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Il s'adreffe enfuite à la ville de Boftre en particu- AN. 36, lier, & aprés avoir raporté les paroles que l'évêque lui avoit écrites, il ajoûte: Vous voyez, comme il dit, que vôtre foûmiffion ne vient pas de vous: mais de lui, qui vous retient par fes exhortations. Chaffez-le donc de la ville, comme vôtre accufateur; & pour vous, vivez en paix les uns avec les autres: que ceux qui font dans l'erreur, n'attaquent point ceux qui fervent les dieux legitimement fuivant la tradition de tous les fecles. Et vous ferviteurs des dieux, ne ruinez & ne pillez point les maisons de ceux qui s'égarent plûtôt par ignorance que par choix. Il faut inftruire les hommes & les perfuader par raifon : : non par les injures & les tourmens corporels. Je le dis encore, & je le repete plu fieurs fois, que l'on ne maltraite point le peuple des Galiléens: ceux qui fe trompent dans les plus grandes chofes, font plus dignes de pitié que de haine. Ceux-là fe puniflent eux-mêmes qui quittent les dieux pour s'adreffer aux morts & leurs reliques. Cette lettre eft dattée d'Antioche le premier d'Aouft 362.

Antioche.
Amm.xxii.

C. II.

Julien fit venir à Antioche Artemius duc d'E- XXII. gypte, accusé par les Alexandrins de crimes a- Martyrs troces, c'est à dire d'avoir brifé plufieurs idoles du temps de Conftantin, & d'avoir presté main forte à George l'évêque Arien, pour dépouiller Theod. 111. les temples de leurs ornemens & de leurs ri-c. 18. cheffes. L'empereur ne fe contenta pas de pri- Jul. ep. 10. ver Artemius de fes biens, il lui fit couper la tefte; & l'églife l'honore entre les martyrs le vingtiéme d'Octobre. Il punit auffi quelques- Theod. 111 uns de fes gardes, que l'on nommoit Scuta-15 riens, à caufe des écus qu'ils portoient: entre autres Juventin & Maximin, qui s'étoient plaints trop librement des pieges qu'il tendoit aux Chré tiens, pour les engager à l'idolatrie. Car il avoit

C 2

infe

AN. 362. infecté les fontaines de la ville d'Antioche & du bourg de Daphné, y faifant jetter quelque liqueur offerte aux idoles; & il faifoit arrofer de cette eau tout ce qui fe vendoit au marché: le pain, la viande, les fruits, les herbes, tous les vivres. Les Chrétiens ne pouvoient s'empêcher d'en gemir, & ne laiffoient pas d'ufer de ces viandes, obfervant le precepe de l'apôtre, qui dit: Mangez de tout ce qui fe vend au 1.Cor.x.25. marché, fans vous informer de rien.

Daniel.

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fes. 70.

Un jour donc dans un repas, Juventin & Maximin déplorerent avec chaleur ces profanations, & employerent ces paroles des compagnons de Daniel: Vous nous avez livrez à un foi apoftat le plus injufte du monde. Quelqu'un de ceux qui mangeoient avec eux ayant raporté ces paroles à l'empereur: il fit venir devant lui Juventin & Maximin, & leur demanda ce qu'ils avoient dit. Ils profiterent de l'occafion, & répondirent hardiment: Seigneur ayant été nourris dans la pieté & dans les louables maximes de Conftantin & de fes enfans, nous gemiffons de voir à prefent tout rempli d'abominations, & toutes les viandes fouillées de facrifices profanes. Nous nous en fommes plaints en particulier, & nous nous en plaignons en vôtre prefence: c'eft la feule chofe qui nous fait peine fous vôtre regne. L'empereur ayant ouï ce difcours, les fit fraper & tourmenter jufques à la mort, publiant pour caufe de leur fupplice, non pas la religion, mais l'infolence de leurs paroles. L'églife d'An ioche en celebra la memoire le cinquiéme de Septembre, qui fut apparemment le jour de leur martyre: & nous les honorons encore le vingt-cinquiéme de Janvier. C'eft ainfi que les foldats Chrétiens obéïfAng. in pffoient à Julien, tout infidéle & tout apoftat qu'il 124. n. 7. étoit, comme ténioigne S. Augustin qui vivoit

Martyr.

Rom.

alors,

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alors. Quand il vouloit, dit-il, leur faire ado- AN. 362.
rer les idoles, ils preferoient la loi de Dieu à
fes ordonnances: quand il leur commandoit de
marcher contre les ennemis, oils obéiffoient
promptement.

La nouvelle de la mort d'Artemius étant ve

XXIII.

Maffacre

nue à Alexandrie, le peuple idolâtre qu'il avoit de George menacé de maltraiter, s'il revenoit avec la mê- d'Alexanme puiffance, étant délivré de cette crainte, tour- dric.

c. 7.

na fa furie contre le faux évêque George. Il Amm. s'étoit rendu odieux à tout le monde. Aux Ca- XXII.c.11. Sozom. V. tholiques par la perfecution qu'il leur avoit fait fouffrir fous Conftantius: aux Ariens, en les Philift.v11. forçant de foufcrire à la condamnation d'Aëtius: 6.2 Sup.liv. aux payens par le pillage de leurs temples, & par x111..34. les vexations qu'il exerçoit indifferemment contre toutes fortes de perfonnes. La derniere fois qu'il revint de la cour, paffant prés d'un beau temple du Genie, accompagné à fon ordinaire d'une grande multitude, il tourna les yeux vers ce tem ple, & dit: Combien ce fepulchre durera t-il? Ces paroles furent un coup de foudre pour les payens, qui craignirent qu'il ne ruinât encore cet édifice. Mais voicy ce qui mit le comble à leur fureur.

on

Il y avoit à Alexandrie un lieu abandonné de- Socr. 111. puis long-temps & plein d'immondices, où les c.2. Sok. Ve payens avoient autrefois immolé des hommes," 7° dans les ceremonies de Mithra. Conftantius l'avoit donné à l'église d'Alexandrie, comme une place inutile; & George la fit netoyer, y voulant bâtir une églife. En y travaillant, trouva fort avant fous terre un lieu fecret, où les myfteres des payens étoient cachez: c'est à dire des idoles & des inftrumens pour leurs ceremonies, qui parurent étranges & ridicules à qui les virent. On y trouva auffi quantité de crânes d'hommes & d'enfans , que l'on difoit avoir été tuez, pour connoître l'avenir par leurs

C 3

ceux

en

AN. 362. entrailles, & pour forcer les ames à revenir par des ceremonies magiques. Les Chrétiens ayant fait cette découverte, prirent foin d'expofer en public les myfteres ridicules des payens. & les marques de leur cruauté. Mais les payens ne pouvant fouffrir cet affront, & tranfportez de colere, s'armerent de tout ce qui leur tomba fous la main, fe jetterent fur les Chrétiens, en blefferent & en firent mourir plufieurs en differentes manieres: les uns à coups d'épée, les autres à coups de pierre ou de bâton: ils en étranglerent avec des cordes, ils en crucifierent, au mépris de la croix: les perfonnes les plus proches ne furent pas épargnées, le frere s'arma contre fon frere, le pere contre ses enfans.

Amm.

Les Chrétiens cefferent de purifier le temple de Mithra; mais les payens fe jetterent fur George, & le tirerent de l'église avec de grands cris. Ils fembloient le devoir tuer fur le champ: toutefois ils fe contenterent de l'emprisonner. Peu XXII. II. de temps aprés, ils accoururent un matin à la prifon, & l'en ayant tiré, le traînerent par la ville, les jambes écartées, le foulant aux pieds, & lui taifant divers outrages. Ils prirent avec lui Draconce maître de la monoye, & Diodore qui avoit le rang de comte, & les traînerent auffi par les pieds avec des cordes: l'un pour avoir renversé dans la maifon de la monoye un autel dreffé depuis peu l'autre, parce qu'il fe Theodoret, donnoit la liberté de couper les cheveux longs in Levit. des enfans, à qui on les laiffoit croître par une fuperftition payenne, pour les confacrer enfuite aux faux Dieux, en les coupant. Aprés que George, Draconce & Diodore eurent été ainfi tourmentez tout le jour, on mit leurs cadavres déchirez fur des chameaux, & on les mena au bord de la mer: où les ayant brûlez à la halte, on jetta les cendres dans l'eau de peur

XXVIII.

que

que les Chrétiens ne les honoraffent comme mar- AN. 302. tyrs. Mais il n'y avoit rien de femblable à craindre, du moins pour George, il n'étoit que trop Epip. her. notoire que la religion n'étoit pas la caufe de fa 76. n. le mort, & que fes crimes l'avoient rendu execrable à tout le monde. Toutefois les Ariens trouverent dans cette mort dequoi calomnier S. A thanafe & les catholiques.

Sozom. Velr

7. Philoft

VII.C. I.

XXIV,

Amm.

Julien ayant apris cette fedition, entra en grande colere, & témoigna la vouloir punir a Lettres de vec la derniere rigueur : mais il fut appaifé par Julien. fes proches, particulierement par le comte Jur xx11.6.11. lien fon oncle, qui avoit été prefet d'Egypte. Il Sox. và 0.7. fe contenta donc de leur faire une severe reprimande, par une lettre qu'il leur écrivit en ces termes: Quand vous n'auriez pas de refpect pour Epift. 1 Alexandre votre fondateur, ou plutôt pour le grand dieu Serapis: comment n'avez-vous point eu d'égard au devoir commun de l'humanité, & à ce que vous me devez; à moi, dis-je, à qui tous les dieux, & principalement le grand Scrapis, ont donné l'empire de l'univers? Au lieu de me referver la connoiffance de vos injures, vous vous êtes laiffé furprendre à la colere; & vous n'avez pas eu honte de commettre les mê mes excés, qui vous rendoient vos ennemis fi justement odieux. Il raporteles fujets de plaintes qu'ils avoient contre George, & ajoûte: Etant donc irrité contre cet ennemi des dieux, au lieu de le pourfuivre en juftice, vous avez profané võrre ville facrée. Et enfuite: Des citoyens ofent déchirer un homme comme des chiens, & ne craignent point d'étendre vers les dieux leurs mains fouillées de fon fang? Mais George meritoit d'être ainfi traité. J'ajoûterois peuteftre, qu'il meritoit un châtiment plus rigou reux: mais vous n'en deviez pas eftre les executeurs. Vous avez des loix, que vous devez.

C 4

ho

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