tôt, combien il lui feroit aifé 1700 d'affranchir fa Nation, de la Domination Perfanne, s'il avoit le courage de l'entreprendre. De retour en fa patrie, il communique fon projet à fes amis & aux Chefs du pays; leur fait voir la facilité qu'il y avoit d'en venir à l'exécution fans aucun rifque & les perfuade fi bien, que d'un confentement général, il eft autorisé à agir pour la liberté. On commence par maffacrer tous les Perfans répandus dans le païs : on proclame enfuite folemnellement Mirr-Weys,Prince de Candahar & Chef de toute la Nation Aghuane; & en peu de jours le nouveau Souverain fe trouve folidement établi dans fa Domination après une legére oppofition du côté de la Perfe. Telles furent 1710 les opérations de l'année 1710. Mirr-Weys ne porta pas plus

loin fes vûes: il ne s'étoit propo

fé

que

de délivrer fa Nation du joug Perfan qu'elle fubiffoit de- 1710 puis long-tems, il en étoit heureusement venu à bout: tant qu'il vécût, il fe borna à une fimple défensive contre la Cour de Perfe; autant d'armées qu'on envoya contre lui, furent ou entiérement défaites, ou repouffées & obligées de fe retirer fans fruit & avec honte: & enfin, après fept ou huit ans d'une Domination bien affermie, il mourut fans avoir jamais pensé à devenir le Conquérant de la Perfe.

Mais Mirr-Maghmud fon fils & fon Succeffeur, fut plus hardi 1717 & plus entreprenant: après que par des excursions fréquentes & toujours heureuses, il eut répandu partout aux environs la terreur du nom Aghuan, fans trou ver prefque aucune résistance, & qu'il fe fut bien affuré de l'impuiffance où étoit la Cour de

Perfe, non-feulement de le ré1717 duire, mais de fe défendre ellemême contre quiconque voudroit l'attaquer, il conçut de plus hautes efpérances & forma le hardi deffein d'aller attaquer le Sophi, jufques dans fa Capitale.

pes

Il partit donc de Candahar 1721 en Décembre 1721. à la tête de foixante mille hommes de trouchoifies; & au bout de trois mois fe préfenta devant Ifpahan. Les Aghuans n'entendoient rien à faire un fiége, & ne pouvoient efpérer de prendre la Ville que par famine: ils fe contentérent donc de la refferrer, en lui ôtant toute communication au-dehors & s'appliquérent uniquement à fournir leur camp de toutes les munitions néceffaires. Les premiers mois du fiége fe pafférent avec une auffi grande fécurité au-dedans de la Ville, que fi elle

n'eut point été affiégée; mais la famine commença à se faire sen- 1721 tir fur la fin de Juillet: le blé manqua totalement au commencement d'Octobre, & bien-tôt cette grande Ville, fe vit réduite aux extrémités des plus cruelles famines. Le malheureux SchahHuffein, du fond de fon Haram entendit les cris de fon Peuple: il fe reconnut l'auteur de la mifére publique & pour y mettre fin, il prit de lui-même la résolution de paffer dans le Camp des Aghuans, & de remettre la Cou ronne & l'Empire à Maghmud : ce qu'il exécuta le 23o. Novembre 1722. après fept mois de 1722 fiége.

Telle fut la premiére Révolu tion qui renverfa du trône les Sophis; je n'ai fait qu'en indiquer les principaux événemens, autant qu'il en falloit pour l'intelligence de la feconde, dont je vais

donner l'histoire. Ceux qui defi1722 reront être inftruits plus particuliérement fur l'expédition des Aghuans, peuvent lire l'Hiftoire (1) des Révolutions de Perfe, qui a paru en 1728. elle eft élégamment écrite,& dans le plus grand détail: celle-ci n'en eft proprement qu'une fuite.

La nouvelle Révolution n'eft pas moins digne de curiofité, que la précédente ; je ne fçais même fi on ne trouvera pas dans les faits que nous allons préfenter quelque chofe de plus fingulier & de plus frappant. La Domination Aghuane anéantie avec autant de facilité & de promptitude, qu'elle en avoit trouvée à s'élever. Un grand Royaume reconquis en moins

(1) Cette hiftoire eft du R. P. du Cerceau Jéfuite: elle a été imprimée en 2. vol. in-12.chez Briaffon Libraire rue S. Jacques, qui vient d'en faire une nouvelle édition.