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lui; mais les Hongrois qui ne favoient pas leur ma- AN.124B niere de combattre, & étoient peu affectionnez à leur roi furent entierement défaits, & le roi ne se sauva que parce qu'il s'enfuit fans être connu. Plufieurs prélats furent tués en cette malheureuse journée:Matthias archevêque de Strigonie, en qui le roi avoit une grande confiance, Hugolin archevêque de Colocza, de grande naiffance & le plus eftimé pour la conduite des grandes affaires. George évêque de Javarin, recommandable par fa doctrine; & Rainold de Tranffilvanie évêque de Nitria,eftimé par les mœurs. Nicolas prévôt de l'église de Sebenie en Dalmatie vice-chancelier du roi, qui avant que de mourir tua de fa main un des principaux Tartares, car ces prélats furent tuez en combattant. Aprés cette défaite la terre demeura jonchée de corps morts difperfez l'espace de deux journées de chemin, les uns fans tête, les autres mis en pieces. Plufieurs furent noyez, plufieurs brûlez avec les villages & les églises. L'air infecté de tant de cadavres fit encore mourir plufieurs hommes, principalement ceux qui s'étoient retirez dans les bois bleffez & demi morts. Enfin la terre n'aïant pû être cultivée pendant trois ans que les Tartares demeurerent dans Chr. c. 7.4 le païs, la famine acheva de le defoler.

A la prife de Varadin comme on voulut défendre contre eux l'église cathedrale, ou plufieurs femmes nobles s'étoient refugiées, ils la brûlerent avec tout ce qui fe trouva dedans. Dans les autres églises ils commirent toutes fortes d'impuretez & de facrileges. Aprés avoir abufé des femmes ils les tuoient fur la place. Ils brifoient les vafes facrez, rompoient les tombeaux des faints & fouloient aux piés leurs reliques.

Fo. Thuvroe

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C.

1

On peut juger par cet exemple de ce qu'ils faifoient AN.1241. ailleurs. Ils détruifirent ainfi pendant l'efté de l'année

C. 37.

4.385

XLIX.

logne. Vita ap. Sur. 15. Oct. c. 3. 8.

1241. tout le païs d'au-delà du Danube jusques aux confins d'Autriche, de Boheme & de Pologne: le roi Bela fe fauva en Dalmatie, & n'en revint qu'aprés la retraite des Tartares, c'est-à-dire en 1243.

Henri duc de Pologne qui fut tué dans cette incurFin de S. He- fion des Tartares étoit fils du duc Henri decedé trois duige de Poans auparavant & de fainte Heduige. Elle apprit fa mort par revelation, & ne montra pas moins de conftance à cette perte qu'à celle de fon mari. Elle ne répandit point de larmes, & voïant fa fille l'abbesse de Trebnits & la veuve du prince accablées de douleur, elle leur dit: C'eft la volonté de Dieu & nous devons agréer tout ce qui lui plaît. Puis levant les yeux & les mains au ciel, elle ajoûta: Je vous rends graces Seigneur de m'avoir donné un tel fils, qui m'a toûjours aimée & respectée pendant fa vie fans m'avoir jamais donné aucun chagrin, & quelque joïe que j'euffe de le laiffer aprés moi, je l'eftime heureux d'avoir répandu fon fang pour une fi bonne cause, croyant qu'il vous eft uni dans le ciel..

6. 44

Cette pieufe princeffe vécut encore deux ans dans la pratique de toutes les vertus Chrétienes. Son abstinence étoit telle, qu'elle ne mangea point de viande pendant environ quarante ans: quoique lui pût dire foit par prieres, foit par reproches, l'évêque de Bam'berg fon frere, pour lequel elle avoit beaucoup de refpect & d'amitié. A la fin Guillaume évêque de Modene & legat du S. fiege étant venu en Pologne, & la trouvant malade, l'obligea par obéiffance à manger de la viande. Son ordinaire étoit d'ufer de poiffon & de lai

tages, le dimanche, le mardi & le jeudi : le lundi & le famedi des legumes feches, le mercredi & le vendredi elle fe réduifoit au pain & à l'eau. Elle avoit retranché de fes habits non feulement toute parure & toute délicatesse, mais la commodité & prefque le neceffaire, ne portant qu'une tunique & un manteau, & marchant le plus fouvent nus piez, nonobstant le froid du païs. Elle portoit un cilice de crin, & fe donnoit la difcipline jufques aufang.

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Ses prieres étoient longues, ferventes & prefque continuelles; & elle avoit dévotion d'entendre chaque jour plufieurs meffes, à chacune desquelles elle faifoit fon offrande & recevoit à la fin l'impofition des c.7.84 mains du prêtre. Elle fit plufieurs miracles & avoit le don de prophetic; & prévoïant sa mort prochaine elle fe fit donner l'extrême-onction avant que d'être malade. Enfin elle mourut le quinziéme d'Octobre 1243. Elle avoit voulu être enterrée dans le cimetiere des religieuses, mais l'abbesse sa fille ne pût s'y résoudre, & la fit mettre contre fon inclination dans l'église devant le grand autel; & les religieuses en fouffrirent beaucoup d'incommodité, comme la fainte l'avoit prédit, par le concours du peuple qui venoit en foule prier à fon tombeau, où fe firent plufieurs miracles. C'eft pourquoi les évêques & les ducs de Pologne Rain.1267. WA poursuivirent auprés du S. fiege la canonifation d'He- clem. 14 duige, qui aprés les informations convenables fut conft. faite au bout de vingt-trois ans, par le pape pape Clement IV. le vingt-fixiéme de Mars 1267. & la fête fixée au 15. d'Octobre jour du decés de la fainte.

41. Bullar.

L.

Plaintes du

Dés le commencement de l'invafion des Tartares, Bela roi de Hongrie en donna avis au pape Gre- l'empereur au,

pape

& de

AN. 1241. fujet des Tar

tares.

xv. ep. 79. ap.

2. 18, 19.

goire, qui lui répondit par une lettre du feiziéme de Juin 1241. où aprés des lieux communs de confolation il l'exhorte à fe défendre courageusement, lui Rain. 1241. promettant du fecours en termes generaux ; & en mê me tems il écrivit aux évêques de Hongrie d'y prêcher la croifade contre les Tartares, avec l'indulgence de la terre fainte. Le roi Bela aprés fa défaite envoïa en Italie Eftiene évêque de Vacia avec des lettres pour le pape & pour l'empereur ; & le & le pape lui bid. 27. répondit encore par de grands complimens de condoleance & des promeffes generales de fecours, ajoûtant à la fin: Si Frideric qui fe dit empereur vouloit s'humilier & fe foûmettre à l'églife, elle feroit prête à faire la paix avec lui, & ce feroit un moïen de vous fecourir plus efficacement. La lettre eft du premier de Juillet.

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Frideric de fon côté accufoit le pape d'être la caufe de ce qu'il ne pouvoit fecourir la Hongrie, fomentant la revolte des Lombards & des autres Italiens fes fujets. C'eft ce qui paroît dans la réponse qu'il fit au roi Bela, où il dit qu'il eft occupé à rétablir en Italie les droits de l'empire, qu'il ne lui faut plus qu'un peu de tems pour achever ce grand ouvrage ; & que toute la peine & la dépenfe qu'il y a emploïée, deviendroient inutiles s'il quittoit le païs. Que l'experience du paffé lui fait craindre l'avenir; & que le pape ne manqueroit pas d'attaquer le roïaume de Sicile pendant fon abfence, comme il fit pendant fon voïage de la terre fainte. C'eft pourquoi, ajoûte-t-il, j'ai tout quitté pour marcher vers Rome, dont je fuis déja proche, & je travaille continuellement à la paix, que j'efpere obtenir inceffamment, & marcher enfuite con

AN.1241.

Ric. S. Germ.

p. 1036. P.

tre les Tartares. Il écrivit dans le même sens au roi de France & aux autres princes Chrétiens une lettre où il dit en substance: Nous apprenons que les Tartares approchent des frontieres de l'empire, & tendent à fa Vin. 1. cp-30% ruïne & à celle de l'église Romaine. Mais quelque refolution que nous aïons faite de nous y opposer, nous fommes contraints de pourvoir aux maux presens, plûtôt qu'à ceux dont nous ne fommes que menacez. C'eft-à-dire de foûmettre l'Italie que le pape revolte contre nous. C'eft pourquoi nous vous exhortons tous à vous oppofer à l'ennemi commun, pendant que nous poursuivons les droits de l'empire.

ap.Matth.Pa

L'empereur fait les mêmes plaintes contre le pape p. 469. dans une grande lettre au roi d'Angleterre datée du troifiéme de Juillet, où aprés avoir reprefenté les progrés des Tartares & la deftruction de la Hongrie, il dit: Combien de fois avons-nous recherché le pape pour l'obliger à faire la paix, & ne plus foûtenir nos fujets rebelles mais il n'a fuivi que fa paffion, & a fait prêcher contre nous la croisade, qu'il devoit emploïer contre les Tartares ou les Sarrafins. Or les Tartares ont envoïé de tous côtez des efpions, par r lefquels ils ont appris la divifion qui eft entre nous, & elle les a encouragez à nous attaquer. Que s'ils entroient fans obstacle dans l'Allemagne, les autres princes pourroient s'attendre à les voir bien-tôt chez p. 498. eux. Cette lettre leur fut auffi envoïée; & dans celle qui étoit pour le roi de France l'empereur ajoûtoit: Nous admirons que les François fi éclairez n'ayent pas mieux penetré que les autres les artifices du pape, dont l'ambition infatiable se propose de se foûmettre tous les roïaumes Chrétiens; & attaque l'empire

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