reprit le Cours de fes études qu'il termina en 1633.

Depuis long-tems il avoit poftupour être envoyé aux Missions Orientales, & le Révérend Père Jofeph de Paris Préfet de ces Miffions n'attendoit que la fin de fes études pour confentir à fon départ. A peine l'obédience pour partir lui cut-elle été remife, qu'il fe 'mit en chemin avec le Père Benoît de Dijon qui l'accompagnoit, def tiné comme lur pour la Miffion d'Egypte. Leur voyage fut long, le Navire qui les tranfportoit à Alexandrie, ayant été long-tems battu par une furieufe tempète, dans laquelle ils furent fouvent dans un danger évident de périr: la tranquillité de nos Miffionnaires raffura plus d'une fois le Matelot défefpéré. Leurs difcours pleins de l'efprit de Dieu ranimèrent la foi & la confiance de l'Equipage, & enfin après avoir vu fouvent

de près l'image affreufe d'une mort prefque inévitable, ils abordèrent à Alexandrie, où le Père Caffien fe livrant bientôt à fon zèle prêcha trois fois pendant quinze jours qu'il y féjournà aux Commerçans François qui s'y trouvent toujours en grand nombre.

Alexandrie n'étoit pas le terme du voyage du Père Caffien ; il étoit deftiné pour la Miffion du grand Caire, & il n'y fut pas plûtôt arrivé, qu'il s'appliqua à apprendre l'Arabe: les autres Miffionnaires Capucins fçachant tous parfaitement cette langue, il ne lui fut pas difficile de s'y perfectionner, d'autant plus qu'il avoit un talent particulier pour les langues. Il fçavoit outre le François, le Latin, le Grec, le Portugais, & avoit quelque teinture de l'Hebreu quand il paffa en Egypte; bientôt après il s'appliqua à la langue Abiffinne ou Ethiopienne, quand il conçut le deffein de paffer en Éthiopic avec le Père Agathange de Vendôme,

& il l'apprit avec la même facilité quoiqu'avec moins de fecours. Quelques Portugais qui venoient d'Ethiopie pour aller vifiter les Sts. lieux de Jerufalem, passèrent par le grand Caire & vinrent demander l'hospitalité dans la maison des Capucins François ; charmés de trouver un Miffionnaire qui fçavoit leur langue, ils lui firent les plus fortes inftances pour l'engager à paffer en Éthiopie: ils lui repréfentèrent & au Père Agathange de Vendôme qui étoit alors au Caire, la Religion Catholique prête à être entièrement abolie dans cet Empire, le befoin d'un fecours preffant qu'avoient les Jéfuites perfécutés dans ce Royaume; d'où, comme nous l'avons dit ci-deffus, ils furent chaffés bientôt après.

Les nouvelles qui fe répandirent en effet de la révolution arrivée dans l'Ethiopie, & dont nous avons parlé dans la vie du Père Agathange, les déterminèrent tous deux à écrire au Révérend Père Joseph de

Paris, pour le prier d'obtenir inceffamment de la facrée Congrégation établie à Rome pour la Propagation de la Foi les permiffions néceffaires pour paffer dans l'Abiffinnie au fecours des Catholiques qui y étoient cruellement perfécutés; & en attendant la réponse, le Père Caffien avec les principes de la langue abiffinne que lui avoient donné les Portugais qui avoient paffé au grand Caire, s'en inftruilit à l'aide de quelques livres abiffins fuffifamment pour fe faire entendre, & pour comprendre ceux qui lui parloient cette langue.

Mais pendant toutes ces différentes études, il ne négligeoit pas de mettre à profit l'arabe qu'il poffédoit parfaitement, & foit dans les Eglifes des Cophtes du grand Caire, foit dans les villages aux environs de cette Ville il alloit prêcher & catéchifer, & fes fuccès répondoient à fon zèle. Trois années fe pafsèrent dans ces faints & pénibles éxercices fouffrant

tent,

avec joie la faim, la foif, la diferte de toutes chofes, toujours cons'il avoit pu avancer en quelque manière l'œuvre de JESUSCHRIST, en contribuant au falut des ames. Son feul chagrin étoit de n'avoir pas encore donné fon fang pour la Gloire de fon divin Maître un fecret preffentiment lui annonçoit que c'étoit dans l'Ethiopie que cette infigne faveur l'attendoit. Il partageoit avec le Père Agathange de Vendôme cette fainte impatience, ou de répandre fon fang, ou de voir l'hérefie confondue, & JESUS-CHRIST triomphant. Ils ne tardèrent pas de voir leurs defirs accomplis, & il ne nous refte qu'à les rejoindre en faisant la relation de leur Martyre.

RELATION