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genre humain a perdu de vue l'unique & vrai principe de toutes chofes, le Créateur de tous les êtres ; tout a fuffi à fes adorations. Les aftres, les hommes, les animaux, toutes les parties de la Nature, ont été, comme en Egypte, fucceffivement ou toutes enfemble, le fcandale & l'écueil de fa foible raifon. Toute la Nature s'eft animée; de bons & de mauvais Génies ont préfidé à toutes fes productions; elle s'eft trouvée peuplée d'Efprits, qu'on adoroit fous le fymbole des objets qui leur étoient confacrés, ou qui les repréfentoient. Ces fignes repréfentatifs ont formé les hiéroglyphes, que la fuite des tems a fi fort obfcurcis.

Parmi tous ces cultes, un des premiers, Le premier peut-être, a été celui dont parle Job (1), c'eft-à-dire, le culte du Soleil & de la lune, qui fut fuivi de celui des autres aftres, des planètes, & de toute la milice du Ciel; ce qu'on a appelé le Sabéifme ou Sabaïsme, fi fuivi dès fon com

(1) Job. 31, V. 26 & 27.

mencement (1). Une autre fecte très-ancienne, qui tenoit à la première, a été celle du Magifme, qui confiftoit principalement dans l'adoration du feu, confi déré, fur-tout par les Perfes qui en faifoient leur divinité, comme le feu vital: répandu dans l'Univers pour le mouvoir & pour l'animer (2). Cette fecte étoit née, dit-on, dans Ur, ville de Chaldée qu'avoient habitée les ancêtres d'Abraham & que ce Patriarche quitta avec fon père, Tharé pour aller à Haran..

Un troisième culte, qui ne paroît pas avoir été postérieur de beaucoup à ceux dont nous venons de parler, a été celui des perfonnages de l'un ou l'autre fexe qu'on a déifiés après leur mort, & qu'avoient illuftrés pendant leur vie leurs exploits ou leurs bienfaits. Ce culte a été joint très-fouvent à celui des aftres, que ces Divinités étoient cenfées animer; foit

(1) Voyez ci-deffus, p. 443, note: (e). (2) Voyez les Théophanies païennes, Mé moires de l'Acad. des Infcript., tome XXXVI, in-49. & LXVLin-12, p. 153, & p. 165, note.

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que leurs ames, qu'on croyoit en être forties, y euffent été réunies après avoir quitté leur dépouille mortelle, foit qu'elles en fiffent leur demeure la plus ordinaire. C'est ainsi qu'Ofiris & Ifis furent adorés dans l'Egypte, comme étant les symboles du Soleil & de la Lune (1), & que leur culte fut confondu avec celui de ces deux aftres; c'est ainfi encore que les Chaldéens mirent leur Bélus au rang des Dieux, & continuèrent en même tems à adorer le Soleil fous le nom de Bélus, de Baal, on Baal-Semen, qui veut dire Seigneur du Ciel; de même que les Moabites l'adoroient fous le nom de Béelphégor; les Phéniciens fous le nom de Baal, comme les Chaldéens; & les Perfes fous celui de Mithra,

Le culte des morts illuftres a pu devoir en partie fon origine au refpect que les hommes de ces anciens tems portoient à leurs ancêtres, fe perfuadant aisément qu'ils erroient dans les lieux dont, ils

(1) Diod. l. 1, p. 10. Plutarch. de Ifid.& Ofirid. n. 27.

avoient fait leur demeure, & qui leur avoient été les plus chers. On leur éleva par la fuite, dans quelque endroit de la maifon, une espèce d'autel où l'on brûloit en leur honneur des paftilles, de l'encens, & aux pieds duquel on alloit, dans les occafions importantes, fe profterner devant eux, les confulter, & implorer leur fecours.

La coutume de déifier les hommes après leur mort fe répandit chez toutes les Nations; mais, comme nous l'avons fait voir en parlant des Egyptiens & des Phéniciens, c'eft, felon l'opinion la plus probable, parmi ces deux peuples que le Paganisme a pris le nom de ses principales Divinités, & tout le fond de sa Théogonie (1), à laquelle les Philofophes & les Poëtes de ces différentes contrées ont lié comme ils ont pu, par tradition & plus fouvent par fyftême, des Cofmogonies (ou origines du monde), qui font bien

(1) Naiffance, origine des Dieux, & par extenfion, tout fyftême religieux imaginê dans le Paganisme.

peu d'honneur à leurs inventeurs. Au nombre des anciennes Cofmogonies, on peut compter celle des Chaldéens, dont parle Bérofe dans le fragment que nous a laiffé le Syncelle, & que nous avons cité plus haut; celle des Phéniciens renfer mée dans le morceau que nous avons rapporté de Sanchoniathon, & celle des Egyptiens, telle que nous l'a transmise Diodore de Sicile (1), ou telle peut-être qu'il la leur a prêtée. Celle-ci en effet tient beaucoup au fyftême de quelques Philofophes de la Grèce, expofé par ce même Hiftorien dès le commencement de fon premier livre, & que l'on peut mettre au nombre des Cofmogonies plus modernes. On peut voir les autres dans l'introduction à l'Hiftoire universelle des Savans Anglois; & il faut convenir que toutes ces inventions de la fageffe humaine étoient pour la plupart auffi favorables au matérialisme, que contraires à la faine physique, à la nature des chofes, & à la raison.

(1)Diod. l. 1, 9; & voy. ci-deffus, t. 1, p. 21.

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