Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Par rapport aux deux premiers Statuts, pour connoître s'ils font réels ou perfonels.

in

On peut éxaminer avec Rodemburgius, quid, quale fit quod prohibitionem,permiffionem aut difpofitionem ftatuti ceciderit, & dire avec lui que le Statut eft réel ou perfonnel, fuivant que le Statut difpofera de la perfonne ou de la chose.

Ainfi s'agira-t'il de fixer la majorité ou la minorité, la liberté ou la dépendance, l'homme maître ou l'homme lié, ou interdit; je dirai que cette Loi est personnelle, son objet se terminant à fixer la qualité de la perfonne.

S'agira-t'il de retraits, de propres en matiere de fucceffions; de droits d'aîneffe, de forclufions dans les Fiefs, & de femblables difpofitions de Coûtume, qui font la Loi aux choses, fans que l'action de l'homme y foit néceffaire; je dirai que ces Statuts font réels, & regarderai ce que les Loix, maîtreffes des biens qui font dans fon territoire, en ont ordonné ; & c'est par raport à cette premiere efpece de Statuts que peut paffer ce que tous nos Auteurs ont dit, que les Statuts qui difpofent de l'état de la perfonne, abstraction faite des biens, font perfonnels, & que les Statuts qui difpofent des choses, abstraction faite des perfonnes font des Statuts réels.

Mais dès lors doit on définir un Statut perfonnel, celui qui régle la perfonne, abstraction des biens, & le Statut réel celuiqui régle les biens, abstraction de la perfonne; fi cela étoit, dès qu'un Statut difpoferoit de la perfonne & des biens, il ne feroit. plus poffible de ranger ce Statut fous l'un de ces deux genres, &. il faudroit admettre une troifiéme forte de Statuts, qui feroient. mixtes, tels que d'Argentré les a admis, mais qui ont été rejettez par tous nos Auteurs.

Il faut donc tâcher de trouver un caractere diftinctif du Statut perfonnel, & du Statut réel; & c'est là où est tout l'embarras. Pour y parvenir, il femble néceffaire de présupposer une Loi

C

générale qui dispose universellement de la perfonne, & ensuite une Loi particuliere qui défend ou permet par la fuite, & par la confequence de cet état général, ou bien qui défend ou permet, en mettant dans l'homme une capacité ou incapacité, qui n'est celle de fon état général, ou même qui donne atteinte à cet état général.

pas

Le Statut qui difpofe de l'état univerfel de la perfonne, est incontestablement un Statut perfonnel; celui qui permet ou défend en consequence de l'état général de la perfonne, eft auffi un Statut personnel, encore que la permiffion ou la défense se porte vers les biens.

Le Statut qui difpofe des chofes, ou les défend contre l'état général de la perfonne, ou par une capacité ou incapacité, qui n'eft pas celle de fon état général, fera un Statut réel.

Par exemple, ce Statut. ( Un mineur ne peut pas aliener fes biens) ne prohibe l'alienation des biens qu'en confequence de l'état général du mineur, & dès lors ce Statut eft personnel. Cet autre, (la femme mariée & en puiffance de fon mari, ne peut contracter fans l'autorisation de fon mari) eft encore un Statut perfonnel; parce que la défense d'aliener fans l'autorisation, eft la fuite de la puiffance maritale.

Au contraire ceux-ci : ( l'homme ne peut pas difpofer entrevifs de la totalité de fes biens; mari & femme ne peuvent fe donner que mutuellement, & ne peuvent fe donner que tels & tels effets;) ces Statuts font réels, parce qu'ils prohibent contre l'état général des perfonnes. Un homme fui juris pouvant difpofer généralement de tous les biens.

Ainfi dans les Statuts, foit prohibitifs ou permiffifs, il faut confiderer si la prohibition ou permiffion eft fondée fur l'incapacité ou la capacité générale de la perfonne, ou fi cette prohibition ou permiffion est faite à l'homme fans égard à fon état général; en un mot, il faut éxaminer si le Statut qui difpofe eft

contre, ou conformément à l'état général de la perfonne. Dans cette idée, il femble qu'on pourroit définir, ou plutôt faire la description du Statut perfonnel, en difant que le Statut perfonnel eft une Loi qui régit l'état de la personne fans parler des biens, ou qui ne regle les biens que par la confequence de cet état.

Le Statut réel au contraire, eft une Loi qui régle les biens fans parler de la perfonne, ou qui par rapport aux biens donne à l'homme une capacité ou incapacité, qui n'eft pas celle de fon état géneral.

Des éxemples éclairciront tout ce que deffus.

Un homme eft majeur à vingt ans par la Loi de fon domicile ; voilà l'état général de la perfonne, il a comme majeur le pouvoir de vendre & d'aliener fes immeubles. Ce pouvoir eft la fuite & la confequence de fa majorité.

Cet homme à des immeubles fituez dans une Coûtume où la majorité eft fixée à vingt-cinq ans, & où par confequent il lui eft défendu d'aliener fes immeubles.

Ce majeur dans le lieu de fon domicile portera sa majorité dans le lieu de la fituation, parce que la Loi de la fituation ne défend l'alienation des biens que par la consequence de la minorité.

C'est ce qui a été décidé par un Arrêt de 1666. rendu au Parlement de Normandie,& rapporté par Bafnage art. 431. de cette Coûtume, qui a jugé qu'une Demoiselle majeure de vingt ans en Normandie où elle étoit domiciliée, avoit pû aliener fes immeubles fitués à Paris.

Vice verfa; un homme eft domicilié dans une Coûtume où la majorité eft fixée à vingt-cinq ans, il a des immeubles fituez en Normandie & en Anjou, où la majorité eft fixée à vingt ans, cet homme ne pourra pas difpofer des immeubles fituez dans ces Coûtumes, parce que la Loi de fon domicile le déclare mineur, & que celle de la fituation qui permet au majeur de vingt ans,

d'aliener, est la suite & la dépendance de l'état général de la per

fonne.

C'est ce qui a été jugé par l'Arrêt de 1600. rapporté par Brodeau lettre C. n. 42. au profit d'un domicilié à Senlis, où il faut 25. ans pour être majeur, ce mineur vendit fon héritage fis en Anjou, où il fuffit d'avoir 20. ans ; mais il fut reftitué contre la vente du chef de fa minorité.

Pareille chose a été jugée au Parlement de Normandie par un Arrêt du 14 Aoust 1643. au profit d'un homme né & domicilié en Bretagne, où il faut 25 ans pour acquerir majorité,& qui fut restitué contre la vente de ses héritages sis en Normandie, où il fuffit d'avoir 20 ans.

Au contraire, nous avons plufieurs Coûtumes qui ne permettent de donner, même entre-vifs, & à quelque âge de majorité que ce puiffe être, qu'une certaine quotité de fes biens; cette Loi déroge à l'état général de la perfonne, en lui deffendant ce que, comme majeur, il auroit droit de faire; ce Statut est dès lors réel.

Ainfi quand je voudrai connoître fi un Statut qui difpofe des biens, & qui donne à l'homme par rapport à ces biens, une certaine capacité ou incapacité,eft un Statut personnel ou réel, j'aurai recours d'abord à l'état general de la perfonne, & enfuite j'examinerai fi ce que le Statut permet ou deffend, eft conforme à l'état general, ou s'il y eft contraire, & dérogeant.

C'est pourquoi tels Statuts qui permettent, ou difpofent de certaines actions de l'homme, doivent être regardez comme réels dans la partie qui déroge à l'état general de l'homme, & sont personnels dans l'autre partie.

Ce Statut, par exemple, tiré de l'art. 292. de la Coûtume de Paris. Toutes perfonnes faines d'entendement, âgées, & ufantes de leurs droits, peuvent difpofer par Teftament & ordonnance de derniere volonté au profit de perfonnes capables de tous leurs biens,

meubles & acquêts, & conquêts immeubles, de la cinquième partie de tous leurs propres heritages, & non plus avant : eft communément mis au nombre des Statuts réels,parce que l'on n'envifage dans ce Statut que la prohibition de difpofer au-delà de la cinquième partie des propres ; mais à parler éxactement, cette difpofition de Coûtume eft perfonnelle dans la partie qui permet la difpofition des meubles & acquêts, & quint des propres, cette capacité étant la fuite de l'état de la perfonne, & réelle dans la partie qui deffend la difpofition des quatre quints, cette prohibition étant contre l'état de la perfonne.

Le Statut qui permet dans la Coûtume de Paris en l'art. 280, aux maris & femmes de difpofer au profit l'un de l'autre mutuellement de leurs meubles & conquêts, eft appellé un Statut réel, parce que l'on ne confidere dans ce Statut que la prohibition de difpofer autrement.

Mais pour parler jufte, il faut dire qu'il eft perfonnel dans la partie qui permet, & réel dans la partie qui deffend.

Eh!.pourquoi, parce qu'en ce qu'il permet il est conforme à l'état general des conjoints, que nous fuppofons majeurs, & en ce qu'il deffend, il eft dérogeant à leur état.

Il eft vrai que l'art. 280. permet à tous conjoints, foit majeurs, foit mineurs, de fe donner mutuellement; mais cet article étant confideré dans la perfonne des mineurs, je dirai qu'il est réel dans toutes ses parties, en ce qu'il déroge à l'état de la mi

norité.

Ainfi, quand des conjoints majeurs prennent à titre de donation mutuelle dans d'autres Coûtumes, c'eft par la force du Statut perfonnel du domicile, qui fe trouve d'accord avec le Statut perfonnel de la fituation; quand ils font empêchez de prendre, c'est par la force du Statut réel de la fituation.

Je veux donc d'abord que l'on confidere l'état general de la perfonne; tous les Statuts qui permettront ou deffendront en con

« AnteriorContinuar »