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Enfin l'Empereur Juftinien leur accorda encore un dernier benefice qui étoit appellé beneficium ordinis, feu excuffionis, en vertu duquel le fidejuffeur pouvoit contraindre le creancier à difcuter les biens qui appartenoient au principal debiteur avant de venir contre lui. Nov. 4. cap. 1.

L'Empereur Juftinien, après avoir ainfi pourvû aux fidejuffeurs voulut auffi favorifer les tiers - Detempteurs, & par la même Nov. au ch. 2. il voulut qu'on ne pût inquieter ceux qui auroient acquis des biens affectez & hypotequez à une créance, qu'après avoir difcuté tant les débiteurs, que les cautions. L'efprit de cette Nov. eft rendu dans deux Auth. l'une au C. de obligationibus; & act. Sed hodie novo jure priùs conveniendi funt omnes fidejuffores mandatores, & fponfores, quam ad pignorum perveniatur poffeffores: L'autre au code de pig. 5 hypot. Hoc fi debitor poffidat, alio vero poffidente inhibetur hypotecaria, donec perfonaliter actum fit cum reo, & interceffore; & fi nec ex hypotecis debitoris fatisfiat tunc demum intercefforis hypoteca, fi qua funi petantur.

Il feroit plus de curiofité que d'utilité de fçavoir la véritable gra dation de ces trois Benefices; la plupart de nos Auteurs traitent de celui appellé, cedendarum actionum, après avoir traité des deux autres; ce qui feroit préfumer que ce benefice feroit le dernier de tous: mais je trouve dans des Commentaires fur les Inftituts que Me de Loy,Doyen desProfeffeurs en Droit de la Faculté de Paris, donna au Public en 1711. & dans la compofition defquels je fçai que M. Malzard, Aggregé en la même Faculté, eut grande part; Que ce benefice eft à la tête des deux autres; & je fuis convaincu que M. Malzard a eu de bonnes raisons pour en ufer ainfi : J'embraffe avec plaifir l'occafion de parler de ce Jurifconfulte.

C'étoit de l'avis de tous les gens fçavans,un des hommes le plus verfé dans la Jurifprudence que nous avons eu depuis M. Cujas ; l'Auteur du Novitius l'a mis à la fin de fon Dictionnaire dans l'ordre chronologique des Auteurs illuftres; & il en parle en ces ter

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mes. Bernardinus Malzard Conftantienfis, alter Cujacius. Il m'avoit conduit dans mon Droit, & mes deux freres, & depuis il s'eft toûjours fait un plaifir de réfoudre mes doutes; en mourant il m'a nommé fon Exécuteur Teftamentaire, & m'a legué fes manuf

crits.

Ces différens privileges accordez tant aux cautions qu'aux Détempteurs, n'ont pas néanmoins une égale faveur.

Le privilege appellé cedendarum actionum, celui de divifion entre les cofidejuffeurs folvables, & celui de difcuffion du débiteur principal, avant de venir contre les cautions, sont si justes, qu'on peut les regarder plûtôt comme des droits communs, que comme des privileges, & qu'ils ont toujours lieu quand les caucions & fidejusseurs n'y ont pas renoncé; ce qui est rare, la renonciation au benefice de divifion, difcuffion, & fidejuffion ayant paffé en stile.

En effet, fi dans le Droit du Code, les cautions étoient folidairementobligées entr'eux, & folidairement avec les principaux débiteurs, c'étoit par une forte de fubtilité, & parce que l'on étoit infiniment attaché aux formules; en forte que plufieurs fidéjusfeurs s'obligeans de payer pour le principal débiteur; on donnoit à cette obligation l'interprétation la plus rigoureufe, & on les regardoit comme obligez en leurs noms particuliers à la totalité de la dette conjointement & également avec le débiteur. L. non rectè, L. jure noftro. & L. reos 23. C. de fidejuff.

Mais à confulter les principes de l'équité, & l'intention même de celui qui fe rend caution; il eft certain qu'il n'entend qu'affûrer la dette du créancier, répondre de la solvabilité du débiteur principal, mais non pas devenir lui-même débiteur principal, direct, & immédiat.

Etc'eft en fuivant l'équité & la volonté préfumée des cautions ue le benefice de divifion leur a été accordé.

que

Quant aux fidejuffeurs entr'eux, il eft sensible que s'unissant

enfemble pour fe rendre garants & refponfables du débiteur principal, ils font mandataires les uns des autres, & coobligez à une même créance, raison pour laquelle il étoit juste de leur accorder entr'eux le benefice de divifion.

Ainfices fortes de benefices font fondez en une fi grande équité, qu'on peut les regarder comme des droits écrits, ou fous-entendus dans les actes même de cautionnements quand on n'y a pas renoncé expreffément.

Ce feroit une queftion, en fupofant qu'il y eût des endroits où ces benefices ne fuffent pas accordez aux fidejuffeurs, que de fçavoir quelle des deux Loix differentes il faudroit obferver, dans le cas où le créancier demeureroit dans un lieu qui excluroit la difcuffion, & le fidejuffeur dans un autre qui l'admettroit.

J'ai traité les principes fur cette difficulté en mes questions fur les démiffions de biens pag. 151. queft. 6. où je renvoirai présen tement, parce que je crains de m'écarter trop de mon titre; & d'ailleurs ces exceptions font devenuës tellement des droits communs, & font fi juftes, qu'on ne croit pas qu'il y ait aucune nation policée qui les rejette; du moins pour les cas où ils font communement admis; enforte que la difficulté s'en presentera ra

rement.

Mais quant au benefice de difcuffion accordé aux Détems pteurs, il n'a pas la même faveur.

En effet, les hypoteques font l'acceffoire de l'obligation principale, & en font la fureté; par cette raifon il ne femble pas jufte qu'un debiteur puisse par fon fait enlever au creancier les gages & les furetez qu'il lui a donné, ni retarder fon payement.

Mais enfin on a cru, que puifque ces furetez ne font que purement acceffoires, il n'étoit pas jufte de troubler un Acquereur qui a acquis dans la bonne foi, tant que le debiteur eft folvable; & ç'a été la raifon du benefice de difcuffion accordé aux tiers-Detempteurs....

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Quoique ce benefice ne foit pas univerfellement accordé aux Detempteurs par toutes nos Coutumes, il faut pourtant convenir qu'il y a une ancienne Ordonnance de 1384. qui l'admet. Creditores, dit cette Ordonnance, non poffunt profequi emptores rerum obligatarum, nifi debitoribus principalibus primo profecutis.

Mais cette Ordonnance n'a pas appareminent eu une exécution générale, puifque nous avons plufieurs Coutumes qui n'admettent pas la difcuffion.

Or, pour connoître fi ce tiers-Detempteur peut, ou ne peut pas propofer la difcuffion; il faut confulter quelle eft la Loi d'où il peut emprunter ce benefice.

Il est certain que ce tiers-Detempteur n'a ce benefice qu'en fa qualité de Detempteur; c'est à raifon de l'heritage qu'il detient, qu'il eft poursuivi; & c'est l'heritage qui lui donne ou ne lui donne pas ce benefice.

En effet, l'action que l'on dirige contre un tiers-Detempteur est, comme on l'a montré dans la question précedente, une action réelle, qui tend à enlever au Detempteur l'heritage dont il eft proprietaire, c'eft une forte de revendication.

Or, la difcuffion eft une exception que le tiers-Detempteur propose contre cette action réelle; mais d'où peut-il emprunter cette exception,que de la Loioù eft fitué l'heritage, à l'occafion duquelil a cette exception; c'est parce qu'il eft Detempteur qu'il eft poursuivi, & c'est parce qu'il eft Detempteur qu'il a l'exception; c'eft donc à la Loi de l'heritage qu'il faut recourir pour regler la deffenfe & l'exception du Détempteur.

On a dit dans la queftion précédente,que c'étoit l'heritage qui fe deffendoit par la prescription, & dans celle ci l'on continuë de dire que c'est l'héritage qui se deffend, mais par la voye de la difcuffion.

Me Julien Brodeau, qui fur la queftion de la prescription, a cru que c'étoit le domicile de l'Acquereur qu'il falloit confulter,

pour regler la qualité de la prescription, trompé par la Loi derniere au C. de præfcript, longi temporis, n'a pas embraffé la même décifion au fujet de la difcuffion, & il a nettement decidé, tant fur l'art. 101. de la Coutume de Paris, que fur M. Louer, lettre H. Som. 9. qu'il falloit fuivre la Coutume de la fituation de l'héritage: Voici comme il parle fur la Coutume de Paris. "La difcuffion ,,étant réelle,il la faut regler fuivant laCoutume du lieu où les héri,, tages fujets à difcuffion font affis, & non fuivant la Coutume du domicile du débiteur;,, & il cite à ce fujet M. Bouguier en fes Arrests, Let. D. N. 14. in fine.

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Cette citation n'est pas jufte;c'est au N. 16. où M. Bouguier s'explique fur cette queftion. "Par le même Arreft, dit-il, la difcuffion fut jugée felon la Coutume de Bourbonnois de tous les biens de Gilbert Goujon qui avoit conftitué le doüiaire, auparavant que fe pouvoir adreffer aux tiers-Acquereurs, bien que par ,, la Coutume de Paris,fuivant laquelle le douaire fut jugé propre, & non viager, les tiers- Detempteurs d'héritages chargez d'une ,,rente font tenus & obligez, fans aucune difcuffion du principal », débiteur, d'autant que cette difcuffion étant réelle, elle fe devoit „regler fuivant les Coutumes du lieu où les héritages sujets à difcuffion font affis, autrement l'Arrest seroit contraire en foy; ,, il eft dus May 1602.

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Bafnage en fon Traité des Hypoteques, ch. 16. a adopté la même décision. « Si l'obligé perfonnellement demeure en un endroit, & que les immeubles qu'il a vendu depuis qu'il s'eft conftitué, foient fituez en un autre où l'ufage eft different, fe„, ra t'on tenu de se regler par la Coutume du débiteur, ou par celle du lieu où font les héritages; l'on repond, qu'il faut fuivre l'ufage du lieu où les héritages font fituez, parce que la difcuffion s'éxécute fur le fond.

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De Lalande fur l'art. 436. de la Coutume d'Orleans eft aussi du même avis,

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