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& je ne vois pas une difference raisonnable entre ces deux Sta

tuts.

M. Frosland a depuis donné au public fes mémoires fur la qualité des Statuts; il a fatisfait en cela à l'empreffement du Bareau, je n'ofe pas dire qu'il a eu quelqu'égard à la priere que je lui en faifois fur la fin de ma Differtation; & par ces nouveaux mémoires il vient de traiter la question.

Il avoue d'abord, que la maniere dont ont parle M. Louet, d'Argentré, Bafnage & quelques autres en expliquant la nature du Statut qui concerne la majorité, porteroit volontiers à croire qu'ils ont voulu donner la préférence à la Loy du domicile, & ce d'autant plus qu'il y a plufieurs de nos Confultants qui font de cette opinion.

A cela il répond trois chofes qu'il trouve également solides. La premiere, que fi dans leur explication & leur raisonnement ils ont feulement parlé de la Coutume du domicile, ce n'eft pas une raifon concluante pour dire qu'ils ont voulu rejetter celle de l'origine des perfonnes, comme ne pouvant eftre d'aucune confidération parce qu'il fe peut faire que ces perfonnes avoient pris naiffance dans les mêmes Coutumes où elles avoient leur domicile, quoique ces deux articles n'ayent pas été nettement diftinguez par nos Auteurs.

La feconde, que nous avons parmi nous un très-grand nombre d'habiles gens qui eftiment que la Loy d'origine, & de la naiffance non accidentelle eft celle qui doit uniquement décider en pareil cas.

Et la troifiéme, que cette opinion peut être parfaitement bien foûtenaë par l'Arrêt du Parlement de Bretagne du 27 Février 16 58. rapporté par Sauvageau, par quelques autres qu'il dit avoir vû rendre au Parlement de Paris, dont il n'a pas retenu les dattes, par celui dupremier May 1714. par l'article 38. du Reglement général fait au Parlement de Normandie en l'année 1666. par les obfervations de M. Pierre Defmazures, & par l'interprétation ou réfolution du Confeil Provincial d'Artois du 18 Février 1621.

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Il ajoûte une obfervation d'un grand poids, qui eft que M. Maillard lui a fait voir des nottes trés-fçavantes & très-curieufes qu'il avoit faites fur cette matiere, que cet Auteur avoit embraffé cette derniere opinion, & que c'étoit auffi la fienne. Il finit cette differtation par une réflexion prife ab abfurdo.

Si la Coutume du domicile, dit-il, étoit celle qui dût fixer la majorité de la perfonne, la liberté que nous avons de changer nos demeures, de nous en conftituer de nouvelles, & de réfider où il nous plaît, nous jetteroit dans de fort grands embarras ; le majeur en Normandie demeureroit tout à coup mineur à Paris, & vice versâ, & revenant dans fon pays natal, il reprendroit fon premier état ; fi depuis il venoit s'établir fous la Coutume de Bruxelles où il faut vingt huit ans pour eftre majeur, le majeur même de vingt-cinq ans demeureroit auffi-tôt mineur; ce qui jetteroit dans des embarras confidérables, qu'on peut aisément éviter en abandonnant à la Loy de l'origine la décifion de notre question.

Il a paru depuis peu un Livre intitulé, Traité des Majoritez coutumieres & d'Ordonnance.

On avoit tout lieu de croire que l'Auteur, en traitant cette matiere y auroit agité les questions mixtes, que le titre de fon Livre sembloit annoncer; mais il s'étoit apparemment propofé de vivre neutre au milieu du combat, & il s'eft contenté de nous rapporter les différentes difpofitions de nos Coutumes fans fe mêler du moindre accommodement.

Il eft pourtant vrai qu'en la page 281. il y fait mention d'une question mixte; c'eft au fujet de la néceffité de l'autorisation dans une femme pour pouvoir tefter; & il dit qu'une femme n'étant pas obligée parla Coutume de fon domicile de fe faire autorifer par fon mary pour tester,avoit befoin de l'autorisation de fon mari pour la va. lidité de fon Teftament quant aux biens fituez dans une autre Coutume qui requiert l'autorisation du mari,& il cite l'Arrêt en la qua→ triéme Chambre des Enquêtes du 26. Juillet 1679. raporté dans

le Journal duPalais,qui néanmoins juge directement le contraire. Cet Auteur à la pag. 202. touche notre question, & dit que c'est la Coutume du lieu du domicile de la perfonne qui regle cette majorité; mais on eft perfuadé qu'il n'avoit pas lors en vûe de donner la préférence à la Loy dudomicile du mineur fur la Loy de fon origine.

Cette question eft des plus importantes, & la décision en est d'une conféquence trés grande; puifque l'état de majorité est celui qui nous donne le pouvoir plein & entier de commercer avec les hommes, & nous rend les maîtres abfolus de difpofer de nos biens.

Quelque parti qu'on puiffe prendre, on trouve toujours de très-grands inconvéniens.

Donnera-t'on la préférence à la Loy de l'origine? Il faut impofer filence à prefque tous nos Auteurs, qui font dépendre la capacité, ou l'incapacité de l'homme de la Loi du domicile actuel; il faut fuppofer un homme qui vivant fous l'autorité de certaines Loix, veut cependant en fouftraire fa perfonne.

Se déterminera-t'on pour la Loi du domicile? Il en peut naître une infinité d'inconvéniens dont M. Frofland en a remarqué plufieurs.

Un majeur en Normandie, ou touchant à la majorité viendra, en suivant la destinée de son pere, demeurer avec lui à Paris: Dès ce moment ce majeur, ou qui eft fur le point de l'être, fera quant à fon état de majeur ou de mineur, foûmis à la Coutume de Paris; de majeur il deviendra tout à coup mineur, & fera privé d'un droit qui lui étoit acquis, celui qui touchoit à la majorité, fera obligé d'attendre les vingt-cinq ans : Son pere change encore de domicile, & va demeurer à Bruxelles, où il faut vingt-huit ans, l'état de ce fils eft encore reculé de

trois ans.

Ce majeur par la Loy de fon origine eft fur le point de former

fe fou

fa demande en reddition de compte de Tutelle; fon pere strait à cette demande en tranfportant fon domicile dans une Coutume où la majorité est reculée : Les actes qu'un fils de famille pourra faire feront toûjours incertains, & dépendront du caprice d'un pere. Ce fils de famille s'eft obligé comme majeur, à raifon du domicile de fon pere; ce pere va demeurer dans une autre Coutume, & dès lors cet Acte deviendra l'Acte d'un mineur, ou du moins il faudra dire que dans le nouveau domicile il ne pourra plus faire le même Acte qu'il pouvoit faire dans l'ancien ; il a été majeur, & il est à l'instant devenu mineur fon état fera perpétuellement vacillant, jufqu'à ce qu'il ait atteint l'âge le plus avancé prefcrit dans les différentes Nations du monde.

Mais quoi! ce ne font que des inconvéniens; Inconvéniens mêmes qui fe rencontrent dans quantité d'autres circonstances, & que le changement de domicile fait nécessairement naître, fans néanmoins que l'on croye devoir pour cela s'écarter des regles ordinaires, qui foûmettent la perfonne à la Loi de fon domicile. Une femme, par la Loi de fon domicile, est sous la puissance de fon mari; ce mari va demeurer dans une Coutume contraire, & elle ceffe d'être en fa puiffance. Rodemburgius tit. 2. ch. 1. convient de cette décifion. Fac igitur virum qui per loci Leges, ubi degit uxorem,habeat in poteftate collocare domicilium alio, ubi in poteftate virorum uxores non funt, vel vice verfâ : Dicendum ne erit induere uxorem poteftatem quâ priùs liberata, & exuere cui alligata erat ; in affirmativam Sententiam deduci videmur per tradita Burgund. tract. 2. num.7. & rectè; perfonæ enim ftatus, & conditio, cum tota regatur à Legibus loci cui illa fefe per domicilium fubdiderit, utique mutato domicilio mutari, & neceffe eft perfona conditionem.

Une femme eft domiciliée à Paris où elle peut tester fan s l'autorisation de fon mari; fon mari va demeurer en Bourgogne, &

dès lors elle ne peut plus tefter fans cette autorisation.

Une fille en Normandie ne peut s'obliger pour autrui, à caufe du Senatus - Confulte Velleïen; elle vient demeurer à Paris, & elle le pourra; elle retourne, elle ne le pourra plus, & vice verfâ.

Il nefemble donc pas que cette question doive estre envisagée par les inconvéniens; au contraire, ces inconvéniens n'empêchant pas le cours des principes généraux par rapport à quantité d'autres cas, il fembleroit convenables, pour ne pas faire de bigarures dans les Loix, d'adopter pour la majorité les mêmes principes, & les mêmes raifons de décider.

Il ne faut pas dire que ceux qui ont écrit fur cette matiere, & qui ont décidé que la majorité ou la minorité fe prenoient du lieu du domicile, n'ont pas prétendu donner la préférence à la Loi du domicile,au préjudice de la Loi de l'origine; mais qu'ils ont fuppofé que le mineur étoit domicilié dans le lieu de fon origine; car d'Argentré a prévû précisement l'oppofition de ces deux Loix, & il a nommément décidé pour la Loi du domicile. C'est sur l'art. 218. Gl. 6. n. 47. où l'on fçait qu'il a traité des Statuts perfonnels & réels: Originis locus nufquam in foro confiderationem habet, cum aliud domicilium proponitur. Aufli pofe-t'il comme maxime que: Quotiefcumque de habilitate, aut inhabilitate perfonæ quæratur, toties domicilii leges, & Statuta fpectanda, & il cite à ce fujet Barth. & Jafon, qui, dit-il, tiennent pour principe, Statuta nunquam ftatuere fuper habilitate aut inhabilitate non fubjecti, & cette raifon leve tout équivoque ; car du moment que les Loix ne peuvent rendre habiles ou inhabiles que les perfonnes qui leur font fujettes, il n'y a pas de difficulté qu'elles ne peuvent agir que fur les domiciliez, qui font tels que la Loi du domicile les déclare, & c'est après l'exposition de ces maximes que d'Argentré ajoûte ce que nous avons dit précedem

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