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main, & par la médiation de celui-ci fur toute autre matiere, jufqu'à un dégré borné ... Cela eft très-poffible, puifque cela eft très-concevable; c'est ce qui nous refte à examiner en répondant aux nouvelles objections du Matérialiste, contre la nature de l'ame ; contre fes facultés & fes fonctions.

CHAPITRE VIII. ⠀

Le Matérialiste employe l'harmonie préétablie en faveur de fon fyftême.

E principe, répond le Matérialifte en infiftant, par lequel vous prétendez établir l'action de l'ame fur le corps, par une conféquence tirée de la nature effentiellement active de l'efprit, eft fi peu fondée que M. Leibnitz, ce fçavant Philofophe & a démontré, qu'il n'y avoit aucune forte d'union entre le corps & l'ame; & voici fa démonftration.

a cru

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» Une ȧme, dit-il, doit avoir par » elle-même une certaine fuite de » pensées, de défirs, & de volon»tés (a)... Un corps, qui n'eft qu'une » machine doit avoir auffi " par lui» même une certaine fuite de mou» vemens, qui feront déterminés par la » combinaifon de fa difpofition machi»nale, avec les impreffions des corps » extérieurs L'arrangement étant » ainfi fait de part & d'autre, s'il fe » trouve une ame & un corps, tels » que toute la fuite des volontés de » l'ame, & toute la fuite des mouve» mens du corps, fe répondent exac»tement; & que dans l'inftant, par » exemple, que l'ame voudra aller dans » un lieu, les deux pieds du corps fe » meuvent machinalement de ce côté» là; cette ame & cê corps auront un » rapport, non pas par une action réelle » de l'un fur l'autre, mais par la cor

refpondance perpétuelle de leurs opé» rations féparées de l'un & de l'au» tre.... Et il en faut dire autant

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(a) Hift. de l'Académ, des Scien. T. 9.

y

» ajoute M. Leibnitz, de tout ce qu'il » y a eu jamais, & de tout ce qu'il » y aura jamais d'ames & de corps »unis ». Defcartes n'a point cru qu'il eût de coinmunication véritable entre le corps & l'ame; il a enfeigné qu'il n'y en a qu'une apparente, de laquelle le moteur univerfel eft le médiateur... D'où il réfulte clairement, felon ces Philofophes, que comme il n'y a qu'un agent dans la nature, il n'y a conféquemment qu'une action, qui eft celle de l'Etre univerfel, modifiée à l'infini.... Ainfi vous voyez que tous vos raifonnemens, pour prouver que la fubftance fpirituelle eft feule, &, à l'exclufion de toute autre, effentiellement active; pour prouver que l'ame humaine eft unie au corps, & qu'elle agit fur tout le méchanisme par une action propre à fa nature;.pour prouver que la matiere eft effentiellement incapable d'action; vous voyez, dis-je, que tous vos raifonnemens n'ont rien moins que de la folidité, & vos principes rien moins que de la certitude.

Nous répondons que M. Leibnitz ayant nié la poffibilité de l'action de

l'ame humaine fur fon méchanisme de même que fon union avec lui; il étoit naturel qu'il imaginât des moyens de conciliation pour expliquer le commerce, du moins apparent, qui fe trouve entre ces deux fubftances fi différentes en nature. Mais fon hypothese toute ingénieufe qu'elle eft, fouffre de très-grandes difficultés, & il .ne nous paroît pas qu'elle puiffe fe foutenir, ni en Métaphyfique, ni en Morale.

Premiérement, à l'égard de l'impoffibilité prétendue de l'action de l'ame fur le corps, nous répétons, qu'il n'eft pas plus impoffible à Dieu d'accorder à l'ame humaine la faculté d'agir fur fon corps, & par la médiation de celui-ci fur d'autres corps, que de lui donner la puiffance d'agir fur elle-même, par la volonté & la détermination. On conviendra fans peine que cette faculté, qui nous donne une grande & jufte idée de la toute-puiffance & de la fageffe infinie du Créateur vaut bien la faculté d'agir fur une machine. Ceux qui ont nié la poffibilité de l'action de l'ame fur fon méchanisme, & de fon union réelle avec lui, ont trop

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fait d'attention à la nature des corps, & n'en ont pas fait affez à la nature de l'efprit, & à la toute-puiffance de l'Etre fouverain.

On ne conçoit point, difent-ils, par quelles extrémités, deux fubstances effentiellement diftinguées, peuvent fe toucher, pour agir l'une fur l'autre & être unies. Auffi ne fe touchentelles point, leur répond-t-on, par aucunes extrémités, & n'agiffent-elles pas l'une fur l'autre ; ou du moins, ce l'une fur l'autre, qui eft vrai à l'égard de l'efprit, ne l'eft nullement à l'égard du corps... La matiere n'ayant point d'action qui foit à elle, le corps ne peut agir, ni fur lui-même, ni fur aucune autre chofe; mais il ne s'enfuit -point du tout de-là, que l'ame në puiffe agir fur lui, indépendamment des extrémités par une action qui foit propre à fa nature... On ne le conçoit pas; donc cela eft impoffible... Mais conçoit-on mieux par quelles extrémités l'Esprit fuprême peut agir fur la matiere pour lui imprimer le mouvement, &, par les directions de celui-ci, l'ordre ? C'eft, répondra-t-on, par un effet

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