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mouvans, dont la groffeur diminue à mefure que la décompo- CHAP. Vill fition augmente.

CHAPITRE VII I.

Examen du nouveau Systême comparaison de ce système avec celui des germes.

CXXII. IL y auroit bien des réflexions à faire fur ce fystéme.

Des particules organiques, vivantes, actives, communes aux végétaux & aux animaux, & qui ne font cependant ni végétal ni animal; une force qui n'a rien de femblable à l'impulfion; un moule extérieur & intérieur, où les particules organiques vont fe mouler, & d'où elles fent renvoyées à un dépôt commun, pour représenter enfuite ce moule en petit; des rapports en vertu defquels ces particules fe réuniffent pour former un tout organique; ce font là des fuppofitions avec lefquelles il n'eft pas facile de fe familiarifer. Je n'infifterai cependant pas là-. deffus. Ce ne font peut-être que des difficultés plutôt que de véritables objections. Je me contenterai de rappeller à l'efprit de mes lecteurs l'étonnant appareil de fibres, de membranes, de vaiffeaux, de ligamens, de tendons, de muscles, de nerfs, de veines, d'arteres, &c. qui entrent dans la compofition du corps d'un animal. Je les prierai de confidérer attentivement la structure, les rapports & le jeu de toutes ces parties. Je leur demanderai enfuite, s'ils conçoivent qu'un tout aufli compofé, auffi lié, auffi harmonique, puiffe être formé par le fimpleconcours de molécules mues ou dirigées fuivant certaines loix. à nous inconnues. Je les prierai de me dire s'ils ne fentent point la néceffité où nous fommes d'admettre que cette admirable machine a été d'abord deflinée en petit par la même main qui a tracé le plan de l'univers. Pour moi, j'avoue ingénument que

Principales: fources des

objections qu'on peut

former contre le fyftême des mo

lécules

ganiques.

or

CHAP. VIII. je n'ai jamais conçu que la chofe puiffe être autrement. Lorfque j'ai voulu eflayer de former un corps organifé fans le fecours d'un germe primitif, j'ai toujours été fi mécontent des efforts de mon imagination, que j'ai très-bien compris que T'entreprife étoit abfolument au-deffus de fa portée.

Comparai. fon du nou

veau fyftê me avec le

fyftéme des anciens & celui des Natures plaftiques.

Objections contre le fyftéme des molécules organiques.

CXXIII. Les anciens qui ne pouvoient pas être d'auffi bons philofophes que nous, croyoient que les Infectes naissoient de la corruption. Ils fuppofoient que les molécules de la chair pourrie d'un Taureau ou d'un Ane, venant à fe réunir produifoient une Abeille, un Scarabée, &c. Nous nous fommes fort moqués de cette Phyfique; que lui manquoit-il cependant, pour paroître moins groffiere? Une forme plus fyftématique. Il falloit organifer ces molécules, les rendre vivantes & actives; il falloit les faire marcher avec regle & fuivant certaines loix.

Des philofophes plus éclairés & plus profonds que les anciens ont joint à la matiere une ame ou une vertu plastique, chargée de l'organifer. Ils ont penfé que les Vers du corps humain, & ceux qu'on trouve dans l'intérieur des plantes étoient dûs à cette vertu. Ces philofophes étoient bien près de la force productrice du nouveau fyftême,

CXXIV. MAIS fi l'on vouloit approfondir d'avantage le nouveau fyftême, on demanderoit, 1°. Comment les particules organiques, fuppofées inaltérables, peuvent être moulées? 2°. Comment ces particules étant renvoyées de toutes les parties qui ont pris leur parfait accroiffement, & n'y ayant point été admifes, y ont pourtant pris des formes propres à repréfenter en petit ces mêmes parties? 3°. Comment les individus qui proviennent de l'accouplement de deux individus d'efpeces ou de formes effentiellement différentes, ont des organes qu'on ne trouve ni dans le pere ni dans la mere? Tel eft,

par

par exemple, le cas des mulets chez les Abeilles. 4. Com- CHA. VIII. ment un mâle ou une femelle, ou tous les deux enfemble, mutilés dans quelque partie effentielle & unique engendrent des animaux à qui il ne manque rien (1)?

CXXV. ON m'objectera fans doute les obfervations fur l'accroiffement du Poulet dans l'enf, & celles fur la génération des Biches, par lefquelles il paroît que les parties d'un Corps organifé, font formées les unes après les autres. Dans le Poulet par exemple, obfervé pendant les premiers jours de l'incubation, le cœur paroît extérieur au corps de l'animal, & d'une forme très-différente de celle qu'il aura par la fuite.

MAIS la foibleffe de cette objection fe fait aifément fentir. On veut juger du tems où les parties d'un Corps organifé ont commencé d'exifter, par celui où elles ont commencé de devenir fenfibles. On ne confidere point que le repos, la petiteffe & la tranfparence de quelques-unes de ces parties peuvent nous les rendre invifibles, quoiqu'elles exiftent réellement.

CXXVI. Au refte, je confens qu'on ne regarde point le nouveau fystême sur la génération comme abfurde. Les voies de la Nature me font trop peu connues pour ofer prononcer fur les moyens qu'elle a jugé à propos de choifir. Je trouve ce fyftême ingénieux. Il me paroît feulement, que celui qui établit que les Corps organifés ont exifté originairement en

(1)†† On verra dans la note que j'ai ajoutée à la fin de ce Chapitre, les preu ves les plus directes & les plus démonf tratives de la fauffeté des molécules organiques. Et comme le fyftême dont il s'agit, repofe principalement fur l'exif tence de ces molécules, les preuves Tome III.

qui démontrent leur non-existence dé-
montrent par cela même la fauffeté du
fyftême auquel elles fervent de base.
Une pure méprife, facile à reconnoi-
tre, avoit donné naiffance à l'ingénieux
Roman.

K

Réfutation des confe

quences que les partifans de l'épigénee tirent des obfervations

de MALPIGHI fur le Poulet, & de celles d'HARVEY

fur les Bi

ches.

Le nouveau fyftéme,

moins pro

bable que celui des

germes.

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CHAP VIII. petit dans les germes, & que la génération n'eft que le commencement du développement de ces germes, eft un fyftème plus probable, plus facile à faifir, & fujet à moins de difficultés ou d'inconvéniens.

Remarques fur l'emboitement: ma

niere de juger de fa poffibilé.

CXXVII. Je m'en fuis déja expliqué: je ne prendrai point parti entre l'hypothefe qui répand les germes par-tout, & celle qui les emboite les uns dans les autres. Ces deux hypothefes ont chacune leur probabilité: mais il ne faut pas fuppofer un emboitement à l'infini, ce qui feroit abfurde. La divifibilité de la maticre à l'infini, par laquelle on prétendroit foutenir cet emboitement, eft une vérité géométrique, & une erreur phyfique. Tout corps eft néceffairement fini; toutes fes parties font néceffairement déterminées: mais cette détermination nous elt inconnue. Nous ignorons abfolument quels font les derniers termes de la divifion de la matiere; & c'eft cette ignorance même qui doit nous empêcher de regarder comme impoffible l'enveloppement des germes les uns dans les autres. Nous n'avons qu'à ouvrir les yeux, & à promener nos regards autour de nous, pour voir que la matiere a été prodigieufement divifée. L'échelle des Etres corporels eft l'échelle de cette divifion. Combien la Moififfure eft-elle contenue de fois dans le Cedre, la Mitte dans l'Eléphant, la Puce d'eau dans la Baleine, un grain de fable dans le globe de la terre, un globule de lumiere dans le Soleil? On nous prouve qu'une once d'or peut être affez fous-divifée par l'art humain pour former un fil de quatre-vingt à cent licues de longueur (1): on nous montre au microfcope des animaux dont plufieurs milliers n'égalent pas enfemble la groffeur du plus petit grain de pouffiere: on fait cent obfervations de même genre, & nous traiterions d'ab

(1) tt Je ne difois pas affez: M. de REAUMUR avoit prouvé, que l'once d'or pouvoit fournir un fil, qui confidéré fous toutes fes dimenfions, éga

loit, en longueur quatre cent quarante quatre lieues. Voy. Mém. de l'Acad. 1713, Leçons de Phyfique; Tom. I, pag. 40,

furde la théorie des enveloppemens! Il y a plus, on obferve, pour ainfi dire à l'oeil, cet enveloppement. On découvre dans un oignon d'hyacinte jufques à la quatrieme génération. Et ce qu'il y a de très-remarquable, eft que les parties de la fleur, font celles qu'on diftingue le mieux dans la troifieme & quatrieme génération: le volume de ces parties paroît incomparablement plus grand que celui de toutes les autres parties prifes enfemble (1).

NE jugeons pas de la matiere uniquement par les rapports plus ou moins prochains qu'elle a avec notre corps. Évitons de nous fervir de cette mefure. Des Hommes dont la taille n'excéderoit pas celle de ces animaux qui nagent dans les infufions, concevroient peut-être, plus facilement que nous, l'emboîtement dont il eft ici queftion. Ils feroient en quelque forte plus près de cette région d'infiniment petits.

CHAP. VIII.

Touts of .

fidérés dans Thypothefe

tement.

CXXVIII. POUR moi j'aime à reculer le plus qu'il m'eft poffible, les bornes de la création. Je me plais à confidérer ganifes concette magnifique fuite d'Etres organifés, renfermés comme autant de petits mondes, les uns dans les autres. Je les vois de l'embois'éloigner de moi par degrés; diminuer fuivant certaines proportions, & fe perdre enfin dans une nuit impénétrable. Je goûte une fecrette fatisfaction à contempler dans un gland le germe d'où naîtra, dans quelques fiecles, le Chêne majestueux, à l'ombre duquel les Oifeaux de l'air & les bêtes des champs. iront fe réjouir. J'ai encore plus de plaifir à découvrir dans le fein d'ÉMILIE le germe du Héros qui fondera dans quelques milliers d'années un grand empire, ou plutót celui d'un Philofophe qui découvrira alors au monde, la caufe de la pefan

(1) + Je tenois cette obfervation de feu mon illuftre compatriote, M. CA

LANDRINI, qui l'avoit faite lui-même,
& qui ne m'en avoit pas fourni les détails.

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