voyé à un autre tems & l'Armée Le prépara à marcher vers la Ca- 1729 pitale. Tout le pays depuis le champ de bataille jufqu'àlfpahan, étoit ouvert & abandonné, les villages ravagés, les moiffons & les fourages brûlés: mais à peine les troupes furent elles en marche, qu'on vit accourir de tous les côtés les habitans de la campagne, qui après la défaite des Aghuans s'étoient retirés pour la plupart dans les Montagnes avec leurs effets & leurs denrées, & qui apportoient à l'armée toutes les provisions & tous les rafraîchiffemens néceffaires : un grand nombre de Perfans que la crainte avoit retenus jufques là ou dans l'inaction, ou dans le parti des Rebelles, vinrent en foule groffir l'armée du Roi; elle arriva ainfi fans obftacle jufqu'à deux lieues d'Ifpahan, delà on envoya un détachement de quinze cents

hommes à Farabath pour s'affu 1729 rer de cette belle maison de plaifance de Schah-Huffein,qui avoit fervi de camp aux Aghuans pendant le fiége de la Ville, & qu'ils venoient d'abandonner depuis leur défaite,après l'avoir pillée & ravagée. Le Roi s'y rendit enfuite avec une partie de l'armée & à peine y fut-il arrivé qu'il apprit la fuite des Aghuans.

En effet l'Ufurpateur Aszraff étant entré dans lípahan, au retour de la bataille qu'il venoit de perdre,& fe doutant bien que les Vainqueurs ne tarderoient pas de le venir attaquer dans la Capitale, où il ne feroit pas en fureté, au milieu d'un Peuple qui le haifoit mortellement, il donna ordre à tous les fiens de fe rassembler dans le Château & d'y apporter ce qu'ils auroient de plus précieux, & la nuit du premier Décembre 1729, Afzraff fortit

de la Ville avec douze mille Ag-
huans, enlevant l'or & l'argent 1729,
qu'il avoit pu ramaffer avec les
meubles les plus riches du Pa-
lais & les Diamans de la Cou-
ronne, & emmenant encore avec
la Famille de Maghmud & la
fienne toutes les Princeffes du
Sang Royal. On s'étoit atten-
du dans la Ville à un massacre
général, dont les Barbares l'a-
voient menacée, au cas qu'il leur
arrivât quelques difgraces; c'est
pourquoi chacun prenoit toutes
fortes de précautions pour fe
fouftraire à leur fureur: mais la
frayeur les avoit tellement faifis
depuis leur défaite, qu'ils ne fon-
gérent pour lors qu à leur propre
falut. Le calme & le filence qui
depuis l'arrivée d'Afzraff avoir
fuccédé au bruit & au tumulte
étonna tout le monde : on fut
bien plus furpris lorsque dès le
grand matin, la nouvelle de leur

fuite fe répandit : les Portes de la 1729 Ville furent incontinent ouvertes: Thamas Kouli-Kan y entra à la tête de dix mille Perfans &

y

fut reçu des habitans, avec des démonftrations de joye inexprimables, fon nom retentiffoit dans toutes les rues où chacun l'appelloit fon Libérateur. Trois mille Aghuans qui n'avoient pu fuivre Afzraff s'étoient renfermés dans l'enceinte du Château & offrirent de le rendre, fi on vouloit leur accorder la vie. Les Persans demandérent à grands cris qu'on leur laiffat forcer le Château pour maffacrer tous ces miférables & pourvanger fur eux tous les maux que leur nation avoit faite à la Perfe, mais Kouli-Kan s'y oppofa & leur promit fa protection auprès du Roi, s'ils fe foumettoient fur le champ ; ce qui fut exécuté de part & d'autre. Ainfi en peu d'heures la Ville & le

Château

Château furent délivrés de la Domination Aghuane qui avoit du- 1729 ré fept ans & dix jours, à comp ter du 23. Novembre 1722. jour que Schah-Huffein ouvrit les portes d'Ifpahan à Maghmud, jufqu'au troifiéme Décembre 1729. qui eft la datte de ce dernier évé

nement

Cependant l'Armée campoit encore aux environs d'Ispahan, & Schah-Thamas étoit à Farabath en attendant qu'il put faire fon entrée dans fa Capitale. Kou li-Kan ayant difpofé toutes chofes dans la Ville pour cette réception, en fortit avec les prin cipaux Officiers du corps de troupes qu'il commandoit & vint au vant du Roi; de fi loin qu'il l'apperçut il defcendit de cheval, & ayant vû que Schah-Thamas faifoit quelques mouvemens pour mettre auffi pied à terre, il courut vers lui pour l'en empêcher.

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