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Malgré tes foins cruels confondra l'injuftice;
S'il me refufe enfin le fecours de fon bras,
Le fecours des mortels ne me manquera pas.
Je ne m'explique point; mais fi mon pere expire,
Il ne mourra pas feul ; & j'ofe te prédire,
Qu'après l'avoir conduit aux horreurs de fon
fort,

Peut-être autant que moi tu pleureras fa mort.
Adieu.

DIQDA DIA DIA

SCENE I V.

AGNONIDE, CLITUS.

Que me

AGNONIDE.

Ue me dit-elle,& qu'elle eft fon attente? Mais non, je ne crains point fa menace impuif-, fante,

Et la foudre aujourd'hui dût-elle m'accabler,
Dans un fi beau chemin je ne puis reculer.

Il eft tems de cueillir l'heureux fruit de mes pei

nes;

Accablons, cher Clitus, la liberté d'Athenes, Hâtons-nous d'accomplir mes glorieux projets, Faifons-nous dans ces murs un trône & des fu

Jets;

Et renverfant les loix de cette Republique, Rappellons la fplendeur des premiers Rois d'Attique.

CLITUS,

Mais, Seigneur, fongez-vous....

AGNONIDE.

J'ai tout examiné.

Je fçai que mon projet peut être condamné
Que ces timides coeurs dont la prudente adreffe,
Sous le nom de vertu déguife fa foibleffe,
Qui n'ofant s'occuper de foins ambitieux,
Redoutent les perils cent fois plus que les Dieux.
Ces coeurs, dis-je, ennemis de mes deffeins fu-
blimes,

Leur donneront les noms qu'on donne aux plus grands crimes:

Mais auffi que diront ceux dont la noble ardeur
Entraîne tous les voeux vers la feule grandeur;"
Qui loin de contracter de baffe fervitude,
Du foin de commander font toute leur étude,
Et ne pouvant fouffrir de maître ni d'égal,
Gardent l'ambition jusqu'au terme fatal ?
Ces fuperbes mortels me prenant pour exemple,
Dans le fond de leur coeur m'éleveront un tem-
ple,

Et foit que le deftin me favorife ou non,

Parmi les noms fameux ils compteront mon nom. Je t'avolierai pourtant, quelque espoir qui m'ani

me,

Que j'eus quelque terreur en commençant le cri

me

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D'un violent remords mon cœur fut combattu
Lorfque de Phocion j'attaquai la vertu :

Mais voulant fur mon front placer le diadême,
Il falloit ou le perdre, ou me perdre moi-même.
Pour m'éloigner du rang que je me fuis promis,
Je le crains plus lui feul que tous mes ennemis.
CLITUS.

Chargé d'ans & de foins dont le nombre l'acca

ble,

Un feul homme, Seigneur, eft-il fi redoutable? Et fe peut-il enfin....

AGNONIDE.

Eh! ne conçois-tu pas

Qu'un homme tel que lui fait le fort des Etats?
Quoyque mille raifons à fa perte m'attachent,
Je lui dois un aveu que fes vertus m'arrachent
C'est un de ces mortels que le Ciel quelquefois
Fait naître pour défendre ou retablir les Loix;
Un de ces coeurs choifis, de ces heureux genies,
Où les Dieux font briller leurs faveurs infinies,
Que de leur feu divin ils ont foin d'éclairer,
Et qu'un ennemi même eft contraint d'admirer.
CLITUS.

Eh! faut-il donc, Seigneur, attenter à fa vie?
AGNONIDE.

Trifte effet, cher Clitus, des fureurs de l'envie!
Avec moins de vertus Phocion fans fecours,
Tranquille dans ces murs eût vû couler fes jours,
Et paffé fans peril les plus longues années
Qu'à fon obfcur deftin la Parque auroit données.
Mais loin de rappeller les preffantes raifons
Qui le font immoler à mes juftes foupçons,
Etouffons les remords que me caufe fa perte,
En fongeant quelle gloire à mon fils eft offerte:
Car, Clitus, c'est pour lui cent fois plus que pour

moi,

Que j'afpire à ranger ce peuple fous ma loi'; C'eft l'amour de ce fils digne d'une couronne, Qui raffure mon coeur quand le crime l'étonne, Qui fur tous mes perils me fait fermer les yeux, Et braver le courroux des hommes & des Dieux. CLITUS.

Mais, Seigneur, votre fils par fa fuite imprévuë...
AGNONIDE.

Ah! ne m'en parle plus, ce fouvenir me tuë
Finiffons un difcours qui me glace d'effroi.
J'ignore quel deffein peut l'éloigner de moi;
Il a furpris Licas, il m'a furpris moi-même,
Et le fort fecondant fon fatal ftratagême,
Je n'ai pû découvrir le chemin qu'il a pris,

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En vain jufqu'à ce jour mes foins l'ont entrepris Mais mon coeur affligé reprend quelque efperan

ce,

L'ingrat ne peut long-tems tromper la diligence
Des fideles amis qui vont de Cour en Cour
Le chercher, l'avertir, & preffer fon retour.
Allons donc pour lui feul confommer mon ouvra-

ge,
Des coeurs que j'ai gagnez ranimer le courage,
Sur les plus obftinez faire un dernier effort
Par l'efpoir du falaire, ou la peur de la mort,
Et m'inftruire fur tout, fi felon mon envie
Dans Pelle Phocion a vû trancher sa vie,

Fin du premier Alte.

ACTE II

SCENE PREMIERE.

AGNONIDE, CLITUS.

AGNONIDE.

Pproche, vien, Clitus, mes chagrins font

A paffez,

Je voi mes vœux fecrets par le Ciel exau

cez;

Dieux! avec quels tranfports mon cœur s'ouvre à la joie !

CLITUS.

Eh, quel eft le bonheur que le Ciel vous envoie? AGNONIDE.

Je viens de recevoir un billet de mon fils.

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AGNONIDE.

Licas en mes mains l'à remis, CLITUS.

Sçavez-vous fous quel Ciel Alcinous respire? AGNONIDE.

Nous l'ignorons encore, on n'a pu m'en inftruire; Ce n'est que par les foins d'un efclave inconnu

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