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LA NÉRÉ ï D E.

Sa mère Néphélé (1) ne devoit-elle pas la

secourir dans sa chûte?

NEPTUN E.

Elle le devoit sans doute; mais le destin est plus puissant que Néphélé.

DIALOGUE X.

IRIS ET NEPTUNE.

IRIS.

CETTE isle errante, Neptune, qui, détachée de la Sicile, nage sous les eaux, Jupiter veut que tu la fixes; il veut que tu la fasses paroître au-dessus des flots, et qu'arrêtée sur des fondements inébranlables au milieu de la mer Egée, elle devienne visible (2): car ce dieu en a besoin.

NEPTUN E.

Il va être obéi: mais à quoi lui servira-t-elle,

(1) C'est ainsi qu'il faut traduire, et non pas sa mère la Nue. Quelle que soit la remarque de M. de Pompignan, il est certain qu'il n'a point entendu cet endroit, et qu'il prête à Lucien des idées qui n'appartiennent nullement à cet auteur.

(2) Allusion au nom de Délos. J'ai conservé en françois, autant qu'il m'a été possible, l'ordre des mots grecs, pour faire voir que le texte n'est point altéré, comme l'ont prétendu quelques critiques.

lorsque devenue visible, elle ne flottera plus

sous les eaux.

IRIS.

C'est dans cette île que Latone doit faire ses couches. Déjà elle ressent les vives douleurs de l'enfantement.

NEPTUN E.

Et quoi? le ciel n'est-il pas un lieu propre à faire des couches; ou, à son défaut, la terre ne peut-elle recevoir les enfans de Latone?

IRIS.

Non, Neptune, car Junon a engagé la terre par un serment terrible, à ne prêter aucun asyle aux fruits des amours de Latone: or, cette île n'est point tenue de ce serment, puisqu'elle n'a point encore paru.

NEPTUN E.

J'entends. Arrête, vagabonde Délos, sors une seconde fois du sein des eaux, ne sois plus entraînée par les flots, demeure immobile, et reçois, ô la plus fortunée des isles, les deux enfans de mon frère et les plus beaux des dieux. Vous, Tritons, transportez-y Latone : que le calme règne dans tout l'univers. Quant au serpent qui la poursuit et la glace d'effroi, à peine les petits dieux seront nés, qu'ils le tueront à coups de fleches, et vengeront ainsi leur mère. Vas, Iris, annoncer à Jupiter que tout est prêt: Délos est stable, que Latone y vienne et enfante.

DIALOGUE XI.

LE XANTHE ET LA MER.

LEXAN THE.

Mer! reçois-moi dans ton sein, j'ai souffert des maux affreux; éteins le feu qui me dévore (1).

LA ME R.

Que vois-je! ô Xanthe, qui t'a ainsi brûlé ? LE XANTH E.

Vulcain. Il m'a presque réduit en charbon (2): mes eaux sont toutes bouillantes.

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Et d'où vient qu'il a lancé ses feux sur toi? L E XANTH E.

En faveur du fils de Thétis; je suppliois Achille d'épargner les Phrygiens dont il faisoit un horrible massacre; mais loin de calmer sa colère, il arrêtoit le cours de mes eaux par des monceaux de morts. Emu de compassion pour ces

(1) A la lettre : éteins mes blessures.

(2) En évitant cette expression ridicule pour un fleuve, j'aurois ôté tout le sel de ce passage. Il en est de même de ce que le Xanthe va dire plus bas, il rôtit mes poissons. N'oublions pas que Lucien est un auteur plaisant, et qu'il ne faut pas substituer des expressions nobles à ses expressions burlesques. D'ailleurs ceci est une critique de la fiction d'Homère. Iliade, liv, 21.

malheureux, je soulevai mes flots contre lui, dans le dessein de le submerger, ou de l'obliger par crainte à cesser le carnage. Alors Vulcain, qui par hasard étoit près de nous, s'arme d'autant de feux qu'il en allume dans l'Etna et dans ses autres fourneaux, et vient fondre sur moi. Il embrase à l'instant mes peupliers et mes tamarins, il rôtit mes poissons et mes anguilles, et à force de me faire bouillir, il m'a presqu'entiérement desséché. Tu vois en quel état m'a mis la brûlure.

THÉTIS.

Pauvre Xanthe, te voilà tout bourbeux; et tes eaux sont bouillantes, je m'en apperçois bien. Le sang des cadavres et les feux de Vulcain en sont la cause. Mais aussi, tu mérites assez ce traitement. Pourquoi t'élançois-tu contre un de mes enfans, sans respect pour le fils d'une Néréïde ?

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Et ne devois - je pas avoir pitié de mes voisins les Phrygiens?

THÉTIS.

Et Vulcain, à son tour, ne devoit-il pas avoir pitié du fils de Thétis?

DIALOGUE

DIALOGUE XII.

DORIS ET THÉTI S..

QUI

DORIS.

ur te fait pleurer, Thétis?

THÉTIS.

Ah! Doris, je viens de voir une fille d'ene beauté parfaite, et son fils, jeune enfant qui ne fait que de naître, renfermés tous deux dans un coffre par l'ordre de son père. Ce père inhumain a commandé à ses matelots de prendre le coffre, et de le jetter dans les flots, lorsqu'ils seroient éloignés du rivage, afin que cette infortunée pérît avec son enfant.

DORIS.

En sais-tu la raison, ma sœur? tu parois instruite de cette aventure.

THÉTIS.

Acrisius, son père, avoit condamné cette belle fille à une éternelle virginité, et l'avoit enfermée dans une chambre d'airain. Je ne saurois te dire si la suite de son aventure est véritable, mais on prétend que Jupiter changé en or, s'est glissé à travers le toît, auprès de Danaé, et qu'en recevant dans son sein le dieu qui tomboit en pluie, elle est devenue enceinte. Le père, vieillard féroce et jaloux, ne s'en est pas plutôt apperçu, que, transporté de colère, Tome I.

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