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interprete expliqua ; qu'il ne laiffa pas d'admirer la AN. 1489. majcité du fouverain pontife qui le traita avec beaude bonté, & le fit loger au vatican. Ce prince étoit âgé d'environ quarante ans, il avoit le regard farouche, & même affez cruel, le nez aquilin, le col & la poitrine fort large, & surpassoit la taille ornaire des hommes.

CIV.

Le grand-maître

de Rhodes eft créé

cardinal.

Cinc. Onuphr.

Bofius-10.2.1. 11.

Dès le lendemain de cette ceremonie, le quatorziéme du mois de Mars, le pape voulant récompenfer les fervices du grand maître de Rhodes, qui nonInnocent VIII. feulement avoit mis Zizim en fa puiffance, mais en core avoit engagé le foudan d'Egypte à lui faire hommage & à entrer dans la ligue des princes chrétiens; l'honora du chapeau de cardinal avec le titre de faint Adrien & la qualité de légat general du faint fiége dans l'Afie. Il ne reçut cependant le chapeau que le vingt-neuviéme de Juin jour de la fête des apôtres faint Pierre & faint Paul. Sa fainteté renonça auffi par une bulle confiftoriale fignée de tous les cardinaux affemblez, au droit de pourvoir à quelque benefice de l'ordre que ce fut, même à ceux qui viendroient à vacquer en cour de Rome; déclarant par la même bulle la difpofition de toutes les commanderies appartenoit entierement au grand-maître, fans qu'elles puffent être comprises au nombre des benefices que les papes s'étoient réfervez, & pourroient fe réserver dans la fuite. Il donna encore au grand-maître le pouvoir de difpofer des benefices & des revenus des ordres militaires du faint Sepulcre & de faint Lazare, en réunis, fant ces ordres à celui de faint Jean de Jerufalem. Cette bulle eft dattéc de Rome le vingt-huitiéme de Mars. Le cardinal grand maître voïant les affaires dans un état paifible, augmenta fes foins pour faire fleurir

que

LIVRE CENT SEIZIE ME.

95

C V. Promotion de

cardinaux par In

nocent VIII. Aubery, hift. des

cardinaux, to.3.

Onuphr. in Innoc.

VIII.

Bous lib. II.

la religion ; il rétablit les églifes ruinées & fonda plu- AN. 1489. fieurs chapelles en differens lieux de l'ifle de Rhodes. Au grand-maître de Rhodes le pape en joignit fept autres qu'il éleva à la même dignité. Le premier à la recommandation du roi Charles VIII. fut André d'Epinay Breton, archevêque de Bourdeaux, puis de Lion, abbé de fainte Croix de Bourdeaux & prieur de faint Martin des Champs à Paris, cardinal prêtre du titre de faint Silveftre & de faint Martin aux Monts. Le fecond, Laurent Cibo Genois, neveu du pape, archevêque de Benevent, prêtre cardinal du titre de faint Marc & évêque d'Albano & de Paleftrine. Le troifiéme, Ardicin de la Porre, de Novarre, évêque d'Aleria, prêtre du titre de faint Jean & de faint Paul. Le quatrième, Antonio Pallavicini Genois, évêque d'Oronze, prêtre cardinal du titre de fainte Anastasie, puis de fainte Praxede, & évêque de Paleftrine. Le cinquième, Maphée Gherardo Venitien, general de l'ordre des Camaldules, patriarche de Venife, prêtre cardinal du titre de faint Nerée & faint Achillée. Le fixiéme, Jean de Medicis de Florence, diacre cardinal du titre de fainte Marie in Dominica, & qui devint pape fous le nom de Leon X. le premier de la famille des Medicis qui fut parvenu au cardinalat ; il n'avoit que quatorze ans ; & le pape ne lui donna le chapeau à un âge fi peu avancé, qu'en faveur du mariage de fa fœur Magdelaine de Medicis avec Laurent Cibo fon fils, que fa fainteté avoit eu avant que d'être ecclefiaf-. tique. Enfin le dernier cardinal fut Ferry de San Severino Milanois, archevêque de Vienne, diacre cardinal du titre de S. Theodore. Raphaël Volaterran rapporte Raph.Volaterrap. que le pape fit cette promotion contre la parole qu'il avoit donnée dans le conclave où il fut élu de ne point

comment. lib. 22.

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AN. 1489.

CVI.

Suite des affaires de Bretagne.

Charles VIII.

exceder le nombre de vingt-deux cardinaux pour com-
pofer le facré college; mais il eft plus aifé de faire de bel-
les promeffes, lorfqu'on eft abfolument cardinal,
de les mettre à execution lorfqu'on eft devenu pape.

que

Charles VIII. pensoit toujours à fe rendre maître de la Bretagne, où par fes conquêtes, ou en épousant aligny, hift. de la princeffe heritiere. Sur l'avis que fes troupes s'étoient emparées de Breft & du Conquêt, il partit dès le mois de Février de cette année pour la Touraine; ce qui inquieta fort les Bretons qui n'étoient pas en état de s'opposer à l'armée de France. Tout ce qu'ils purent faire, fut d'engager Maximilien à faire une diverfion. Charles de Saveufe un de fes generaux fe rendit maître de Saint-Omer, pendant que des Cordes travailloit à engager le comte de Hainaut à s'unir aux Flamands. Les Bretons négocierent aussi avec le roi d'Angleterre qui étoit le plus à craindre pour la France, parce qu'il n'y avoit point d'endroit d'où la Bretagne pût tirer de plus grands fecours.

CVII.

Ambaffade de France au roi d'Angleterre.

Bacon. hift. HenTIC. VII,

La comteffe de Beaujeu devenue ducheffe de Bourbon en sentit parfaitement les conféquences ; elle mit donc tout en ufage pour mettre Henri VII. dans les interêts de la France; & avant que les conquêtes des François en Bretagne puffent lui donner de la jaloufie, elle lui envoïa des ambaffadeurs qui avoient ordre de le feliciter fur la victoire qu'il venoit de remporter, & de lui rendre compte de l'état des affaires de France comme à un prince allié & ami. Ils devoient enfuite l'entretenir des affaires de Bretagne. Ils trouverent Henri à Lancastre ; ils lui infinuerent que Maximilien étant un prince fans argent, fans reffource, fans crédit parmi les fujets, peu aimé, & encore moins eftimé, il ne pouvoit être qu'à charge à fes allicz. Ils ajouterent

ajouterent que fi Charles VIII. avoit porté la guerre

en Bretagne, il n'avoit pû faire autrement, le duc AN. 1489. s'étant prévalu de la jeuneffe du roi pour débaucher les princes de fon fang. Ils rappellerent à Henri les obligations qu'il avoit à la France qui l'avoit fecouru au préjudice de ses interêts. Enfin ils lui dirent que le moins que Charles VIII. pût attendre de fon amitié étoit qu'il demeurât neutre; que fa majefté très-chrétienne foupiroit après la fin de la guerre de Bretagne, pour aller enfuite en perfonne en Italie, faire valoir les droits de fa maison fur le roïaume de Naples, après qu'il auroit épousé Marguerite d'Autriche fille du roi des Romains. Les ambaffadeurs avoient un ordre exprès de toucher ces deux derniers articles du mariage du roi & de fon voïage en Italie, afin qu'Henri ne crut pas que Charles eut deffein d'épouser la duchesse de Bretagne.

Le roi d'Angleterre avant que de répondre aux ambaffadeurs, voulut en conferer avec fon confeil, & quelques jours après il les admit à fon audience, & leur dit qu'il avoit toute la reconnoiffance poffible de la part que le roi leur maître vouloit bien prendre au fuccès de fes armes, qu'à fon tour il en prenoit beaucoup aux avantages qu'il avoit remportez fur le roi des Romains. Enfuite étant tombé fur la guerre de Bretagne, il ajouta que le roi & le duc dont il ne fçavoit pas encore la mort, étoient les deux princes du monde à qui il avoit de plus grandes obligations; que la reconnoiffance qu'il leur devoit ne lui permettoit pas de se déclarer en faveur de l'un au préjudice de l'autre qu'il feroit au defespoir fi leurs differends l'obligeoient à prendre parti: que pour éviter cet inconvenient, il offroit fa médiation, & qu'il envoïeroit Tome XXIV.

:

N

CVIII. Réponse du roi

d'Angleterre aux ambaffadeurs de

France.

Bacon. ibid.

au plûtôt fes ambassadeurs en France & en Bretagne à AN. 1489. ce fujet. En effet il y envoïa Chriftophle Urfwic un de fes chapelains, avec ordre de s'appliquer à penetrer les deffeins de la France, & d'offrir fa médiation, s'il trouvoit qu'on fût difpofé à la paix: qu'il fit les mêmes offres au duc de Bretagne, qu'il dressât ensuite le projet de la paix, & revint promptement lui en faire fon rapport. Mais aïant appris fur ces entrefaitesla victoire des François à Saint-Aubin, la mort du duc de Bretagne, & les intrigues de la duchesse de Bourbon, Henri se réfolut enfin de faire la guerre fe à la France. Il affembla pour cet effet fon parlement, & la guerre y fut réfolué contre Charles VIII. On mit huit mille hommes fur pied, & on les fit paffer en Bretagne fous la conduite de Milord Brook.

CIX.

Les Anglois fe liguent avec la

clarent la guerre

à la France.

Henri fit en même temps avec les Bretons une ligue. défensive contre la France, à condition que la prinBretagne & dé- ceffe heritiere ne fe marieroit avec aucun roi ou prince cesse fans le confentement du roi d'Angleterre, & ne feroit point d'alliance avec aucun fouverain, à l'exception du roi d'Efpagne & du roi des Romains. Après ce traité les Anglois s'embarquerent & arriverent à Guerande.. Charles VIII. l'aïant appris, donna auffi-tôt ordre à fes troupes de fe renfermer dans les principales villes de Bretagne dont il étoit maître, & d'abandonner la conquête des autres. Par-là il empêchoit les Anglois de s'emparer d'aucun pofte important, & en leur abandonnant le plat païs, fon deffein étoit de les harceler par de gros partis que les commandans des places devoient envoïer courir par toute la campagne. Ce projet réuffit. La ducheffe de Bourbon avoit en même temps fi bien fçu gagner par fes intrigues les plus grands feigneurs du païs, & brouiller les autres, que

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