: que je tâche d'expliquer la forma tion des Monftres par l'évolution irré guliere des molécules organiques. 11 ajoute, que ce font mes termes, & qu'il met prefque dans la même cathégorie les molécules organiques & les formes plastiques d'ARISTOTE. ( Page 146. ). Rien affurément, ne prouve mieux que ce paffage, que M. MORAND ne s'étoit pas donné la peine de faifir la fuite, pourtant très-claire, de mes principes, & qu'il ne m'avoit lu que du pouce. Il avance, que ce font mes termcs ; & ces termes ne fe trouvent point dans tout mon Livre, & on fent bien qu'ils ne pouvoient s'y trouver. Je parlois des molécules de la liqueur feminale, & il n'en avoit pas fallu davantage à l'Aca-tratives. Mais MM. WINSLOW & Modémicien, pour lui faire croire que je me fervois des molécules organiques pour rendre raifon des Monftres. S'il avoit bien voulu donner le plus léger degré d'attention à l'Article de mon Livre qu'il paroit avoir eu fous les yeux, il n'auroit pas confondu les molécules dont je parlois, avec les molécules organiques, que j'avois fi fouvent com. battues & qu'il lui étoit très-permis de mettre prefque dans la même cathé gorie que les formes plaftiques d'ARIS

TOTE.

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Au refte, M. MORAND remarque au fujet de la diffection qu'il avoit faite des doigts furnuméraires de fon fexTome III.

RAND avoient-ils affez réfléchi fur la conféquence qui découle fi immédiatement du fex digitifme qui fe tranfmet par la voie de la génération? Ces Enfans nés d'une Mere quindigitaire, & qui tenoient leurs doigts furnuméraires d'un Pere fex-digitaire, étoient-ils originairement monftrucux? La liqueur fé. minale du Pere avoit donc donné naiffance aux doigts furnuméraires des Enfans. Une caufe purement accidentelle avoit donc été capable d'occafioner ces doigts furnuméraires, qu'on nous donne comme un argument démonstratif en faveur des Monftres originels? La liqueur féminale ne crée rien ; je l'ai assez Y y y

CHAP. VIII.

CHAP. VIIL

Individus dont les vifceres font tranfpofés. Remarques fur cette tranfpofition.

tribue à la fécondation ou à des caufes concomitantes, & qui leur font de beaucoup antérieures (1).

CCCLVIII. Il existe une forte d'Hommes, que M. LEMERY ne vouloit pas, avec raifon, que l'on qualifiât de Monftres, & que les Adverfaires des caufes accidentelles lui oppofoient avec confiance. Ici la conformation extérieure & intérieure eft précifément la même que chez les autres Hommes, & ces prétendus Monftres s'acquittent de toutes les fonctions propres à P'Efpece. Mais leurs vifceres femblent avoir été tranfpofés; le cœur & la ratte font à droite, le foie eft à gauche, &c. Qu'on imagine, dit M. de FONTENELLE (2), deux maifons parfaitement femblables en tout, hormis que l'une est tournée de façon, que l'efcalier eft à droite de ceux qui entrent, & dans l'autre à la gauche ; la mode fera, fi l'on veut, » pour l'efcalier à droite. Mais l'autre maifon ne laiffera pas d'être abfolument auffi réguliere, auffi commode, auffi bien entendue "

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prouvé. Elle ne crée donc pas des doigts
furnuméraires; & puis qu'un fex-digi-
taire fait des fex-digitaires, il faut bien
que la liqueur féminale puiffe produire
dans les mains & dans les pieds du
Germe quindigitaire, certaines modifi-
cations accidentelles, d'où réfulte le
fex-digitifme; & ce font ces modifica-
tions que j'avois tenté d'expliquer à
l'occafion de la Famille de Malte.

(1) L'idée très-naturelle que je
préfentois dans cet Article, n'étoit point
venue à l'efprit des Anatomiftes, qui
ont traité de la formation des Monftres.
Je la croyois à moi; mais je vois par
un paffage du Traité des Monftres de
M. de HALLER ( Oper. min. Tome III,

page 142, 1768. ), que l'ingénieux BLONDEL avoit eu la même idée. Je tranfcris ici ce paff ge en original, parce qu'il fembleroit indiquer que M. de HALLER lui même n'étoit pas éloigné de cette opinion. Neque difputo, nam ex fagacis BLONDELLI conjectura, pref fio non in proxima matre qua fatun corruptum de utero edit,fed in aliqua avia ante millenos annos fabricam corruperit, que opinio fere ad noftram redit, cum ante fecundationem alienam. fabricam admittat. Voyez mon Ecrit fur l'accroiffement des Germes avant la fécondation, dans l'hypothefe de l'mboitement. Journ: de Phyf. Mars 1774(2) Hift. de l'Acad. 1740.

AINSI une pareille tranfpofition ne change rien du tout à CHAP. VIII. l'effence de l'économie organique, ni par conféquent aux fonctions vitales. Elle ne fauroit donc être envifagée comme une vraie monftruofité. Auffi le Sujet où elle a été démontrée pour la premiere fois, avoit vécu foixante & douze ans, fans qu'il fe fût jamais douté de la fingularité que fon Corps renfermoit.

Il n'avoit pas été marié, & l'Hiftorien de l'Académie ajoute à cette occafion, qu'il auroit été curieux de favoir fi fes Enfans auroient eu les parties intérieures tranfpofées comme lui, ou du moins fi fes Parens les avoient eues. On voit bien que fuivant mes idées, une femblable tranfpofition n'eft pas de nature à paffer du Pere dans fes Enfans. La liqueur féminale ne peut pas plus opérer de tels changemens, qu'elle ne peut produire un cœur ou un foie.

CET exemple de tranfpofition générale n'est point unique (1), & fans doute que ces fortes de cas fe multiplieroient plus qu'on ne penfe, fi le nombre des Cadavres qu'on difféque, n'étoit pas fi difproportionné à celui des Cadavres qu'on ne difféque point. M. SUE, qui donne le détail & la figure d'une femblable tranfpofition, eft fi convaincu de la fréquence du cas, qu'il exhorte les Médecins & les Chirurgiens à s'en affurer avant que d'agir, & il leur indique les moyens de la reconnoître. Il eft, ajoute-t-il (2), des maladies internes

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& il fe

rencontre à faire des opérations chirurgicales, où le Médecin & le Chirurgien s'expofent à des méprifes, s'ils ne font, ,, avant de traiter les maladies, ou de faire les opérations, la recherche & l'examen d'un pareil changement ".

(1) Voyez l'Hiftoire de l'Académie avant. 1699, en François, Tome II, page 44, année 1688; & le Recuei des Mémoires avant 1699, Tome X, page 731.

(2) Mémoires des Savans Erangers, publiés par l'Académie des Sciences de Paris, Tome I, page 294, 1750.

Y y y 2

CHAP. VIII.

Maladies organiques; derniere rai

vour des Monftres par acci dent.

COMME les Germes dont toutes les parties ont été originairement tranfpofées, n'en donnent pas des Touts organiques moins parfaits, moins réguliers, moins fains, M. LEMERY admettoit volontiers dans les œufs cette tranfpofition originelle, & elle lui paroiffoit, ainsi qu'à M. de FONTENELLE, une preuve inconteftable de la LIBERTÉ DIVINE.

CCCLIX. ENFIN, s'il eft dans l'adolefcence & même dans l'âge viril, des maladies qui peuvent rendre difformes ou monffon en fa- trueufes différentes parties du Corps humain, c'eft une derniere raifon en faveur des Monftres par accident, & M. LEMERY n'a pas manqué de la faire valoir. Il cite fur ce fujet des exemples de cerveaux, de membranes, d'épiploons, &c. pétrifiés, en tout ou en partie, de courbures extraordinaires de l'épine, de cornes qui ont pouffé en différens endroits du corps (1). Ce dernier cas n'eft pas le moins remarquable: l'on en lit un détail dans les Tranfactions Philofophiques (2), qui pafferoit pour fabuleux s'il n'étoit attefté par des témoins irréprochables. On nous affure, qu'à l'âge de trois ans, une Fille commença à pouffer des cornes de divers endroits de fon corps, & en particulier des jointures & des articulations. Ces cornes fe multiplierent d'année en année, & à l'âge de treize ans elle en étoit toute hériffée. Les mamelles n'en étoient pas même exemptes. Elles reffembloient par leur bafe à des verrues, & par leur extrémité à de véritables cornes. Quelques-unes étoient contournées à la maniere de celles du Bélier. Il y en avoit une à l'extrémité de tous les doigts des mains & des pieds, & fa longueur étoit de deux à trois pouces. Enfin, quand quelques-unes de ces cornes venoient à tomber, il en renaissoit d'autres à leur place (3).

(1) Mém. de l'Acad. 1740.
(2) Année 1685. Obfervations curieu
fes fur toutes les parties de la Phyfi
que. Tome I, page 330.

(3) Voyez un Recueil de quantité d'exemples analogues dans la Bibliotheque des Sciences, Tome XVI, premiere Partie. 1761, page 154 & fuiv.

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