Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Le P. Delrio Jefuite dit que le forcier nommé Trois Echelles, détachoit par fes enchantemens en présence du Roy Charles IX. les chainons d'un collier de l'Ordre porté par quelques Chevaliers de l'Ordre du Roy, qui étoient fort éloignés de lui; qu'il les faifoit venir dans fa main & les remettoit a leur place, fans que le collier fut endomagé.

Combien de tours fe font avec les cartes qui paroiffent des enchantemens, & ne font que des jeux & des bagatelles, lorfqu'on en fait le fecret? On a vû dans ces quartiers un cheval,qui paroiffoit doüé d'intelligence & entendre le l'engage de fon Maître. Tout le fecret confiftoit en ce que ce cheval étoit dreffé à obferver certains mouvemens de fon Maître, & enfuite de cés mouvemens fe portoit à faire certaines chofes auxquelles on l'avoit accoutumé, & qu'il n'auroit pû ni faire ni connoître de lui-même. Combien à-t'on vû de chiens faire des chofes prefqu'incroyables, & qu'on auroit apeine attendu du Domestique le plus intelligent & le plus fidele?

(a) Delrio. Difquif. ma- | Mathématiques de M. Ozagic. l. 1. c. 4. 5. 1.

(6) V. Les récreations

nam.

I

L X X V.

Examen des Apparitions. La plupart në font qu'illufions.

Ors qu'on defcend dans le détail des Apparitions des Efprits, des Démons des Efprits folets, on trouve prefque toujours qu'il y a de l'illufion; que ce fera un Domestique voleur ou débauché, qui cachera fes vols, fes démarches, ou fes forties nocturnes, fous l'apparence d'un lutin dont il contrefait le bruit ou les mouvemens; ou ce feront des faux monnoyeurs qui s'étant emparés des fouterrains de quelques vieux Chateaux, en éloignent ceux qui voudroient y coucher ou l'habiter apparoiffant la nuit, traînant des chaînes, puis difparoiffant en fe jettant par une trappe dans le lieu où ils exercent leurs fabriques; comme M. le Maréchal du Bourg racontoit qu'il lui étoit arrivé à lui-même & comme on lit qu'il eft encore arrivé à d'autres. Ou ce feront de jeunes gens qui auront une intrigue amoureufe, qu'ils couvrent fous les appareils de chaînes, de portes ouvertes ou fermées, ou d'autres cho fes femblables.

[ocr errors]

en

Au Château d'Arvilliers en (a) Picardie on voyoit en certains temps de l'année c'eft-àdire, vers la Touffaint, des flames & une fumée horrible; on entendoit des cris & des hurlemens épouvantable; le fermier du Château étoit fait à ce bruit, parcequ'il, le caufoit lui-même. Tout le Village ne parloit que d'Apparitions de Spectres, & chacun en faifoit des Histoires à fa façon, Le Seigneur à qui le Château appartenoit, fe doutant qu'il y avoit de la fupercherie, y vint vers la Touffaint avec deux Gentils-hommes de fes amis, bien réfolu de poursuivre l'Efprit & de tirer deffus avec de bons piftolets. Peu de jours après on ouit un fort grand bruit au dessus de la chambre ou couchoit le Préfident Seigneur du Château. Ses deux amis y monterent tenant d'une main le pistolet & de l'autre une chandelle. Il ne virent d'abord qu'une épaiffe fumée & quelques flames; puis fe préfenta une efpece de Pantalon noir, ayant des cornes & une longue queue, qui commence à gambader devant

eux.

L'un d'eux lui tire un coup de piftolet, mais le Spectre aulieu de tomber, fe retour ne & fe frife devant lui. Ce gentilhomme veut le faifir, mais l'Efprit fe fauve par un (a) Causes Celebres t. XI. 1, 374.

petit efcalier; le Gentilhomme le fuit fans le perdre de veuë, & après divers tours le phantôme entre dans une grange & difparoít, étant arrivé auprès du mur, ou celui qui le pourfuivoit comptoit de le prendre & de l'arrêter. On apporte de la lumiere & on découvre que là où le Spectre avoit disparu, il y avoit une trappe qu'on fermoit au verrouil après qu'on y étoit entré. On força la porte de la trappe & l'on trouva le prétendu Efprit. Il avoüa toutes fes foupleffes & que ce qui le rendoit a l'épreuve du pistolet étoit une peau de buffle ajustée à fon corps.

Le Cardinal de Rets dans fes Mémoires, raconte agréablement la frayeur dont lui & ceux de fa compagnie furent faifis à la rencontre d'une troupe de Religieux Auguftins noirs, qui venoient la nuit de fe baigner dans la riviere.

Un Medecin dans une differtation qu'il a donnée fur les Efprits, dit qu'une fervante de la rue S. Victor étant defcendue dans la cave, en revint fort effrayée difant quelle venoit d'y voir un Efprit entre deux tonneaux. D'autres plus hardis y defcendirent & le virent de même; c'étoit un corps mort qui étoit tombé d'un chariot venant de l'Hôtel Dieu, & étoit paffé par

(6) Memoire du Cardinal de Rets. 1. 1. p. 43. 44.

le foupirail de la cave, y étoit demeuré debout entre deux muids.

Souvent ce fera un rat, un chat, un chien, un finge, un hibou, qui crient, qui jouent, ou rodent la nuit, & par leurs bruits effraient les vivans ; d'autre fois ce feront de jeunes gens en débauche, qui contreferont les Elprits, fe cacheront dans un cimetierre, s'envelopperont d'un l'inceuil, prendront des habits, ou des poftures extraordinaires & paroîtront dans une nuit fombre & à des heures induës, pour effrayer les paffans.

Ce fera même une chofe fort innocente. Une perfonne ira prier la nuit en fecret dans un cimetiere, à la porte d'une Eglife, ou fur la foffe d'un mort. Si elle eft apperçue, on criera à l'Efprit ; quelque fois pour éloigner ceux qui couchent dans une chambre, quelqu'un fe cachera fous le lit, tirera la couverture, ou les rideaux, ébranlera les colomnes, comme fi c'étoit un folet, qui prit plaifir à troubler le repos de ce lui qui y couche.

On fait les fupercheries des prêtres de Babilone (a) qui faifoient accroire au peuple que le Dieu Bêl buvoit & mangeoit, & celles des Prêtres du Dieu Anubis à Ro

(4) Daniel. XIV:

« AnteriorContinuar »