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AN.1247

LXVI. Sang de J C. en Angleter

re.

p. 640.

il prenoit foin qu'ils ne fuffent point avertis de fa venuë. A la fin il se faifoit connoiftre pour le general, & faifoit les reglemens & les corrections qu'il jugeoit à propos, rappellant tout à la premiere obfervance, dépofant quelquefois les fuperieurs negligens, & éloignant les freres peu édifians. Quelque fatigué qu'il fût du chemin il difoit fon office debout & nuëtefte à l'imitation de faint François. Il ne fouffroit aucune distinction pour fa nourriture, mais il prenoit avec action de graces la premiere portion qui fe rencontroit.

En Angleterre le roi Henry écrivit à tous les Seigneurs de fon royaume de fe trouver à Londres le Matth. Par. jour de la tranflation de faint Edouard, c'est-à-dire, le treizième d'Octobre, pour apprendre l'agréable nouvelle d'une faveur que Dieu venoit de leur accorder. Ils s'affemblerent à Oüeftminster au jour marqué, & l'on déclara que le maître des Templiers & celui des Hofpitaliers avoient envoyé par un Templier une portion du fang de Noftre-Seigneur dans un vafe de cristal tres ancien, avec l'atteftation du patriarche de Jerufalem, des évêques, des abbés & des feigneurs de la terre-fainte. Le roi Henry voulut imiter en cette occafion ce que faint Louis fon beau-frere avoit fait pour honorer la vraye croix : il jeuna au pain & à l'eau la veille de la fefte, & le jour il porta folemnellement en proceffion la relique, de l'églife cathedrale de faint Paul à celle de faint Pierre à Oüestminster, où il la donna. L'évêque de Norvic y celebra la meffe, & fit un fermon où il dit que cette relique étoit la plus précieuse de toutes au deffus même

sup.

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de la croix, qui n'est estimable que par le fang de JESUS-CHRIST dont elle à efté arrofée. Et l'on crut qu'il le difoit afin que l'Angleterre ne fe glorifiât pas moins de cette relique que la France faifoit de la croix. L'évêque ajoûta, que l'on avoit envoyé cette relique en Angleterre, afin qu'elle y fût plus en fûreté qu'en Syrie, qui étoit prefque abandonnée par les Chrétiens. Enfin il déclara au nom de tous les prélats qui étoient presents qu'ils accordoient fix ans & cent quarante jours d'indulgence à tous ceux qui viendroient honorer le précieux fang.

AN.1247

Toutefois quelques-uns des affiftans murmuroient; & doutant de la verité du fait demandoient, comment J. C. étant reffufcité tout entier pouvoit avoir laissé de son sang fur la terre. A cette question l'évêque de Lincolne Robert de Groffe-tête répondit par un discours, où fe fondant fur une relation tirée d'un livre apocryphe, comme il en convenoit lui- additam.p. même, il difoit que Jofeph d'Arimathie ayant déta- 1087. ché de la croix le corps de J. C. recueillit foigneufement le fang de fes playes, particulierement celle du côté, & l'eau même dont il avoit lavé le corps, qu'il en fit part à Nicodeme, qui lui avoit aidé à enfevelir Nôtre-Seigneur, & qu'ainfi ce tréfor s'étoit confervé de pere en fils jufqu'à venir en la poffeffion du patriarche Robert, qui tenoit alors le Liege de Jerufalem. Mais c'étoit cette longue tradition & cette confervation du précieux fang pendant douze cens ans qu'il eût fallu prouver. L'évêque de Lincolne ajoûtoit, que le roi d'Angleterre avoit acquis cette relique par pure liberalité & d'une maniere

Sup. Liv.

bien plus noble que le roi de France n'avoit acquis AN.1247 les fienes achetées à prix d'argent quelques années ZXXX1.2.16 auparavant. Quant à l'objection tirée de la refurrection, il répondoit: que le fang que J. C. a laiffé fur la terre eft comme celui que nous perdons par les faignées ou autrement, dont la perte ne nuit point à l'integrité du corps vivant.

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C

LIVRE

I.

S. Louis con

firme fon

vou.

p. 645.

LXXXII, n.

Omme le terme approchoit du départ.de faint Louis pour la terre-fainte, les feigneurs François lui faifoient de grands reproches de ce Matth. Parif. qu'il ne vouloit ni racheter ni commuer fon vou. C'étoit la reine Blanche fa mere, qui le preffoit le plus, foûtenuë par l'évêque de Paris Guillaume d'Auvergne ; & ce prélat difoit au roi : Souvenezvous fire que vous avez fait ce vou fi important precipitamment & fans confulter perfonne, étant malade, ayant le cerveau embaraffé, & pour di- Sup. liv. re la verité ayant l'efprit aliené, en forte que les 17. paroles que vous prononçâtes ne font d'aucun poids. Le pape nous accordera facilement une difpenfe, connoiffant le befoin du royaume & la foibleffe de vôtre fanté. Nous avons à craindre d'un côté les forces de Frideric, d'un autre les artifices du roi d'Angleterre : d'ailleurs l'infidelité des Poitevins, l'inquiétude des Albigeois. L'Allemagne & l'Italie étant agitées il eft difficile d'aborder à la terre-fainte & d'y trouver un pofte afsuré : vous laissez derriere vous le pape & Frideric animez d'une haine irreconciliable: en quel état nous quittezvous? La reine le prenant d'une maniere plus tendre lui difoit: Mon cher fils écoutez les confeils de vos fages amis, & ne vous appuyez pas fur vôtre propre fens fouvenez-vous combien l'obéïssance à une mere eft agréable à Dieu. Demeurez, la terre-fainte n'en perdra rien: on y envoyéra plus de troupes que fi vous alliez en per

y

AN.1248.

V. ep. 611.
Ap. Rain.

1248.3. 18.

12. 29.

fone. Dieu ne chicane pas avec nous: l'état où vous
avoit réduit la maladie, fans liberté d'efprit &
prefque fans connoiffance, vous excufe fuffifam-

ment.

Le roi parut touché de ces difcours & dit : Vous prétendez que c'est l'alienation d'efprit qui m'a fait prendre la croix; & bien je la quitte comme vous defirez, & portant la main fur fon épaule il en arracha la croix, & dit à l'évêque: Tenez, je vous la remets librement. Tous les affiftans furent tranf portez de joye; mais le roi prenant un visage plus ferieux, leur dit. Affurement je ne fuis point à present privé de raison ni de sentiment, je ne suis point malade: or je redemande ma croix, & Dieu m'eft témoin que je ne prendrai aucune nourriture qu'on ne me l'ait rendue. Ils reconnurent tous que Dieu agiffoit en cette occafion : & perfonne n'ofa plus s'opposer à la résolution du faint

roi.

Le pape fondoit fur lui de grandes efperances; & voici comme il en écrivit le vingt-troifiéme de Février 1248. dans une lettre adreffée à la nobleffe & au peuple pour les exciter à la croisade: NôtreSeigneur Jefus-Christ semble avoir choifi entre les autres princes du monde pour la délivrance de fa terre nôtre cher fils le roi de France, qui outre la pureté de corps & de cœur & la multitude des vertus, abonde encore en guerriers & en richesses. Il a pris la croix & fait des préparatifs dignes d'un fi grand prince & d'une fi grande entreprise. Enforte qu'il y a lieu d'efperer qu'il la conduira à une heureufe fin. Le pape ajoûte qu'il a done de la

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