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LII.

Peut-on guérir naturellement les poffeffions &obfeffions du Démon.

Q

Uelques nouveaux Médecins (a) croyent avoir des fecrets naturels pour guérir les obfeffions, & ils fe vanrent même d'en avoir guéri, ce qui ne s'est pu faire qu'en corrigeant les humeurs & les difpofitions naturelles, qui donnoient lieu au Démon d'obfeder ces perfonness par exemple, la mélancolie dans Saül, le déreglement d'une autre paffion dans les fept maris de Sara, fille de Raguël; quelques autres humeurs peccantes dans d'autres maladies, & par ce moyen ôtent au mauvais Efprit l'occafion d'exercer fa malice fur ces perfonnes, de les obfeder & de les inquiéter. Car on ne peut nier que fou vent le malin Efprit ne mette en œuvre les humeurs & les mauvaifes qualités qu'il trouve dans les hommes pour les tenter > les inquiéter & les porter aux défordres & au désespoir.

(a) V. Gabriel Clauder 2. Decur. anni IV. Obfervat. c. XXXVI. p. 217. Academ. Leopold. Curjosota vai. Įiom

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decad. a. an. 2. p. 334. Item. an. VII. p. 159. decad. I an. 3. p. 100. &c.

On a vû des perfonnes obfedées du Démon, qui en étoient fatiguées & importunées de nuit & de jour, le Démon les éveillant, leurs tirant le nés ou les oreilles, ne leur laissant aucun repos, & leurs difant s'ils ne vouloient pas lui demander quelque chofe. (b) Spanger, Dominicain & Inquifiteur, dit qu'il a condamné plufieurs Sorciers, qui étoient bien-aifes de mourir, difant que le Démon ne leur laiffoit aucun repos, & leur rendoit la vie en nuyeufe.

LIII.

Sorcieres au Sabat.

"On traite de fables tout ce qu'on dit des Sorcieres qui vont au Sabat,& l'on a plufieurs exemples qui prouvent qu'el-. fes ne bougent de leurs lits, ni de leurs chambres; mais quelques unes fe frottent d'une certaine graiffe ou onguent, qui les affoupit & les rend infenfibles, & pendant cet évanouiffement elles s'imaginent; aller au Sabat & y voir & entendre ce que tout le monde dit qu'on y voit & entend.

On lit dans le Livre intitulé: Malleus maleficarum, où marteau des Sorcieres, qu'une femme affuroit les Inquifiteurs

entre les mains defquels elle étoit, qu'elle fe rendoit réellement & corporellement où elle vouloit, encore qu'elle fut enfermée & gardée, quoique le lieu où elle alloit fut fort éloigné.

Les Inquifiteurs lui ordonnerent d'aller en un certain endroit, de parler à certaines perfonnes, & de leur en rapporter des nouvelles. Elle promit d'obéir. On l'enferma dans une chambre fous la clef; auffi-tôt elle fe coucha étendue comme morte. On entra, on la remua, elle demeura immobile & fans aucun fentiment,en forte que lui ayant approché du pied une chandelle allumée, on le lui brula fans qu'elle fentit rien. Peu après elle revint à elle, & rendit compte de la commiffion qu'on lui avoit donnée, difant qu'elle avoit eu gran de peine à faire le chemin. On lui demanda ce qu'elle avoit au pied. Elle dit qu'elle y avoit grand mal depuis fon retour & ne favoit d'où cela lui venoit.

Alors les Inquifiteurs lui déclarerent ce qui étoit arrivé, qu'elle n'étoit point fortie de fa place, & que la douleur au pied qu'elle fentoit, lui venoit d'une chandelle qu'on lui avoit appliquée pendant fon abfence prétendue. La chose ayant été bien verifiée, elle reconnut fon égarement, de manda pardon, & protefta de ne retomber jamais dans une pareille faute.

Mais d'autres Hiftoriens (a) racontent que par le moyen de certaines drogues, dont les Sorciers & Sorcieres fe frottent ils font réellement & corporellement rranf portés au Sabat. Torquemade raconte d'après Paul Grillaud qu'un mari ayant foupçonné fa femme d'être Sorciere, voulut s'avoir fi elle alloit au Sabat & comment, elle faifoit pour s'y tranfporter, Il l'obferva de fi près qu'il reconnut un jour que s'é tant frottée d'une certaine graiffe, elle prit la forme comme d'un oifeau & s'envola, fans qu'il la vit, jufqu'au matin qu'elle fe trouva au lit auprès de lui. Il la queftionna beaucoup fans qu'elle voulut lui rien avouer A la fin il lui dit ce qu'il avoit vu & à force de coups de bâtons il la contraignit de lui dire fon fécret & de le mener avec elle au Sabat.

Arrivé en ce lieu, il fe mit à table avec les autres, mais comme tout ce qui y étoit fervi étoit fort infipide, il demanda du fel on fut affez longtemps fans en apporter enfin voyant une faliere, il dit: Dieu foit béni; voila enfin du fel. Au même moment il ouit un très-grand bruit ; toute l'affemblée difparut, il fe trouva feul & nud dans un champ entre des montagnes. Il avança & trouvant des Bergers, il apprit qu'il

étoit à plus de trente-trois lieues du lieu de fa demeure. Il y revint comme il pût, & ayant raconté la chofe aux Inquifiteurs-ils firent arrêter fa femme & plufieurs autres complices, qui furent châtiés comme ils le méritoient.

Le même Auteur raconte qu'une femme revenant du Sabat, portée dans les airs par le malin Efprit, ouit le matin la cloche pour l'Angelus, auffi-tôt le Diable la quitte, elle tombe dans une haye d'épines fur le bord de la riviere. Elle étoit nuë & avoit fes cheveux épars fur le fein & fur les épaules. Elle apperçut un jeune garçon, qui à force de priéres vint la prendre & la conduifit au village prochain, où étoit la maifon de cette femme. Elle fe fit beaucoup preffer pour déclarer à ce jeune garçon la vérité de ce qui lui étoit arrivé; elle lui fit des préfens & le pria de n'en rien dire. Mais la chofe ne laiffa pas de fe répandre.

Si l'on pouvoit faire fond fur toutes ces hiftoires, fur une infinité d'autres femblables que l'on raconte, & dont les livres font remplis, on pourroit croire que quelque fois les forciers font emportés en corps au Sabat. Mais en comparant ces hiftoires avec d'autres qui prouvent qu'elles n'y vont qu'en efprit & en imagination, on peut avancer que tout ce qu'on raconte des for

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