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& qui avoit fait grand bruit dans le pays.

Marfille Ficin affure qu'étant convenu avec Michel Mercate fon ami, que le premier des deux, de lui ou de Mercate, qui mourroit, viendroit après fa mort dire au furvivant des nouvelles de l'immortalité de l'ame à fon ami. Marfille Ficin mourut le premier, & après fon décès il vint trouver Mercate, qui étoit bien éveillé, & appliqué à des matieres de Philofophie; il lui.découvrit ce qui fe paffoit en l'autre vie. On trouve grand nombre de pareils exemples dans Henry Morus, & Jofué Grandville, dans fon ouvrage intitulé, le Saducéifme combatu.

En voici un tiré de la vie duB.Jofephe de Lioniffe, Capucin Miffionnaire l. 1. p. 64. & fuivantes. Un jour qu'il s'entretenoit avec fon Compagnon, des devoirs de la Religion, de la fidélité que Dieu demande de ceux qui s'y font confacrés, de la récompenfe qu'il a réfervée aux parfaits Religieux, & de la fevere juftice qu'il exercera contre les ferviteurs infidéles; Frere Jofeph lui dit : je veux que nous nous promettions mutuellement que celui de nous qui mourra le premier, apparoiffe à l'autre, fi Dieu le permet ainsi, pour l'inftruire de ce qui fe paffe en l'autre vie & de l'état où

(b) Vide Albert. Fabritium de Recordatione anima post fata.

il fe trouvera. Je le veux, répartit le faint Compagnon: Je vous en donne ma parole. Je vous engage la mienne répliqua le Frere Jofeph. Quelques jours après le pieux Compagon fut attaqué d'une maladie qui le réduifit au tombeau. Frere Jofeph y fut d'autant plus fenfible, qu'il connoiffoit mieux que les autres la vertu du faint Religieux; il ne douta pas que leur accord ne fut executé, & que le mort ne lui apparût, lorfqu'il y penferoit le moins, pour s'acquitter de fa promeffe.

En effet, un jour que Frere Jofeph s'é toit retiré dans fa chambre, l'après midi, il vit entrer un jeune Capucin, horrible ment défait, d'un vifage pâle, & décharné, qui le falua d'une voix grêle & tremblante. Comme à la vûë de ce Spectre Jofeph parut un peu troublé; ne vous effrayez pas, lui dit-il, je viens ici comme Dieu la permis, pour m'acquitter de ma promeffe, pour vous dire que j'ai le bonheur d'être du nombre des elûs, par la miféricorde du Seigneur. Mais aprenez qu'il eft encore plus difficile d'être fauvé qu'on ne le croit dans le monde; que Dieu, dont la fageffe découvre les plus fecrets replis des confciences, pefe exactement toutes les actions qu'on a faites durant la vie, les penfées, les défirs, & les motifs qu'on fe propose en

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agiffant; & qu'autant qu'il eft inexorable à l'égard des pécheurs, autant eft-il bon, indulgent, & riche en miféricorde en faveur des ames juftes, qui l'ont fidélement fervi dans la vie. A ces mots le phantôme difparût.

XLVII I.

D'où vient que d'autres ne reviennent pas?

M

Ais, dira-t'on, d'où vient que tant d'autres perfonnes, qui s'étoient engagées de venir dire des nouvelles de l'immortalité de l'ame, après leur mort, ne font pas revenues? Seneque parle d'un Philofophe Stoïcien, nommé Julius Canus, qui ayant été condamné à mort par Jules Céfar, dit hautement qu'il alloit apprendre la vérité de cette queftion, qui les par tageoit, fçavoir fi l'ame étoit immortelle où non. Et on ne lit pas qu'il foit revenu, La Motte le Vayer, étoit convenu avec fon ami Baranzan, Barnabite, que le premier d'entr'eux qui mourroit, avertiroit l'autre de l'état où il fe trouveroit. Baranzan mourut, & ne revint point,

De ce que les morts reviennent quelque

(a) Senec. de animi tranqualitate. c. 14.

Liv. de l'Immortalité de l'ame,

fois, il feroit imprudent de conclure qu'ils reviennent toujours. Et de même ce feroit mal raifonner que de dire, ils ne reviennent jamais, par ce qu'ayant promis de revenir, ils ne font pas revenus. Il faudroit pour cela fuppofer qu'il eft au pouvoir des ames de revenir & d'apparoître quand elles veulent, & fi elles veulent; mais il paroît indubitable au contraire, que cela n'eft poínt en leur pouvoir, & que que ce n'est que par une permiffion très-particuliere de Dieu, que les ames féparées du corps paroiffent quelque fois aux vivans.

On voit dans l'hiftoire du mauvais Riche, que Dieu ne voulut pas lui accorder la grace qu'il lui demandoit de renvoyer fur la terre quelqu'uns de ceux qui étoient avec lui dans l'Enfer. De pareilles raifons tirées de l'endurciffement ou de l'incrédulité des mortels ont pû empêcher de même le retour de Julius Canus, ou de Baranzan. Le retour des ames, & leur apparition n'est pas une chofe naturelle,ni qui foit du choix des trépaffés. C'eft un effet furnaturel & miraculeux.

XLIX.

Divers fyftêmes, pour expliquer le retour des Revenans.

A matiere des Revenans ayant fait dans Le monde autant de bruit qu'elle en a fait, il n'eft pas furprenant que l'on ait formé divers fyftêmes, & qu'on ait propofé diverfes manieres pour expliquer leur retour & leurs opérations. Les uns ont cru que c'étoit une réfurrection momentanée,caufée par l'ame du défunt, qui rentroit dans fon corps, ou par le Démon qui le ranimoit & le faifoit agir pendant quelque tems, tandis que fon fang gardoit fa confiftance & fa fluidité, & que fes organes n'étoient point entierement corrompus & dérangés.

D'autres frappés des fuites de ce principe & des conféquences qu'on en pourroit tirer, ont mieux aimé fuppofer que ces Vampires n'étoient pas vraiment morts, Qu'ils confervoient encore certaines femences de vie, & que leurs ames pouvoient de temps en temps les ranimer & les faire fortir de leurs tombeaux, pour paroître parmi les hommes,y prendre quelque nour, riture, fe rafraichir; y renouveller leur fuc nourricier, & leur efprits animaux, en

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