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de Ferdinand. Il le déclara de plus privé du roïaume de Naples, & publia une croisade contre lui, donnant le commandement de l'armée au comte Nicolas des Urfins, & invitant le roi Charles VIII. à le fecourir. L'évêque Antoine appella de cette feconde excommunication au futur concile, au nom de Ferdinand fon maître, qui perfifta dans fa révolte, jusqu'à ce que deux ans après il fe foumit au faint fiége, parce qu'il appréhendoit les armes de Charles VIII. que le pape avoit invité de venir au plûtôt en Italie pour faire valoir fes droits fur le roïaume de Naples, comme il y vint en effet dans les années fuivantes.

Pendant que le faint pere prononçoit des excommunications contre Ferdinand roi de Naples, il combloit de fes faveurs Ferdinand roi d'Arragon & fon époufe Ifabelle pour les engager à pourfuivre leurs conquêtes dans le roïaume de Grenade contre les Maures. On trouve une bulle de ce pape du neuvićme d'Octobre de cette année adreffée à ces princes, en confirmation de la bulle de Sixte IV. pour lever des fubfides dans la Caftille & dans le roïaume de Leon, afin de fournir aux frais de cette guerre, en promettant beaucoup d'indulgences à tous ceux qui y contribueroient de leurs biens ou de leur industrie, de quelque profeffion qu'ils foient. Il les étend au roïaume de Navarre, & y fait un grand détail des progrès que Ferdinand avoit déja faits fur les infideles, l'exhortant à ne pas laiffer une fi bonne œuvre imparfaite, & esperant que Dieu le favorisera dans ses entreprises, pour éteindre entierement la fecte de Mahomet dans fes états. Il charge les évêques d'Avila & de Leon de recueillir eux-mêmes les aumônes des fideles, avec beaucoup d'integrité, d'établir des Tome XXIV.

M

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AN. 1489.

XCVIII. Ferdinand leve

derable contre les

Hifpan. lib. 20. 25.c.13.

Surita, lib. 20.

6.81.

quêteurs qui rendront un compte exact de ce qu'ils auront reçû, & de frapper des cenfures ecclefiaftiques ceux qui détourneront l'argent qu'ils auront amaffé, pour l'emploïer à d'autres ufages.

Ferdinand ne manqua pas de profiter de cette bulune armée confi- le ; des aumônes qu'il reçut il leva une armée de cinMaures. quante mille hommes d'infanterie & douze mille cheMariana de rebus vaux qui prirent tous la Croix. Il fe rendit maître de plufieurs villes, & conçut le deffein d'affieger enfin Grenade, fi le jeune roi ne vouloit pas la lui remettre. Il lui envoïa à ce fujet le comte de Tendille; pour lui representer qu'après que leurs majestez catholiques avoient executé de bonne foi le dernier traité, pris les villes d'Almeria, de Baça & de Guadix, obligé le prince fon oncle à fortir du roïaume de Grenade pour se retirer en Afrique ; il étoit juste qu'il remît la ville de Grenade, comme il avoit promis de le faire par le même traité : qu'en ce cas on lui promettoit une penfion de quatre millions de Maravedis, tous les lieux de la Tau d'Andarax pour fa demeure, & les revenus de ces places pour fa fubfiftance. Le jeune roi étoit affez porté à fatisfaire Ferdinand; mais la crainte des grands de fa cour qui le menaçoient de lui faire perdre la liberté & peut-être même la vie, s'il livroit leur ville capitale, lui fit répondre en termes équivoques ; de forte que Ferdinand après bien des tentatives résolut d'en venir à une guerre ouverte & d'affieger Grenade dans toutes les formes.

XCIX. Le pape s'entremet pour accorder les differends

entre la reine de Suede & Stenon.

Dorothée reine de Suede & de Norvege, veuve de Chriftiern I. roi de Suede mort le vingt-deuxiéme de Mai 1481. aïant cu un differend avec Stenon Stur gouverneur de ces roïaumes, au sujet de la for

tereffe d'Orobra, le pape adreffa aux archevêques de AN. 1489. Lunden & d'Upfal & aux évêques de Roschild & de Strangen une bulle dattée du fixiéme de Juillet pour les engager à appaifer ce differend. Mais n'aïant pas réuffi, l'affaire fut évoquée au faint fiége & jugée en faveur de la reine. Le pape chargea auffi les mêmes évêques d'ufer de cenfures envers Stenon s'il n'obéisfoit pas.

Cette même année le parlement de Paris s'oppofa aux décimes qu'on vouloit lever fur le clergé de France. Ceux qui les vouloient exiger alleguoient pour raifon, que le tréfor étoit épuifé par les guerres de Flandres & de Bretagne, & qu'on ne pouvoit les foutenir fans un semblable fecours. La propofition ne fut pas bien reçue du clergé ni du parlement. La Vacquerie premier prefident, & les confeillers remontrerent au roi ; que le pape n'accordoit jamais de femblables décimes, qu'il n'en eût la meilleure partie, que par-là elles étoient abfolument inutiles à l'état, & que pour les recueillir on étoit obligé à des frais qui abforboient ce qu'on levoit ; ontre que dans cette levée, il s'y commettoit beaucoup de tromperies ; qu'enfin le roi exigeoit de fon peuple de grandes fommes d'argent, qui avec ces décimes l'épuiferoient entierement; què les ecclefiaftiques ne recevoient qu'avec beaucoup de peine & fort tard les revenus de leurs benefices ; ce qui leur causeroit une trop grande charge, fi outre cela on leur impofoit les décimes; en un mot que fi les plaintes du clergé venoient au parlement, on fe croïoit obligé de lui rendre juftice. Ces remontrances eurent leur effet, & la chofe n'étant pas allé plus loin, on laissa le clergé tranquille.

C.

Le parlement de

Paris s'oppofe aux
veut impofer fur
clergé,
Charles VIII.

décimes qu'on

le

Faligny hift. de

AN. 1489.

CI.

pour avoir Zizim

tion.

Il y avoit déja long-temps que le pape pressoit le grand-maître de Rhodes de remettre entre les mains Empreflement de Zizim frere de Bajazet empereur des Turcs, qui étoit plufieurs, Princes toujours gardé par les chevaliers de Rhodes dans la en leur difpofi- commanderie de Bourg-neuf fur les confins du Poitou & de la Marche. Les rois de Hongrie, de Sicile & de in Innocent. VIII. Naples faifoient auffi tous leurs efforts pour avoir cet infortuné prince en leur difpofition. Le foudan d'Egypte le demandoit auffi avec beaucoup d'inftance pour le mettre à la tête de fon armée contre le fultan. Mais le grand-maître de Rhodes ne jugea pas à-pro

Addit.ad Ciacon.

CII.

Bajazet députe

zim.

Faligny hift. de Charles VIII.

pos

de l'accorder ni aux uns ni aux autres. Il crut devoir plûtôt déferer aux demandes du faint pere, & il écrivit à ce sujet au roi Charles VIII. pour avoir sa permission, parce que Zizim étoit dans les terres de France. Le pape lui-même envoïa des députez au roi pour le prier d'y confentir ; & Charles VIII. venoit de donner fon agrément, lorfqu'il reçut une députation de Bajazet pour empêcher que fon frere ne fortît des états de France, & ne fût livré à d'autres.

L'ambaffadeur du fultan étoit accompagné d'un au roi de France à envoïé du roi de Naples, il venoit offrir au roi toutes l'occafion de Zi- les reliques que Mahomet avoit trouvées dans ConfJac. Bofius hiftor. tantinople & dans les autres villes d'Europe & d'Asie; Rhod. to. 2. 1. 14. il promettoit de lui rendre les places prifes fur les chrétiens, & de le fecourir dans le recouvrement de la TerreSainte & du roïaume de Jerufalem fur le foudan d'Egypte qui s'en étoit rendu maître; & il ajoutoit à toutes ces offres une fomme confiderable d'argent pour l'entretien de Zizim. Il infifta beaucoup fur l'appréhenfion qu'avoit Bajazet, que fon frere ne tombât entre les mains du pape ou de Matthias roi de Hongrie, ou du foudan d'Egypte. Comme Zizim étoit encore en

France à l'arrivée de l'ambaffadeur, le roi auroit pû le retenir ; & plufieurs le lui confeilloient; mais comme un fils obéissant, dit Jaligny, & un roi très-chrétien, il voulut tenir la parole qu'il avoit donnée au pape, & fe contenta de bien traiter l'ambaffadeur Turc & cclui de Naples qu'il combla d'honnêtetez & de presens. Il laissa aller Zizim à condition qu'on le conduiroit à Rome & non ailleurs, & qu'il y feroit gardé par les chevaliers de Rhodes; en forte qu'on ne pourroit difpofer de lui fans le confentement du roi, fous peine de dix mille livres d'or.

AN. 1489.

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CIII. Zizim eft livre

Rome.

députez du & conduit à

Il y avoit fix ans que Zizim étoit en France où il s'ennuïoit de mener une vie privée & obfcure. Le aux chevalier de Blanchefort qui avoit été élu maréchal de l'ordre & grand-prieur d'Auvergne, fut chargé de le conduire en Italie, & arriva à Civita-Vecchia le fixiéme de Mars 1489. Leonard Cibo parent du pape l'y reçut, & remit entre les mains de Blanchefort le château & la ville qu'on avoit deftiné au logement de Zizim. Le cardinal d'Angers vint enfuite audevant de lui à douze milles de Rome avec le prince François Cibo, & on le mena droit à Rome où il arriva le treiziéme du même mois ; il y fit fon entrée avec beaucoup de magnificence. Peu de jours après il fut prefenté au pape dans un confiftoire public par l'ambassadeur de France & le grand prieur. Le maître des ceremonies l'avertit de faire la réverence à fa fainteté en lui baisant les pieds. Quelques hiftoriens, entr'autres Matthieu Boffe de Verone témoin oculaire, difent qu'on ne put jamais l'obliger à cette ceremonie, & qu'il ne voulut point baifer les pieds du pape. ad ann.1489. n. 24 Cependant Sponde affure qu'il le fit, mais avec indignation, en prononçant quelques paroles que fon

Mat Boffii VeRaynald. Annal. ron. epist. j

hoc ann 2.2. Spond. ann ecclef.

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