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le mort de ce qu'il doit paffer l'éternité avec les Juftes, dans le féjour de la paix & du bonheur. Ceux qui ont des tombeaux à eux, y mettent leurs morts dans les places qui les attendent. Ceux qui n'en ont pas les gardent dans leurs maifons en des lieux préparés pour cet usage, & pofent leurs cercueils debout contre la muraille. Ils retiennent auffi chez eux les corps de ceux qui font exclus de la fépulture pour raifon de crime ou de dette ; & il arrive quelquefois que leurs defcendans, devenus riches ou puiffans fatisfont leurs créanciers on poursuivent leur juftification, & parviennent enfin à les faire enfevelir honorablement; car les Egyptiens fe font fait de tout tems une religion d'honorer particulièrement leurs parens morts. Ils donnent affez fouvent leurs corps pour fûreté de leurs. dettes, & ceux qui ne les retirent pas font déclarés infames pendant leur vie, & privés de fépulture après leur décès.

Tel eft le récit de l'Hiftorien Grec fur les loix & les coutumes des Egyptiens touchant les funérailles. Je n'ai pas

cru, mon fils, en vous parlant de ce qui s'étoit pratiqué à l'égard des Rois, devoir en féparer ce qui s'observoit auffi fur ce point à l'égard des particuliers, puifque le même efprit de fageffe se retrouve dans l'un & dans l'autre ufage, par rapport au grand art du gouvernement, qui confifte à rendre, par fes inf titutions & fes coutumes, les hommes meilleurs, pour les rendre tous enfemble plus heureux.

Je ne vous dirai pas à quelle époque le fafte qui régnoit à la Cour des Pharaon a pu, en s'y introduifant, diminuer la force des inftitutions primitives & influer fur le corps de la Nation. Lorfque Jofeph eft prifonnier en Egypte, nous y voyons de grandes charges, qui, faisant partie de la maison du Souverain, en annoncent affez la pompe & la magni ficence; & dès-lors les grands Officiers de la Couronne dépendoient, à ce qu'il femble, pour la liberté, l'honneur, & la vie, des caprices & de la volonté du Monarque. Ils avoient tout à espérer de fa faveur, & tout à craindre de fa

difgrace (1). Le jour même où l'on célèbre l'anniverfaire de fa naiffance, dans . la chaleur d'un feftin qu'il donne à fes Courtifans, Pharaon fait attacher l'un de les principaux Officiers à une croix, & rétablit l'autre dans fes fonctions. En remettant deux ans après fon anneau à Jofeph, il veut que tout fléchiffe le · genou devant fon Miniftre, & que l'Egypte entière obéiffe à fes moindres ordres. Le Prince a fes Eunuques. Le Général de fes troupes, le Grand Echanfon, le Grand Pannetier font de ce nombre. Il paroît, il eft vrai, que le mot d'Eunuque n'est ici, selon la remarque que nous en avons faite, qu'un titre d'office; mais ce titre, en élevant au deffus des autres ceux qui en étoient décorés, n'en faifoit, après tout, que des efpèces d'efclaves du Monarque.

Nous ne favons au refte ni dans quel tems précis, ni de quelle manière on altéra le fens primitif du terme d'Eu

(1) Voyez les endroits de la Genèfe que nous avons cités plus haut, p. 6, note.

nuque, en admettant cette coutume ba: bare, qui dégrade un fexe pour en faire la garde de l'autre. Des Savans ont penfé qu'elle prenoit fa fource dans la punition qu'infligeoient les Loix à un certain genre de coupables; il en .. eft au contraire qui ont prétendu démontrer que les Eunuques du palais, pris dans le dernier fens que nous venons d'expofer, devoient leur exiftence à une toute autre caufe, & que cette forte d'esclavage avoit commencé par les enfans, avant qu'ils euffent été en âge de inériter de fi grands châtimens.

Quelque origine qu'ait eue un ufage fi contraire à la nature & fi injurieux à l'humanité toute entière, il paroît avoir exifté à la Cour des Pharaon, avant la fortie des Ifraélites. Il falloit même que ces Eunuques fuffent déjà très communs du tems de Moïfe, puifqu'il défend qu'aucun homme, ainfi dégradé, n'ait entrée dans la maison du Seigneur.

Sous le règne du Monarque qui dut aux confeils de Jofeph le falut de fon Empire, l'Egypte étoit déjà divisée en

plufieurs provinces (1) que les Grecs ont appelées Nomes dans leur langue, & dont chacune avoit pour chef un Nomarque ou Gouverneur particulier, qui levoit les deniers du Prince, & régloit toutes les affaires dans fon reffort (2). Nous avons vu que Séfoftris avoit fait une nouvelle diftribution de ce Royaume en trente-fix gouvernemens. Il avoit auffi partagé entre fes foldats les terreins les plus fertiles, pour qu'ils fullent fans inquiétude fur le fort de leur famille pendant tout le cours de fon expédition.

Il a été un tems où tous les revenus des terres étoient divifés en trois portions; mais ce partage, qui ne laiffoit rien au plus grand nombre des habitans, n'existoit plus, lorfque Joseph gouverna l'Egypte (3), ou, à en juger par le récit de Diodore (4), n'a eu lieu que

(1) Gen. c. 41, V. 34.

(2) Diod. l. 1, p. 50 & 66.
(3) Gen. c. 47, . 20 & sujv,
(4) Diod. 1. 1, p. 66.

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