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Théorie, c'eft que l'accord entre le calcul & l'observation s'eft trouvé d'autant plus parfait, que le premier a été plus rigoureux, & la feconde plus précife.

La Théorie de la Lune a reçu dans les mains de MM. Euler, d'Alembert & Clairaut, un degré de perfection auquel il fera très-difficile de rien ajouter.

Le premier de ces grands Géomètres a dé terminé les inégalités des Planètes résultantes de leur action mutuelle, & a fait voir que la diminution de l'obliquité de l'Ecliptique, en étoit une fuite néceffaire.

Nous devons au fecond, la première folution rigoureufe du Problême de la Préceffion des Equinoxes, & de la nutation de l'axe de la Terre; & la méthode qu'il a imaginée pour y parvenir, eft un chef-d'oeuvre de Dynamique (i).

La Théorie de la figure de la Terre & la prédiction du retour de la Comète de 1759, d'après le calcul des altérations occafionnées dans fon mouvement par les attractions de Jupiter & de Saturne, font le plus grand honneur à M. Clai raut & à la Géométrie françoife.

Dans ces derniers tems, l'illuftre M. de la Grange a déterminé par une fublime analyse, les inégalités des fatellites de Jupiter, & les Phénomènes de la Libration de la Lune.

Enfin, le Flux & le Reflux de la mer ont été foumis au calcul par MM. Daniel Bernoulli

(1) Ce mot, venant du grec Awarтai, être puissant eft le nom d'une partie des Mathématiques qui s'occupe des forces.

Maclaurin & Euler; & M. de la Place vient de reprendre cette matière, & de la traiter avec plus de rigueur qu'on ne l'avoit fait encore, dans fes Nouvelles Recherches fur le Syftême du Monde, inférées dans les Mémoires de l'Académie pour les années 1775 & 1776.

EN CONSIDÉRANT les progrès de l'Aftronomie, on ne peut fe refufer à un jufte fentiment d'admiration pour l'intelligence de l'Homme qui, habitant un Globe d'une auffi petite étendue que la Terre, eft parvenu cependant à mefurer les diftances des grands Corps qui fe meuvent.au loin dans l'efpace, à foumettre leurs mouvemens à des calculs précis, & à déterminer le principe qui entretient le mouvement de l'Univers. Aucune autre fcience ne fait autant d'honneur à l'efprit humain, foit par la grandeur & l'importance de fon objet, soit par le nombre & l'enchaînement des vérités. L'Af tronomie embraffe toutes les parties des Mathématiques; les découvertes les plus intéreffantes de la Géométrie, de l'Optique & de la Méchanique, lui appartiennent; & c'eft par les fublimes applications que les grands Géomètres de ce fiècle ont faites de l'analyfe au Systême du Monde, qu'ils fe font le plus illuftrés. Cette fcience a d'ailleurs contribué à beaucoup d'égards au bien de l'Humanité. La Géographie & la Navigation lui font redevables des moyens les plus fûrs que l'on connoiffe pour fixer la pofition des lieux de la Terre, & pour fe conduire fur la vafte étendue des mers. Mais fon principal avantage, eft d'avoir délivré les

hommes des vaines frayeurs enfantées par l'ignorance, & nourries par la fuperftition. Dans les ténèbres de l'ignorance, l'homme foible & timide tremble à chaque Phénomène extraordinaire qu'il voit paroître; il craint que ce ne foit l'avant-coureur de quelque révolution finiftre; impatient d'en connoître la caufe, il ne peut refter long-tems dans un doute pénible, fon imagination lui crée de vains, fantômes auxquels il attribue l'objet de fa terreur, & qu'il cherche à fléchir : de-là ces frayeurs extravagantes de plufieurs peuples à la vue des Eclipfes (1), ou à l'apparition des Comètes. Si

(1) Les Mexicains imaginoient que la Lune dans fes éclipfes avoit été bleffée par le Soleil à la fuite d'une querelle que ces deux Aftres avoient eue ensemble. En conféquence, ils jeûnoient, leurs femmes fe maltraitoient elles-mêmes, & les filles fe tiroient du fang des bras.

Les Indiens artribuent les Eclipfes à un Dragon malfaifant qui veut dévorer la Lune. Les uns font un grand vacarme pour lui faire lâcher prife, pendant que les autres fe mettent dans l'eau jufqu'au col pour l'appaifer. Cet ufage bifarre eft entretenu par la mauvaife foi des. Brames qui fe font donner des aumônes pour la délivrance de la Lune. Je tiens ce dernier fait d'un homme très éclairé, qui connoît parfaitement l'intérieur de l'Inde, & qui en arrive.

Ce n'a été que vers la fin du dernier fiècle que nous avons ceffé de nous effrayer à la vue des Comètes & des Eclipfes. La Coměte de 857 infpira une telle crainte à Louis-le-débonnaire, que ce Prince fuperftitieux & foible confulta à ce fujet tous les Aftrologues de fon empire, & fonda des Monaftères. Il mourut deux ans après de la frayeur que lui caufà une Eclipfe totale de Soleil. La grande queue qué traînoit après elle la Comère de 1456 répandit la terreur dans l'Europe déjà

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l'homme a montré trop d'orgueil en fe faifant le centre de la Nature, & en rapportant à for tous les Phénomènes céleftes, on peut dire qu'il en a été bien puni par les craintes qu'ils lui ont infpirées. Heureufement la connoiffance du vrai Systême du Monde a banni pour jamais ces craintes & les fuperftitions qui en font nées. Ce n'eft pas que le peuple foit plus éclairé qu'autrefois, mais il n'a de préjugés que ceux qu'on

effrayée des fuccès rapides des Turcs qui venoient de détruire l'Empire Grec. Le Pape Caliste ordonna une espèce d'Angelus que l'on récitoit le matin, à midi & le foir, & dans lequel on conjuroit la Comète & les Turcs. Obfervons ici, à l'avantage des Sciences, que cette Comète a reparu dans ce fiècle en 1759, fans caufer la moindre frayeur; mais elle a excité l'intérêt le plus vif dans l'efprit des Géomètres & des Aftronomes, par la confirmation que l'on en attendoit & qu'elle a donnée de la Théorie des Comètes & des changemens qu'elles éprouvent par l'action des Planètes. L'Empereur Charles- Quint crut reconnoître dans la Comète de 1556 un figne célefte qui l'avertiffoit de fonger à la mort. Enfin en 1686, les Proteftans en France regardoient les Comêtes qui venoient de paroître en grand nombre, comme les avant-coureurs des perfécutions qu'ils effuyoient. La crainte des Comètes & des Eclipfes étoit alors fi généralement répandue, que Bayle crut devoir réfuter toutes les raifons futiles dont on fe fervoit pour la juftifier. Il publia fur cet objet fes Penfées diverfes, ouvrage rempli d'excellentes réflexions qui même aujourd'hui ne font pas tout-à-fait inutiles. A l'occafion de l'Eclipfe du 12 Août 1654, il rapporte l'anecdote fuivante. « La confternation, dit-il, étoit fi "grande, qu'un Curé de campagne ne pouvant fuffire à "confeffer tous fes paroiffiens qui croyoient en mourir, » fut contraint de leur dire au prône qu'ils ne fe pref-. n faffent pas tant, & que l'Eclipfe avoit été remife 'à la » quinzainé ».

lui donne ; & les lumières font aujourd'hui trop répandues, pour qu'une opinion ridicule ou fuperftitieufe s'accrédite & fubfifte long-tems.

Remarque fur le Systême de Copernic.

Je terminerai ce Précis Hiftorique, par la remarque fuivante qui me paroît mériter l'attention des Lecteurs.

Le mouvement de la Terre eft la base de l'Aftronomie, & toutes les découvertes importantes que l'on a faites dans cette Science depuis Copernic, font intimement liées à ce mouvement. Son existence avant Newton étoit extrêmement vraisemblable; mais la découverte de la Gravitation universelle a porté à un tel point fa probabilité, qu'il n'y a rien de mieux prouvé dans la Philofophie naturelle. Pour établir cette affertion, confidérons d'abord les preuves que les obfervations feules peuvent fournir du mouvement de la Terre.

Tous les Corps céleftes nous paroiffant fe mouvoir d'Occident en Orient dans l'efpace d'environ 24 heures, il eft infiniment probable qu'il exifte une caufe commune à tous ces mouvemens. Or, fi l'on obferve que le Soleil & la Lune font à des diftances très-différentes de la Terre, qu'il en eft de même des Planètes, des Comètes, & des Etoiles, enforte que tous ces Corps font ifolés entr'eux; on fentira facilement que ce n'eft point dans le Ciel qu'il faut chercher la cause générale de leur mouvement diurne, & qu'il n'eft qu'une apparence occafionnée par le mouvement de la Terre fur elle-même. D'ailleurs la

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