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Et pendant qu'il exhortoit les uns & les autres à déAN. 1485. fendre leurs états, il ne negligeoit pas ce qui regardoit l'état ecclefiaftique ; il donna ordre à Jean Baptifte des Urfins légat du fiege apoftolique, de mettre de bonnes garnifons dans les villes de la Marche d'Ancone, & des vivres en abondance.

V

Ceux de l'ifle de

Ceux de l'ifle de Chio étant continuellement vexez Chio demandent par les incurfions des Turcs qui les menaçoient de contre les Tures. fe rendre maîtres de leur pais, s'adrefferent au pape Innocent pour lui demander du fecours. Le faint

au pape du fecours

Jerojolym. 1. 14.

pere occupé à mettre l'Italie en état de défense, & d'ailleurs épuifé par les dettes qu'il avoit été obligé Fofius hift. equit. de contracter, ne put leur accorder ce qu'ils demandoient. Mais il engagea Pierre d'Aubuffon grandmaître de Rhodes, à s'emploier pour ces peuples auprès du fultan. D'Aubuffon étoit affez bien venu de Bajazet, avec qui il avoit fait un traité, ainfi il n'eut pas beaucoup de peine à le porter à laiffer ces infulaires en repos. Ceux-ci par reconnoissance firent préfent à d'Aubuffon d'une grande cuvette d'argent très-bien travaillée, fur laquelle ils avoient fait graver fon nom & le fervice qu'il leur avoit rendu. D'Aubuffon cependant ne fe repofoit pas tellement fur le Petro d'Aubuffon traité qu'il avoit fait avec le Turc, qu'il ne prît auffi fe optimè merito, des mefures pour empêcher Bajazet de paffer le détroit de Gallipoli, & de venir de-là fondre en Italie. Il en fit informer le pape par un de fes chevaliers appellé Guillaume, qui fut reçu avec beaucoup d'honneur dans un confiftoire en préfence de tous les cardinaux. Le chevalier fit un difcours fort long, dans Refius ibid. part. lequel il parla beaucoup lequel il parla beaucoup des fervices que les Rodiens avoient rendus à la religion depuis la prife de Conftantinople, des victoires qu'ils avoient remportées

Dominorum Chii reverendiffime

magiftro Rhodi de

donum.

VI.

Le grand-maître

de Rhodes députe

au pape.

2. lib. 14.

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fur les Turcs, des efforts qu'ils avoient faits pour empêcher ces infideles de venir en Italie. Il ajouta que la mort du bacha Achmet avoit été avantageuse à plufieurs. Enfin il conclut en recommandant au pape l'ifle de Rhodes qui avoit donné la naissance à son pere. Le fouverain pontife le remercia avec beaucoup de bonté, & lui donna des lettres pour le grandmaître d'Aubuffon. Elles font dattées du vingt-troifiéme d'Avril de cette année.

AN. 1485.

vir. Autres ambaffa

VIII.

Innocent VIII. reçut auffi des ambaffadeurs des rois de France, d'Angleterre & de Dannemarc, des deurs au même ducs de Milan & de Bretagne, de Bertold archevêque pape. de Maïence, de Jean archevêque de Treves, tous deux Onuph. in Innoci électeurs de l'empire, & enfin de la république de Genes. Il les reçut tous avec beaucoup de bonté, & les exhorta à la paix, en leur expofant les fuites funeftes des guerres, les temples profanez, le culte divin interrompu, les villes renverfées, les vierges deshonorées ; ce qu'il leur répetoit plufieurs fois, dit Onuphre. Il leur marqua le defir ardent qu'il avoit de voir tous les princes unis pour faire triompher la croix de Jefus-Chrift fur les ennemis de fon faint nom. Mais toutes ces belles exhortations ne purent prefque rien produire, à caufe de la guerre qui étoit d'un côté entre Matthias roi de Hongrie & l'empereur Frederic, & de l'autre, entre Albert de Brandebourg & Othon de Baviere, dont on avoit befoin pour arrêter les progrès des Turcs. Et comme George duc de Baviere emploïoit fa médiation pour concilier ces princes, le pape lui écrivit, il fit l'éloge de fon zcle, & le preffa fort à continuer une fi bonne œuvre pour l'avantage de la religion. La lettre du pape est dattée de Rome du vingt-huitiéme de Septembre.

La guerre de Baviere finit à la verité; mais celle AN. 1485. d'Autriche devint plus violente. Matthias roi de Hongrie, après être convenu d'une treve avec les Turcs, vint affieger Vienne, & obligea cette ville à fe rendre après fix mois de fiege.

VIII.

Leroi de Hongrie

fait la guerre

Vienne.

Naucler. vol. 2.

general. so,

Cette ville fut prife le premier jour de Juin, sans fi cette Autriche & prend affaire ne l'eut pas regardée. Ainfi bien loin de se difAutriche & prend que Frederic s'en mit auffi peu en peine que Bonfin. dec.4.1.6 pofer à fauver une place que la qualité de capitale d'une grande province fembloit rendre très-confiderable, il l'abandonna à la difcretion du vainqueur, & pour témoigner que fa difgrace le touchoit fort peu, il prit cette conjoncture pour aller vifiter fon fils Maximilien dans les Païs-Bas, repetant fouvent cette maxime, que l'oubli eft le feul remede des chofes Bonfin. 4. dec. 9. perduës, quand elles font irréparables. Dans ce même temps Antoine Bonfinius voulant faire fa cour à Matthias, lui préfenta plufieurs ouvrages qu'il avoit compofez; ce prince le reçut fort bien & le retint auprès de lui pour compofer l'hiftoire de Hongrie. Bonfinius la dédia à Uladiflas roi de Boheme, lorfque ce prince fut parvenu à la couronne de Hongrie.

IX.

Le cardinal Baluë égat en France.

Le cardinal Baluë étoit du nombre des ambaffadeurs Charles VIII. roi de France avoit envoïez

que

au pape.
Il étoit venu dans le roïaume dès l'année pré-
cedente avant la mort de Sixte IV. & après celle de
Louis XI. qui l'avoit fi long-temps retenu en prifon.
Mais parce qu'il y voulut exercer fes fonctions de
légat, avant que d'avoir fait agréer fes lettres au roi
& les avoir préfentées au parlement, pour connoître
s'il n'y avoit rien de contraire aux droits de la cou-
ronne & aux libertez de l'églife Gallicane; Charles
VIII. en fut fi offensé, qu'il lui défendit de prendre

les marques de fa légation. Jean de Nanterre procureur general du parlement, prit de-là occafion de AN. 1485, protester contre tout ce que pourroit faire le pape, Î'accufant d'attaquer les droits & les privileges du roi & du roïaume ; il fe plaignit auffi que fa fainteté cut envoïé un légat à latere, fans aucun besoin : si cela étoit neceffaire, difoit-il, il falloit choisir un plus digne fujet, qui fût animé de l'efprit de son état, qui eût la fageffe & la fcience du feigneur, qui fût homme de paix, zelé pour la justice, & non pas un homme qui n'aimoit que le trouble & la divifion. Cette proteftation eft du vingtiéme d'Août. En confequence le parlement défendit au légat d'ufer de fon pouvoir. Néanmoins le confeil du roi aïant oüi fes raisons & reçu les foumiffions, lui permit d'exercer fes fonctions, ce qui ne dura pas long-temps; parce que ce cardinal aïant appris la mort de Sixte IV. s'en retourna promptement à Rome, après avoir reçu du roi mille écus pour les frais de fon voïage. Innocent VIII. le fit évêque d'Albano, & lui donna dans la fuite la légation de la Marche d'Ancone.

Après fon retour à Rome, le pape écrivit au roi de France pour le feliciter fur fon heureux avenement à la couronne, & l'exhorter à fuivre l'exemple de fes ancêtres dans leur attachement inviolable à l'églife Romaine. Cette lettre eft du dix-huitiéme Avril : & dans une autre du dix-huitiéme Juin, il fe plaint au même prince, des magiftrats qui violoient les immunitez ecclefiaftiques dans la Provence annexée depuis peu à la monarchie Françoise, & qui ne cherchoient que leurs interêts, fous prétexte de maintenir l'autorité roïale ; il exhorte le roi à y apporter un prompt remede & à réprimer ces abus,

X.

écrit au roi de France.

Le pape Innocent

Raynald. hoc an

no, n. 36.

Comme on avoit indiqué une affemblée du clergé AN. 1485. pour le premier jour du mois d'Août, & que le fouverain pontife craignoit qu'on n'y donnât quelque atteinte à fon autorité, parce que plufieurs demandoient le rétablissement de la pragmatique fanction dans fon entier, fa fainteté prie Charles VIII. dans une autre lettre du vingt-cinquiéme de Juillet, de refpecter le fiege apoftolique dont les ancêtres ont toujours pris la défenfe, & de ne point fuivre les confeils de ceux qui ne cherchent qu'à détruire fon

Naples.

XI.

Mariana, hift.

Hifp. l. 25. c.7.

Mem. de Comines 1.7.c.1.

autorité.

cat,

Le zele du fouverain pontife pour les libertez de à Ferdinand roi de l'églife, lui fit déclarer la guerre à Ferdinand roi de Naples, qui exerçoit une violente tyrannie fur les fujets de l'état ecclefiaftique, & qui contre toutes les loix avoit fait mourir fur divers foupçons le comte de Sarno & beaucoup d'autres. Un grand nombre de feigneurs du roïaume de Naples avoient imploré le fecours du pape, qui les affifta avec d'autant plus de plaifir, que depuis le commencement de fon pontifiil fe plaignoit de ce prince qui refufoit à l'église Romaine le tribut qu'il étoit engagé de païer, fous prétexte que le comtat d'Avignon n'avoit été cedé par la reine Jeanne au faint fiege que pour remplacer ce tribut, qui montoit à quarante mille écus. Innocent offenfé de ce refus, & invité par les feigneurs du roïaume de Naples, leva une armée, dont il donna le commandement à Robert de San-Severino, & appella René duc de Lorraine à cette entreprise, comme celui à qui le roïaume appartenoit. Ce duc y confentit volontiers, & fe mit en voiage pour se rendre en Italie. Mais à peine fut-il arrivé à Lyon, que Charles VIII, lui manda de ne pas aller plus loin, fe

réfervant

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